3 décembre 2022

A L'Assemblée nationale : Pierre Mendès France en actes et en actions sous trois républiques

François Loncle et la présidente de l'Assemblée nationale.©JCH

Je ne me lancerai pas dans un compte rendu exhaustif des causeries présentées par  d’éminents historiens à l’occasion du colloque organisé par l’Institut qui porte son nom cette semaine à l’Assemblée nationale et intitulé « Pierre Mendès France au cœur de trois républiques. » L’ancien président du Conseil et député maire de Louviers compte parmi les trois ou quatre parlementaires élus de la 3e à la 5e république. Une rareté donc.

 

Les admirateurs de l’homme Mendès en savent beaucoup sur les actes et actions de cet homme d’Etat aux qualités morales et intellectuelles peu ordinaires. Il est des chapitres de sa vie parlementaire qui méritaient un examen aussi rigoureux qu’objectif qu’il s’agisse de son attitude pendant les grandes crises (1934, 1958, 1968 avec Sabine Jansen) ou de son engagement en faveur d’une Europe équilibrée avec la présence souhaitée de la Grande-Bretagne (on sait ce qu’il advint) pour contrebalancer l’influence de la République fédérale d’Allemagne (avec Gérard Bossuat) et surtout protéger l’économie française mise à mal par les guerres succédant au second conflit mondial. PMF sera d’ailleurs choisi pour mettre un terme à la guerre d’Indochine et c’est sur la politique algérienne que son gouvernement échouera le 4 février 1955, ses adversaires au sein du parti radical voulant mettre un terme au bail de cet homme pour qui la vie des autres hommes importait plus que tout.

 

Jean Garrigue et Frédéric Potier ont animé l'après-midi.©JCH

Le grand intérêt de ce colloque résidait dans le travail de recherche conduit par ces historiens et historiennes qui devaient chercher et trouver le petit plus à ajouter aux connaissances existantes. Didier Maus, ancien membre du Conseil d’Etat et spécialiste des questions constitutionnelles constate que PMF n’a jamais été président de la commission des lois de l’Assemblée nationale et, semble-t-il, ne s’est intéressé que marginalement à l’évolution des institutions alors qu’il en fut l’une des victimes. PMF aurait — comme le général de Gaulle — souhaité un exécutif fort et un pouvoir législatif…force de contrôle. L’emploi de la dissolution en 1955, lui aurait permis, si l’usage avait été possible, de contrer les oppositions et d’en appeler à l’arbitrage du peuple souverain. Et si en 1958, le général de Gaulle n’était pas revenu au pouvoir dans les conditions inadmissibles qui furent celles de son retour sous la menace de l’armée, qui sait ce que ces deux hommes auraient pu faire ensemble (1) ?

 

Françoise Chapron, attachée scientifique de l’Institut, a écrit sa thèse sur Mendès France dans l’Eure. Nul ne connaît mieux qu’elle les liens qui unirent le député-maire à ses concitoyens de Louviers et du département normand. « L’accident » de 1958 devait conduire PMF à tourner la page lovérienne non sans un chagrin sincère. Les participants au colloque ont apprécié la séquence émouvante et enregistrée de Georges Kiejman dont la proximité avec PMF ne s’est jamais démentie. L’ancien ministre et avocat sait raconter avec une vraie admiration les campagnes auxquelles il a participé, ratée pour celle d’Evreux en 1962 ou réussie pour celle de Grenoble en 1967.

 

En début d’après-midi, Yaël Braun-Pivet, présidente de l’Assemblée nationale, a prononcé un discours dont il faut retenir, au-delà de l’exemplarité et de l’actualité du « mendésisme », la volonté qui est la sienne de contribuer à la panthéonisation de Pierre Mendès France. Lors du repas hommage organisé le 18 octobre dernier à l’initiative d’Emmanuel Macron, ce dernier avait écouté avec attention la demande exprimée par François Loncle, président de l’Institut Mendès France, de panthéoniser Pierre Mendès France, homme d’Etat, résistant, élu de la nation. Si cette panhéonisation advenait, la France serait enfin reconnaissante à l’égard de ce grand patriote.

 

(1) Malgré leurs différences et leurs divergences, Pierre Mendès France et le général de Gaulle s’estimaient. PMF n’avait-il pas été membre du gouvernement provisoire à Alger après avoir combattu courageusement dans les Forces françaises libres ?

1 décembre 2022

Affaire Quattenens : Le suffrage universel ne doit pas devenir une machine à blanchir

Il existe dans l’esprit de certains et de certaines, une idée répandue que j’ai toujours combattue. Dans l’affaire Adrien Quattenens mis en cause par sa compagne pour des violences physiques et morales, j’entends en effet dire ici et là que le député de la France Insoumise pourrait démissionner et se représenter devant les électeurs(trices) de sa circonscription afin de retrouver sinon une virginité du moins une légitimité. Ce serait l’histoire du suffrage universel transformé en tribunal pour décider de l’innocence ou de la culpabilité de l’auteur d’un délit. Incroyable ! C’est marcher sur la tête car le suffrage universel n’a pas vocation à remplacer les juges seuls habilités à décider de l’innocence ou de la culpabilité de quelqu’un. Le suffrage universel ne doit pas devenir une machine à blanchir.

 

La justice, d’ailleurs, est saisie et M. Quattenens a d’ores et déjà reconnu avoir été violent avec son épouse dans le cadre d’un divorce conflictuel. Une procédure de « plaider coupable » aboutira le 13 décembre prochain à une décision judiciaire. Je sais bien que Jean-Luc Mélenchon a tenté de minimiser la portée de la (les ?) gifle(s) infligées à la compagne de son protégé. Il n’empêche : l’acte du député LFI est inadmissible et aucune raison plausible ne peut être avancée pour en atténuer les effets et encore moins les conséquences politiques pour lui-même et aussi pour ceux et celle qui le soutiennent.

 

Mme Céline Quattenens a publié ces derniers jours un communiqué destiné à établir les faits de violence dans toute leur portée et leur durée. Car il semble bien, si Mme Quattenens dit la vérité, que la violence de son mari était ancienne et répétée. J’ai appris au cours de années passées, que si les violences sexuelles et sexistes sont niées dans 99 % des cas par leurs auteurs, la parole des victimes est très (majoritairement) crédible. En tout état de cause, l’élection ne peut pas et ne doit pas être utilisée à des fins électoralistes sans lien avec des faits de droit commun. Je le redis, nul ne doit se sentir blanchi par le vote des électeurs et des électrices plus sensibles aux émotions qu’à la vérité judiciaire qui ne vaut…que ce qu’elle vaut.