25 janvier 2009

«L'opposition est là pour empêcher la majorité de faire trop de bêtises»

En invitant Claude Goasguen, député UMP de Paris, Roger Karoutchi, ministre des Relations avec le Parlement, Jean-Luc Mélenchon, sénateur (Parti de Gauche) et Arnaud Montebourg (député PS) Serge Moati savait qu'il allait «pourrir» son émission Ripostes de ce dimanche sur France 5. Goasguen et Karoutchi sont les caricatures du débat pseudo-démocratique. Quand ils entendent le mot Gauche, ils sortent leur révolver c'est-à-dire leur morgue, leur aversion, leur exécration de tout ce qui ressemble, de près ou de loin, à la Gauche.

Que voulait Serge Moati ? Faire comprendre aux téléspectateurs pourquoi le groupe socialiste de l'Assemblée nationale a fait le siège du…fauteuil du président de l'Assemblée nationale, mardi dernier, et pourquoi les députés PS ont entonné La Marseillaise. La réponse est simple. L'opposition — on connait bien cela aussi à Louviers — n'a pas cent moyens à sa disposition pour s'opposer. Face à des majorités pléthoriques, l'opposition dispose de la parole et donc du temps de parole. Si on encadre (on limite) ce temps de parole, on prive la Gauche (notamment) d'un temps d'explication nécessaire pour que le pays à l'écoute comprenne ce qui se joue. Quand les députés PS déposent 200 fois le même amendement, ils n'ont pas l'intention de le discuter 200 fois. Ce qu'ils cherchent à faire, c'est à disposer d'un temps suffisamment long pour que les médias s'emparent de leur parole et la répercutent dans le pays. C'était ce qu'ils souhaitaient faire autour de l'article 13 de la loi organique sur le règlement intérieur de l'Assemblée nationale.

Est-ce satisfaisant ? Bien sûr que non. Cela prête le flanc à ce que la droite appelle une manœuvre d'obstruction alors qu'il ne s'agit que d'une volonté d'explication. D'ailleurs, quand elle était minoritaire, la droite a usé et abusé (légitimement) de ce droit d'amendement dévoyé. On se souvient de Christine Boutin tenant le micro et lisant la bible pendant cinq heures pour s'opposer à la discussion sur le PACS. Aujourd'hui, la droite avoue qu'elle s'est trompée, qu'elle est passée à côté d'une réforme plebiscitée par les Français. Mme Boutin avait raison de défendre son droit d'opposition même si elle avait tort sur le fond.

Mis sous pression par Jean-François Copé et Roger Karoutchi, Bernard Accoyer, le président de l'Assemblée nationale et donc le président de la totalité des députés a admis avoir commis une erreur en ne respectant pas, mardi, l'opposition de gauche. Depuis il a adressé des propositions écrites à Jean-Marc Ayrault, président du groupe PS, qui vont servir de base à une négociation engagée sous le signe du débat, du dialogue et non plus du coup de massue. Cela prouve une chose : l'attitude des députés PS a abouti à un changement d'attitude du président UMP de l'Assemblée. Comme le dit bien Arnaud Montebourg : « l'opposition est là pour empêcher la majorité de faire trop de bêtises. »Piétiner l'opposition démocratique, c'est prendre un risque : que le débat n'ait plus lieu dans les assemblées. Mais dans la rue.

Légende photo : On reconnait François Loncle, député PS de l'Eure, en veste bleue au premier rang, près du perchoir. (DR)

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