15 avril 2019

« Aéroports de Paris » doit demeurer dans le giron public ! Non à sa privatisation


Je me suis battu pendant plusieurs années, comme citoyen engagé d’abord, et ensuite comme président d’une association (1), pour obtenir le retour des services de l’eau et de l’assainissement en régies publiques. Il est prouvé que la gestion publique de certains services quotidiens aux usagers est à la fois moins coûteuse financièrement et plus attentive aux investissements nécessaires. Autrement dit, je ne supporte pas qu’on remette en cause le rôle de l’Etat ou des collectivités territoriales dans certains secteurs d’activités que « le privé » dit on, assumerait au mieux.

La station d'épuration des eaux usées de Louviers dans les années soixante-dix. © Jean-Charles Houel
Nombreuses sont les communautés de communes ou les métropoles ou les communautés d’agglomérations qui remettent en cause, pendant les délégations de services publics ou à la fin des contrats en cours, la qualité et le coût de la gestion  privée pour revenir en régie publique. Jean-Luc Touly, notamment, s’est beaucoup investi dans l’analyse des comptes des grands groupes spécialisés dans la fourniture de l’eau et dans le traitement des eaux usées. Il a constaté que des frais « énormes » (notamment des frais de siège et d’abonnement) étaient payés par les collectivités sans que le service rendu en soit amélioré pour autant.

Après que Dominique de Villepin a privatisé les autoroutes suscitant l’ire de gens aussi différents que des élus de gauche ou…François Bayrou, on s’aperçoit que les usagers de la route sont des vaches à lait commodes et dociles. Sauf quand des gilets jaunes décident de contester les taxes ou les augmentations de tarifs des péages. Il est devenu évident pour tous que les autoroutes génèrent des profits importants. Très importants. Et que ce fut une grave erreur de privatiser les réseaux. Aujourd’hui l’état na plus que ses yeux pour pleurer et nous avec.

En désirant privatiser Aéroports de Paris, sous des prétextes archi-falacieux du genre « l’Etat n’a pas à s’occuper de boutiques de luxe » Bruno Le Maire et le gouvernement commettent une mauvaise action. La fronde multipolaire née de cette volonté (d’ailleurs votée majoritairement à l’Assemblée nationale) pourrait s’exprimer, malgré les obstacles juridiques nombreux, sous la forme d’un référendum d’initiative partagée. Je suis hostile au référendum par principe. Je soutiens que la démocratie représentative doit écouter les citoyens, entendre leurs revendications, corriger la volonté politique exprimée avant de commettre l’irréparable sous la forme d’une concession de 70 ans ! Tout cela pour ramasser 10 milliards d’euros tout de suite et éviter que la dette de la France dépasse les 100 % du PIB. Pour autant, devons nous faire la fine bouche et nous interdire d’utiliser un moyen démocratique (?) pour empêcher l’Etat de privatiser ADP ? Comme rien ne dit que le référendum sera possible et encore moins probable, il n’y a guère que la pression citoyenne et les médias pour ouvrir les yeux des gouvernants.

Le groupe Vinci gère dans douze pays (Royaume-Uni, Portugal, Cambodge, Japon...) 46 aéroports, dont 12 en France, parmi lesquels ceux de Lyon-Saint-Exupéry, Rennes Bretagne, Toulon-Hyères et Nantes-Atlantique…L’aéroport de Notre-Dame-des-Landes lui est passé sous le nez si bien que le groupe réclame des centaines de millions d’euros à l’Etat en dédommagement. Elisabeth Borne évoque, elle, des dizaines de millions ! Et si Vinci se servait de la négociation en cours pour accepter de baisser ses prétentions en échange de la concession d’ADP ? Chantage ? Non, simplement la vie courante du monde des affaires qui, parfois, oublie l’intérêt général. La seule question qui vaille est la suivante : pouvons-nous encore empêcher la privatisation d’ADP ? Le président de la République va-t-il demeurer sourd à une exigence partagée par bien des partis de droite et…de gauche ?

(1) « Association de défense de l’environnement et pour le retour des services de l’eau et de l’assainissement en régies publiques. » Cette association a été dissoute l’an dernier.