On a dit que le 7 janvier
2015 à Paris était une sorte de 21 septembre 2001 à New York. Si le nombre de
morts n’est pas comparable, le symbole est assurément équivalent. D’un côté les
twin towers qui s’effondre avec 3000 personnes décédées et de nombreux blessés,
d’un autre une équipe rédactionnelle et des dessinateurs assassinés le tout par
des fanatiques liés à l’Islam radical. Déjà dans le passé les locaux de Charlie
hebdo avaient été incendiés servant en quelque sorte d’avertissement. Des
appels à la mort de l’équipe de Charlie circulaient sur les réseaux sociaux
depuis des mois ! Enfin l’horrible survint.
Parmi les victimes de
Charlie Hebdo, sont disparus : Cabu, Tignous, Honoré, Charb, Wolinski,
sans oublier Bernard Maris, Franck, le policier garde du corps de Charb, et d’autres
membres de la rédaction dont Elsa Cayat, psychiatre et psychanalyste. Certains
s’en sont sortis avec de graves blessures. C’est le cas de Philippe Lançon, chroniqueur,
donné pour mort, mais « ressuscité » grâce aux soins assidus d’équipes médico-chirurgicales
expertes et compétentes.
Philippe Lançon est sorti
laminé de ses trois années de soins, d’opérations de reconstruction de son
visage cassé. Comme il est fondamentalement journaliste, qu’il sait écrire, réfléchir,
interpeller son lecteur, Philippe Lançon, après avoir retrouvé ses esprit et
son goût pour l’écriture, a d’abord envoyé ses billets pour Charlie Hebdo et
Libération, mais cela ne serait rien ou si peu, face au livre témoignage qu’il
a ensuite soigneusement parsemé de souvenirs, de cris et de larmes livre édité
par Gallimard.
« Le Lambeau » puisque tel
est le titre de ce livre émouvant, éprouvant, est un livre à lire d’une seule
traite. Il n’autorise aucun répit, aucune inattention. J’ai imaginé la stupeur
de l’auteur, son effroi, sa douleur. Perdre ses amis assassinés sous ses yeux,
recevoir plusieurs balles d’AK 47 (si répandue dans nos villes), devoir
affronter l’avenir qu’on voit sans lumière et sans certitude. Passer sur le
billard, y repasser maintes fois, se reconstruire un visage, une philosophie de
la vie, déambuler avec des gardes du corps, restituer une mémoire parfois
morbide parfois cynique, voilà le travail qui attendait Philippe Lançon. Pour y
faire face, il y faut des qualités personnelles sans doute exceptionnelles. Je
ne connais pas Philippe Lançon. J’aimerais le rencontrer pour lui assurer à
quel point son récit est rassurant sur l’âme humaine et sur la résilience dont
parlent les psychanalystes. Cette résilience qui permet de ressouder des amitiés,
de refaire société et de survivre au drame. Du surhumain quoi.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire