1 septembre 2018

Suzanne Lipinska faite commandeur des Arts et des Lettres par Françoise Nyssen, ministre de la Culture


Suzanne Lipinska et Françoise Nyssen. © Jean-Charles Houel
Commandeur des Arts et des Lettres. Depuis hier, Suzanne Lipinska, présidente de l’Association culturelle du Moulin d’Andé, a rejoint ces centaines d’artistes : écrivains, comédiens, peintres, musiciens, cinéastes Français et étrangers que la République a souhaité honorer pour leur art ou leurs actions en faveur de la culture sous toutes ses formes.

Pour accomplir cette tâche symbolique, la République avait délégué Françoise Nyssen, ministre de la Culture et par ailleurs ancienne (future) éditrice de « Acte Sud ». Elle avait tenu à être présente malgré quelques vicissitudes auxquelles elle fit une allusion discrète dans son discours. La ministre était accompagnée du local Sébastien Lecornu, ancien président du conseil départemental, secrétaire d’Etat à l’environnement, orphelin depuis la démission de Nicolas Hulot.

La cérémonie avait lieu au Théâtre, lieu exemplaire s’il en est puisque c’est là que sont donnés concerts, surtout depuis 1983, et accueillis les séminaires des sociétés ou entreprises réalisant ainsi le vœu de « Suzon » de réunir le monde culturel et le monde économique. De nombreux amis avaient tenu à être présents à cette fête estivale magnifique. Des ami(e)s de longue date, des ami(e)s plus récent(e)s, tous et toutes admiratifs(tives) d’une œuvre humaine exceptionnelle et d’un lieu lui même favorable au développement des œuvres de l’esprit. François Loncle, ancien député et ami du Moulin, offrit à Suzon l’ensemble des lettres originales qu’il échangea avec les différents présidents de la République et ministres de la Culture, Jack Lang occupant une place essentielle.

Suzanne et sa décoration. ©JCH
Françoise Nyssen prononça un discours impeccable. Mêlant détails familiers et histoire d’un lieu où tant de grands noms se sont affichés un jour, un an, ou pour toujours. Elle n’omit pas, elle l’éditrice, de rappeler le souvenir de Maurice Pons, compagnon de 60 ans de vie au Moulin aux côtés de Suzanne, grand écrivain mais également artisan de l’accueil au Moulin d’opprimés ou de bannis par des régimes totalitaires et il n’en manque pas sur notre planète.

Suzanne, prônant une parole libre — ô liberté ! — répondit à la ministre sur le ton qui lui sied le mieux. Sans notes, nantie de sa seule mémoire qu’elle a immense, La maîtresse des lieux rappela comment ce lieu historique né au 12e siècle a traversé le temps et est devenu ce qu’il est. Un lieu dont elle exige, qu’après sa mort, il reste ce lieu de « tous les Possibles » afin qu’il ne devienne pas une banale étape sur la route de Giverny et du Château-Gaillard. Stanislas, l’un de ses petits enfants, devrait recevoir le flambeau dont la flamme servira de phare à tous ces jeunes créateurs(trices) qui, parfois, manquent de moyens matériels, pour exprimer le meilleur d’eux-mêmes. En conclusion des discours, « Stan » ne manqua pas d'insister sur le soutien des Institutions sans lesquelles l'équilibre de gestion ne pourrait être atteint. La roue du Moulin continuera donc de tourner pour quelques siècles encore…

29 août 2018

La vacance de Monsieur Hulot, le…chassé du gouvernement ?

Le poste ministériel de Nicolas Hulot est vacant depuis hier matin. Surprenant tout le monde (politique, médiatique, écologique) le ministre de la transition énergétique s’est fait la malle. L’ancien animateur d’Ushuaia a plus d’un tour dans son sac. Constatant que les chasseurs avaient plus de poids que lui lors de la réunion organisée avec le président, constatant qu’un lobbyiste amateur de chair fraîche était present sans avoir été invité (le quidam prétend le contraire) Hulot qui en avait déjà ras les chaussettes des Néonicotinoïdes, du glyphosate, de la disparition avérée de la biodiversité, de la canicule et des ours de Pyrénées s’est soudain rendu compte que gouverner sans pouvoir c’est une noce sans musique.

Alors, à quoi bon ? Pourquoi rester dans un gouvernement qui ne parle que de croissance, de déficit, de MEDEF, de CSG, en oubliant totalement le numéro 3 de l’équipe et les raisons de sa présence (Chirac, Sarkozy et Hollande avaient pourtant tout fait pour le récupérer) une présence justifiée par la lutte contre le réchauffement climatique et les progrès dans les énergies renouvelables. Tu parles Nicolas !

Hulot s’aperçoit qu’il est plus facile de renouveler un ministre que de limiter l’usage des énergies fossiles. Mais cela, on le savait déjà depuis que Travert, le ministre de l’Agriculture, avait quasiment gagné tous les arbitrages budgétaires sous l’influence de la FNSEA, un autre lobby aussi puissant que celui des chasseurs.

A ce sujet, je me suis rafraîchi la mémoire en écoutant la fameuse et 
édifiante chanson écrite par Henri Tachan et consacrée à la chasse et aux chasseurs.
Je l’ai sue par cœur puis, avec le temps comme dirait le grand Léo, je me suis surtout 
souvenu de ce passage-là : 
« Les soldats ça s'enraye, les soldats ça se rouille, c'est comm'e les carabines 
Le servic'e militair'e ça s'continue plus tard à coups de chevrotines : 
Pour le chasseur français y avait le perdreau boche ou le lièvre fellouze, 
Pour le chasseur franquiste l'anarchiste rouge-gorge et la chienne andalouse...  
La Chasse, C'est le défoul'ment national, c'est le p'tit Vietnam des frustrés, 
La Chasse, C'est la guéguerr'e permise aux hommes en temps de paix, 
De paix ?! » 
Exagéré ? Si peu…






27 août 2018

« Le Lambeau » de Philippe Lançon, chroniqueur de Charlie Hebdo, un livre à lire d'une traite.


On a dit que le 7 janvier 2015 à Paris était une sorte de 21 septembre 2001 à New York. Si le nombre de morts n’est pas comparable, le symbole est assurément équivalent. D’un côté les twin towers qui s’effondre avec 3000 personnes décédées et de nombreux blessés, d’un autre une équipe rédactionnelle et des dessinateurs assassinés le tout par des fanatiques liés à l’Islam radical. Déjà dans le passé les locaux de Charlie hebdo avaient été incendiés servant en quelque sorte d’avertissement. Des appels à la mort de l’équipe de Charlie circulaient sur les réseaux sociaux depuis des mois ! Enfin l’horrible survint.

Parmi les victimes de Charlie Hebdo, sont disparus : Cabu, Tignous, Honoré, Charb, Wolinski, sans oublier Bernard Maris, Franck, le policier garde du corps de Charb, et d’autres membres de la rédaction dont Elsa Cayat, psychiatre et psychanalyste. Certains s’en sont sortis avec de graves blessures. C’est le cas de Philippe Lançon, chroniqueur, donné pour mort, mais « ressuscité » grâce aux soins assidus d’équipes médico-chirurgicales expertes et compétentes.

Philippe Lançon est sorti laminé de ses trois années de soins, d’opérations de reconstruction de son visage cassé. Comme il est fondamentalement journaliste, qu’il sait écrire, réfléchir, interpeller son lecteur, Philippe Lançon, après avoir retrouvé ses esprit et son goût pour l’écriture, a d’abord envoyé ses billets pour Charlie Hebdo et Libération, mais cela ne serait rien ou si peu, face au livre témoignage qu’il a ensuite soigneusement parsemé de souvenirs, de cris et de larmes livre édité par Gallimard.

« Le Lambeau » puisque tel est le titre de ce livre émouvant, éprouvant, est un livre à lire d’une seule traite. Il n’autorise aucun répit, aucune inattention. J’ai imaginé la stupeur de l’auteur, son effroi, sa douleur. Perdre ses amis assassinés sous ses yeux, recevoir plusieurs balles d’AK 47 (si répandue dans nos villes), devoir affronter l’avenir qu’on voit sans lumière et sans certitude. Passer sur le billard, y repasser maintes fois, se reconstruire un visage, une philosophie de la vie, déambuler avec des gardes du corps, restituer une mémoire parfois morbide parfois cynique, voilà le travail qui attendait Philippe Lançon. Pour y faire face, il y faut des qualités personnelles sans doute exceptionnelles. Je ne connais pas Philippe Lançon. J’aimerais le rencontrer pour lui assurer à quel point son récit est rassurant sur l’âme humaine et sur la résilience dont parlent les psychanalystes. Cette résilience qui permet de ressouder des amitiés, de refaire société et de survivre au drame. Du surhumain quoi.