9 février 2011

Ça c’passe comme ça à Bruxelles, mais ça n’est pas une histoire belge


Je ne résiste pas au plaisir de vous rapporter quelques extraits d’une séance telle que l’a vécue à Bruxelles la semaine passée, Jean-Luc Mélenchon, député européen et qu’il relate sur son blog.

Il s’agissait de voter pour la nomination de trois hauts fonctionnaires à la tête de trois organismes nouvellement créés pour diriger les autorités de contrôle des risques financiers. Jusque là, vous suivez ? Car à partir de là, ça se complique. Si vous êtes pour, il faut voter contre et si vous êtes contre, il faut voter pour. Trop forts ces hauts fonctionnaires européens qui mitonnent de telles procédures. Tellement forts que le président de séance lui-même ne comprend pas pourquoi c’est ainsi.

À ce moment, une voix s’élève et demande pourquoi il n’y a aucune femme dans le lot. Vifs applaudissements dans l’hémicycle, et comme ça tourne à la gaudriole, on fait d’urgence intervenir une femme – je n’ose pas dire de service – la ministre hongroise, pour lire, au nom de la présidence du conseil, un papier écrit à l’avance et sans rapport avec le sujet. Toujours le même refrain : « Nous avons eu un débat très fructueux en vue de nous rapprocher de nos objectifs que nous sommes déterminés à suivre avec fermeté » Et ainsi de suite. Et à la fin : « c’est pourquoi le conseil vous demande de voter contre cette résolution pour approuver ce choix ».

À nouveau, remous sur les bancs devant le surréalisme de la scène. En raison de la gravité du sujet, le commissaire concerné se sent obligé d’intervenir. Tiens, c’est Michel Barnier. Il prend la parole, nous dit Jean-Luc Mélenchon, avec « un air de consul romain pendant un épisode des guerres puniques ». « Mesdames messieurs les députés de ce parlement, vous allez votez en toute responsabilité et liberté. Vous direz si vous approuvez la mise ne place du dernier élément nécessaire au bon fonctionnement des instruments de contrôle et surveillance des risques systémiques financiers…bla bla bla… ».

Là où ça se corse, c’est quand le commissaire tente, par des explications embrouillées à la Alliot-Marie, de justifier le fait qu’aucune femme ne soit présente parmi les candidats aux postes à pourvoir. Sous les rires des insolents répartis sur tous les bancs, il affirme en gardant son sérieux qu’il n’a pas choisi ces candidatures et qu’au dernier moment toutes les candidates féminines retenues se sont retirées de la « short-liste ». De plus en plus de parlementaires se tiennent les côtes.

Car dans les faits, et ils le savent bien, les plus hauts postes de l’Union européenne se négocient par nationalités. Et donc, si en plus il faut y ajouter la question du sexe des impétrants, pensent à l’évidence nos eurocrates, on n’y arrivera jamais ! Bon. Ça ira comme ça. Passons au vote et qu’on en finisse. Ça y est ! Le résultat s’affiche. Une écrasante majorité de contre. Donc c’est pour ! Les trois quidams sont nommés par une écrasante opposition. Mais le pire est à venir.

Une voix se fait alors entendre : « Monsieur le commissaire nous venons de voter et d’approuver votre proposition en votant contre le texte mais vous ne nous avez pas dit les noms des personnes concernées ! »

Hurlements de rire dans l’hémicycle ! « Un vent glauque parcourt les travées comme une houle de nausée » raconte le député européen. « Cette demande est légitime » déclare imperturbable le commissaire Barnier. Instant de flottement au milieu des rires, mis à profit pour lui faire passer discrètement un papier sur lequel figurent les trois noms dont il ne souvenait même pas, mais qu’il lit d’une voix assurée. Et en plus, confie amusé un député de droite à Jean-Luc Mélenchon en sortant de l’hémicycle, « C’est pas des bons, il paraît. Mais c’était le tour des autres de nommer leurs thons ! »

L’Europe qui nous protège est en marche. Si on vous l’dit !

Reynald Harlaut d’après le récit de Jean-Luc Mélenchon














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