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Suzanne Lipinska.©JCH |
S’il est un lieu en France qui
a contribué à servir d’écrin aux cinéastes français et étrangers, c’est bien le
Moulin d’Andé. De grands réalisateurs y ont tourné des scènes de films devenues
mythiques et c’était bien le moins que pouvaient faire les autorités
européennes du cinéma que de reconnaître ce lieu comme un bijou dépassant
largement les frontières de l’hexagone.
C’est fait depuis que Wim
Wenders et le conseil d’administration de la « European Film
Academy » ont décerné au Moulin d’Andé le titre de : « Trésor de la culture
cinématographique européenne ». Mais les lieux ne sont rien s’ils
manquent d’âmes humaines pour les animer et les dévoiler. Au Moulin d’Andé,
celles de Suzanne Lipinska et de Maurice Pons continuent leur cheminement dans
l’espace et dans le temps. Belle Ame et grande émotion aussi de la part de « Suzon
» à l’instant de dévoiler la plaque apposée à l’entrée du Moulin, symbole
matériel de reconnaissance puisque le jour choisi — un 14 septembre —
coïncidait avec la date anniversaire de la naissance de Maurice Pons (né à
Strasbourg en 1927) ce grand absent-présent à la fête.
Il fut, ne l’oublions
jamais, l’un des principaux artisans de la renommée de ce monument artistique
et culturel connu et reconnu partout dans le monde. Sans l’auteur des « Saisons
», de « Mlle B » et de ses « Mistons », jamais François Truffaut n’aurait eu
l’idée de s’intéresser à ce haut lieu de la vallée de Seine où les rencontres
d’écrivains, de philosophes, de cinéastes, de musiciens, de politiques aussi,
continuent de donner vie à ce haut lieu de l’esprit toujours en mouvement.
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Xavier Beauvois.©JCH |
La preuve ? Suzanne
Lipinska, presque nonagénaire, sollicitée par Xavier Beauvois (présent hier à
Andé) a accepté d’être une des principales actrices du prochain film de celui
qui a reçu le grand prix du festival de Cannes pour « des hommes et des Dieux »
le 5e long métrage d’un acteur-scénariste. Convaincre Suzanne
Lipinska de faire l’actrice ne semble pas avoir été simple. Jamais, dans le
passé, la présidente de l’association culturelle du Moulin d’Andé, n’avait été
sollicitée pour jouer devant la caméra. Le film sera tourné à Etretat et Fécamp
(dans les semaines à venir) et pourrait s’intituler « Le Petit-Fils » dont la
grand-mère sera (devinez qui ?) celle qui continue de présider aux
destinées d’un lieu que personne n’imagine devenir autre chose que ce qu’il
est. (1) Un lieu « de tous les possibles » comme aime à le répéter Suzanne qui n’a
de cesse de préparer sa succession. Une succession improbable, voire
impossible, tant l’aura de la maîtresse de ce monument historique exigera de celui ou celle qui saisira les rênes, de
patience, d’imagination, d’esprit créatif et de relationnel aussi dans le
meilleur sens du mot.
La présence de Bernard
Leroy, président de la Communauté d’agglomération, d’Alexandre Rassaert,
samedi, pour le Conseil départemental de l’Eure, était la preuve de la
bienveillance et de l’engagement des autorités politiques afin que le CECI
(Centre d’écritures cinématographiques) les académies de musique, les concerts,
les séminaires, les résidences d’artistes, poursuivent l’élan impulsé par
Suzanne Lipinska et ses salariés dont on parle trop peu.
Même si Stéphane Bern (et
son loto du patrimoine) a choisi de doter le Moulin d’Andé d’une subvention (dont
on ignore le montant) apte à entraîner la restauration des rocailles du parc en
2019, la situation financière globale ne permet pas (encore ?) de dégager
suffisamment de marge pour réaliser des travaux d’importance. Bâtiment classé,
le Moulin a besoin que des mécènes — ou des collectivités — se penchent sur la
sauvegarde d’un patrimoine privé, certes, mais tellement impliqué dans la vie collective
artistique de notre région.
J’espère que la sous-préfète
des Andelys, Virginie Sené-Rouquier, saura relayer auprès des autorités
compétentes, les besoins du Moulin et l’urgence de les satisfaire, du moins en
partie.
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Pascal Pistone et son accompagnatrice. ©JCH |
Il n’y pas de fête sans
spectacle musical au Moulin. Pascal Pistone a su associer le public en musique
et en images. Rappeler que Léo Ferré a chanté la poésie faisait du bien à ceux
et celles qui connaissent peu ou prou ce texte immense dont je publie un extrait :
« J'ai du savon qui lave
Les péchés capitaux
Un stylo-bille qui grave
Le goût d'un apéro
Un soutien-gorge à piles
Qui n' s'allume qu'aux beaux yeux
Un dentifrice habile
À blanchir les aveux
Un buvard facétieux
Qui sèche les chagrins
Un œil pour lire à deux
Quand le jour s'est éteint
Un violon capital
Voilé de Chambertin
A faire sonner le mal
Plus fort que le tocsin…»
Les péchés capitaux
Un stylo-bille qui grave
Le goût d'un apéro
Un soutien-gorge à piles
Qui n' s'allume qu'aux beaux yeux
Un dentifrice habile
À blanchir les aveux
Un buvard facétieux
Qui sèche les chagrins
Un œil pour lire à deux
Quand le jour s'est éteint
Un violon capital
Voilé de Chambertin
A faire sonner le mal
Plus fort que le tocsin…»
(1) Xavier Beauvois a promis que Suzanne serait « choyée » pendant les 10 jours de tournage.