27 août 2018

« Le Lambeau » de Philippe Lançon, chroniqueur de Charlie Hebdo, un livre à lire d'une traite.


On a dit que le 7 janvier 2015 à Paris était une sorte de 21 septembre 2001 à New York. Si le nombre de morts n’est pas comparable, le symbole est assurément équivalent. D’un côté les twin towers qui s’effondre avec 3000 personnes décédées et de nombreux blessés, d’un autre une équipe rédactionnelle et des dessinateurs assassinés le tout par des fanatiques liés à l’Islam radical. Déjà dans le passé les locaux de Charlie hebdo avaient été incendiés servant en quelque sorte d’avertissement. Des appels à la mort de l’équipe de Charlie circulaient sur les réseaux sociaux depuis des mois ! Enfin l’horrible survint.

Parmi les victimes de Charlie Hebdo, sont disparus : Cabu, Tignous, Honoré, Charb, Wolinski, sans oublier Bernard Maris, Franck, le policier garde du corps de Charb, et d’autres membres de la rédaction dont Elsa Cayat, psychiatre et psychanalyste. Certains s’en sont sortis avec de graves blessures. C’est le cas de Philippe Lançon, chroniqueur, donné pour mort, mais « ressuscité » grâce aux soins assidus d’équipes médico-chirurgicales expertes et compétentes.

Philippe Lançon est sorti laminé de ses trois années de soins, d’opérations de reconstruction de son visage cassé. Comme il est fondamentalement journaliste, qu’il sait écrire, réfléchir, interpeller son lecteur, Philippe Lançon, après avoir retrouvé ses esprit et son goût pour l’écriture, a d’abord envoyé ses billets pour Charlie Hebdo et Libération, mais cela ne serait rien ou si peu, face au livre témoignage qu’il a ensuite soigneusement parsemé de souvenirs, de cris et de larmes livre édité par Gallimard.

« Le Lambeau » puisque tel est le titre de ce livre émouvant, éprouvant, est un livre à lire d’une seule traite. Il n’autorise aucun répit, aucune inattention. J’ai imaginé la stupeur de l’auteur, son effroi, sa douleur. Perdre ses amis assassinés sous ses yeux, recevoir plusieurs balles d’AK 47 (si répandue dans nos villes), devoir affronter l’avenir qu’on voit sans lumière et sans certitude. Passer sur le billard, y repasser maintes fois, se reconstruire un visage, une philosophie de la vie, déambuler avec des gardes du corps, restituer une mémoire parfois morbide parfois cynique, voilà le travail qui attendait Philippe Lançon. Pour y faire face, il y faut des qualités personnelles sans doute exceptionnelles. Je ne connais pas Philippe Lançon. J’aimerais le rencontrer pour lui assurer à quel point son récit est rassurant sur l’âme humaine et sur la résilience dont parlent les psychanalystes. Cette résilience qui permet de ressouder des amitiés, de refaire société et de survivre au drame. Du surhumain quoi.

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