La Cité de l'architecture du Palais de Chaillot de Paris accueille jusqu'au 11 mai (il faut faire vite) une exposition temporaire consacrée au travail de l'Atelier de Monrouge. Cette exposition s'intitule « La modernité à l'œuvre » et prend place dans les salles réservées aux expositions temporaires c'est-à-dire des salles situées en sous-sol, mal éclairées, ce qui est dommage pour apprécier la qualité des espaces consacrés à une œuvre qui s'échelonne de 1958 à 1981. Rappelons que l'Atelier de Montrouge comprenait à sa création quatre architectes dont Pierre Riboulet, Gérard Thurnauer, Jean Renaudie et Jean-Lous Véret. Renaudie quitta l'équipe en 1968.
L'architecture dans le débat public
Pourquoi accorder de l'importance à cette exposition qui ne pourrait être qu'un effort de mémoire sur un travail collectif qui a marqué nos villes ? Tout simplement parce que Gérard Thurnauer et donc l'Atelier de Monrouge sont intervenus concrètement dans la définition même de l'architecture originelle de ce qu'on appelait à l'époque la ville nouvelle du Vaudreuil devenue Val-de-Reuil. Parmi le fonds d'archives donné à l'Etat, la place du Vaudreuil est originale et importante. L'Atelier de Montrouge a été parmi les premiers à engager un débat public entre les commanditaires et ceux qui auraient un jour à habiter les logements des quartiers imaginés.
Sans revenir sur l'histoire de la ville nouvelle qui commence, grosso modo, en 1968 (il y a quarante ans) et sur sa place déjà acquise dans le Grand Rouen puisque « Louviers-Le Vaudreuil » avaient vocation à être la porte sud de ce Grand-Rouen (n'aurait-on que quarante ans de retard ?) qui a créé quelques traumatismes dans les villages amputés d'une grande partie de leur territoire, a suscité des vagues de protestations et bouleversé une donne locale et départementale conservatrice, on peut assurer aujourd'hui que la ville nouvelle (devenue Val-de-Reuil) occupe une place de choix dans le concert régional. Ses équipements collectifs, ses industries et services, ses capacités d'accueil en plein développement, la correction (inévitable) d'erreurs passées, font que Val-de-Reuil (cité contemporaine) et ses 15 000 habitants environ sont bien intégrés à l'agglomération Seine-Eure. Sans parler de sa démographie elle aussi gage de prospérité pour l'avenir.
Erc Rhomer, cinéaste
Dans l'exposition, on voit avec plaisir les films tournés par Eric Rohmer dans les années 70. On reconnait M. et Mme Lenoir, lui, principal du collège Alphonse Allais, se livrant à un jeu difficile puisqu'il s'agissait pour eux de « construire leur appartement » avec des cloisons mobiles susceptibles d'évoluer avec le temps. M. Lenoir, cadre de l'enseignement, devenu par la suite proviseur du Lycée Corneille de Rouen, conserve de cette époque pionnière, un souvenir précis et exaltant.
Le germe de ville et ses 1400 logements devaient être portés à 6500 logements programmés au 6e plan au titre de l'opération Vaudreuil : 5000 logements pour Val-de-Reuil et 1500 autres logements répartis dans l'ensemble de la zone du Vaudreuil. Léry, Le Vaudreuil, notamment, n'ont pas été les plus mal lotis si j'ose dire.
Dans le texte de présentation de l'Atelier de Montrouge on lit la phrase suivante : « Il y avait un esprit de rupture, bien sûr, avec l'académisme de l'enseignement des Beaux-Arts, mais surtout un esprit d'ouverture sur le monde de la ville, un esprit de rénovation des pratiques, loin de tout affairisme, un esprit d'humanisme…» A l'Atelier de Montrouge, le dessein prime sur le dessin. L'Atelier est devenu une machine à se poser des questions : leur marque de fabrique est une reformulation du programme.
Gérard Thurnauer
Gérard Thurnauer avait également beaucoup travaillé sur le schéma Basse-Seine. Il connaissait la région comme sa poche et l'axe séquanien comme porteur d'un grand avenir. Le choix de la boucle de Seine, par le général de Gaulle et Paul Delouvrier, pour y implanter une ville nouvelle, est du, en partie, à ce travail de prospective. Jean-Paul Lacaze, directeur de l'Etablissement public de la ville nouvelle du Vaudreuil et les nombreux experts de la mission d'études, ont poursuivi une œuvre que d'autres mènent à leur manière aujourd'hui, qu'il s'agisse de Jean-Michel Vilmotte, Pascal Victor où Dominique Jacob et Brendan Mac Farlane…ces derniers, semble-t-il, n'ont pas séduit un Sarkozy véritable béotien de l'architecture contemporaine, un mot qui fait peur, et l'ont rendu grossier. N'attendons pas de ce président de grands travaux ni de grandes perspectives. Pompidou et Mitterrand avaient des défauts. Ils n'avaient pas celui de la médiocrité. (Texte à suivre et à lire dans quelques minutes ou quelques heures)
Nos photos : M. et Mme Lenoir discutent devant la caméra d'Eric Rohmer. Panneau avec Jean-Paul Lacaze, Jean Prouvé, Jean-Eudes Roulier, qui ont beaucoup compté dans le destin des villes nouvelles.
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