Chez les Le Pen on ne manque
pas de culot. Des voix plus autorisées que la mienne ont commenté avec sévérité
les déclarations et les gestes de Marine Le Pen à l’occasion de l’anniversaire
de l’appel du 18 juin 1940 du général de Gaulle. Une Le Pen gaulliste ! On
aura donc tout vu dans ce monde chaotique où les valeurs, les idées, les
principes cèdent sous le poids des trahisons et des reniements.
En saluant le général de
Gaulle, la responsable du Rassemblement national veut récupérer le
Rassemblement du Peuple français qu’avait créé le plus grand des Français
libres sous la 4e République. Elle joue sur les pertes de mémoire de
ceux et celles qui, dans la Résistance, ont lutté chaque jour et chaque nuit, contre
le défaitisme et le Pétainisme. Ils ne restent que quelques survivants mais les
livres d’histoire, les témoignages écrits ou filmés auront tôt fait de clore le
bec de Marine Le Pen, usurpatrice d’une action et d’un homme qui, seul, en France
et à Londres, avait prophétisé la victoire du monde libre sur les forces du
fascisme allemand, italien et Japonais.
Dans un entretien accordé au
Monde, ces derniers jours, Julian Jakson, historien anglais, dresse un portrait
sensible du général de Gaulle vu comme celui qui plaça la France au-dessus de
toutes les contingences et de tous les régimes. Hier monarchiste, demain républicain,
de Gaulle était avant tout Français. N’était l’affaire du 13 mai 1958 et le
retour au pouvoir de celui qui allait créer la 5e République,
supporté par une armée prête au coup d’Etat, ainsi que l’abandon des Harkis de
l’autre côté de la Méditerranée, le palmarès du général de Gaulle pourrait être sans
tache.
Pierre Mendès France avait
coutume de différencier le de Gaulle de 1940 et celui qui reprit les rênes du
pouvoir en 1958. L’ancien maire de Louviers n’admit jamais la constitution de
cette 5e République taillée sur mesure pour l’homme du 18 juin. Car
la tentation du pouvoir personnel y était trop présente. C’est sans doute ce
caractère là du gaullisme qu’affectionne Marine Le Pen : le culte du chef,
bien que Michel Debré, en préparant la constitution, ait quand même donné un rôle
éminent au Parlement et donc à la démocratie représentative.
Il faut être bien sot ou bien
aveugle pour suivre Marine Le Pen sur les chemins qu’elle emprunte. Nous sommes
nombreux à nous souvenir des propos de son père lorsqu’il trouva bien des
excuses aux extrémistes auteurs de l’attentat du Petit Clamart et destiné à
tuer le chef de l’Etat français. L’extrême droite ne change pas. Elle modifie
sa petite musique mais elle conserve les mots inscrits dans son programme de
toujours.