« Fonctionnaire ! », l’insulte
suprême pour nombre de salariés, de cadres du privé et de chefs d’entreprises.
Derrière ce mot ils veulent qu’on entende « la garantie de l’emploi, la
progression à l’ancienneté, le laxisme au travail, les congés de maladie longs et
répétés ». Autour de ce mot circulent les rumeurs les plus folles, les clichés
les plus éculés. En annonçant aux fonctionnaires que le point d’indice
resterait gelé jusqu’en 2017 (sauf croissance explosive !) le gouvernement
donne du grain à moudre à tous ceux qui détestent, haïssent, exècrent les
enseignants (surtout eux) les hospitaliers, les agents communaux, les policiers
et gendarmes, les postiers, les cheminots, les gaziers, tous ceux qui
travaillent dans les services publics ou parapublics et qui n’ont qu’un
objectif : servir au mieux le public. Le gouvernement semble dire aux Français :
les fonctionnaires sont des privilégiés, ils doivent donc contribuer au
redressement plus que les autres. Voilà un raisonnement qui explique sans doute
une part des résultats catastrophiques des dernières élections municipales.
Quand les fonctionnaires se révoltent, la gauche trinque.
Dans le combat que j’ai mené
pour le retour en régie publique des services de l’eau, de l’assainissement,
des ordures ménagères, des transports de l’agglomération Seine-Eure, un
argument transparaissait jamais avoué, toujours tu : il faudra gérer du
personnel avec un statut public ! La belle affaire. La mairie de Paris, en
reprenant en régie directe son service de l’eau et de l’assainissement, a créé
des emplois, dégagé des marges pour investir, rénové des équipements à des coûts
bien inférieurs à ceux des délégataires privés. L’eau du robinet de Paris n’est
pas moins bonne que celle du robinet de Louviers. Le mètre cube d’eau assaini
coûte 3,01 euros à Paris quand il coûte près de 4 euros à Louviers !
Une enquête récente de la
confédération générale du logement a même prouvé que les frais dits fixes des
entreprises privées (abonnement, frais de siège du délégataire, entretien
courant, facturation) variaient de manière sensible selon les compagnies, les régions,
les villes faisant régner des disparités n’ayant rien à voir avec la réalité du
service rendu. Voilà pourquoi après analyse et comparaisons, la CGL propose la
création d’un grand service national et public de l’eau pour créer une certaine
justice entre les usagers devant un service indispensable à la vie courante et
au confort des familles. Ne disait-on pas, à une certaine époque, « qui tient l’eau
tient le pays » ?
Un raisonnement courant veut
que 20 à 30 % des fonctionnaires soient, soi-disant, inutiles ! Rien que
cela. Alors qu’on manque de maîtres dans certaines classes surchargées, que
tous les maires demandent des effectifs de police supplémentaires, que la
justice manque de magistrats et de greffiers, que les infirmiers des hôpitaux
connaissent des journées de fou, que les gardiens de prison sont agressés faute
d’effectifs etc. etc.
La fonction publique qu’elle
soit d’état, hospitalière, ou des collectivités territoriales est composée,
dans une immense majorité, de personnes responsables, accomplissant leurs tâches
avec dévouement et passion, conscientes de l’importance de leur rôle quels
que soient leur classement indiciaire ou leurs diplômes. Il est trop facile en
période de crise de blâmer ceux qui ont choisi de servir la collectivité et bénéficient
d’une certaine sécurité. Eu égard aux salaires et conditions de travail,
parfois, c’est bien le moins que l’on puisse leur offrir. La gauche ne nous
avait pas habitués à tant d’ingratitude.
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