3 avril 2013

Jérôme Cahuzac, la honte de la République !

Jérôme Cahuzac a avoué. Il avait bien un compte en Suisse et cela depuis une vingtaine d’années. Médiapart a dit vrai et je suis fier d’avoir été de ceux qui, dès le 5 décembre 2012, ont pris au sérieux les révélations du site dirigé par Edwy Plenel. Face aux agressions des politiques et à l’absence de solidarité des principaux médias de ce pays, Médiapart a tenu son cap, le cap de l’intransigeance avec les faits. Je suis heureux du dénouement, il conforte le sérieux et la crédibilité d’un média devenu adulte et indispensable dans le paysage médiatique français. Qu’il s’agisse de l’affaire Karachi, de l’affaire Bettencourt, de l’affaire Takiedine-Kaddafhi, de l’affaire Tapie-Lagarde, ou de l’affaire Cahuzac, le site Médiapart et ses journalistes ont été à l’origine de révélations utiles pour la bonne santé de l’information, d’une part, et le bon fonctionnement de la démocratie d’autre part. Sans une presse libre, indépendante des puissances d’argent et des pouvoirs, il n’y a pas de vraie démocratie. Edwy Plenel, pourtant, n’avait rien d’un justicier ou d’un triomphateur, hier, sur les chaînes de télévision. Il était un journaliste à la tête d’une équipe sans laquelle rien n’eût été possible.
Je suis également très triste. Qu’un homme de l’intelligence de Jérôme Cahuzac, qu’un député apprécié pour sa compétence, son expérience, trouve le moyen de mentir effrontément au Président de la République, au Premier ministre et à tous les députés, voilà qui ne manque pas de m’interpeller. Cahuzac, la honte de la République ! Que s’est-il donc passé dans la tête de ce ministre du budget chargé de lutter contre la fraude fiscale et de trouver des recettes nécessaires à la réduction des déficits pour qu’il tienne des propos indignes d’un élu responsable ? Que s’est-il donc passé dans la tête de ce politicien expérimenté lorsqu’il a menti à la représentation nationale ? Est-il l’arbre qui cache la forêt ? Défend-il d’autres intérêts que les siens propres ? L’enquête conduite par les deux juges d’instruction en charge de l’affaire devrait faire toute la lumière sur les coins d’ombre de ce mensonge aussi énorme qu’étonnant de la part d’un homme de gauche dont les valeurs devraient être l’honnêteté (intellectuelle aussi) la probité, la recherche de la vérité et de la justice. Après l’affaire DSK et avant l’affaire Guérini, le Parti socialiste n’avait nul besoin de ce coup de tonnerre. Cahuzac, connaissant la vérité, n’aurait pas dû penser qu’à lui-même. Membre d’un gouvernement, il a bafoué ce qu’il y a de plus précieux en politique, la confiance en la parole donnée.
La droite va tomber à bras raccourcis sur Cahuzac, le gouvernement et le président. Même si celui-ci a promptement réagi en évoquant une « impardonnable faute morale » il n’échappera pas aux interrogations sur ce qu’il savait ou pas et depuis quand. Personnellement, je pense que François Hollande a cru son ministre quand il lui jurait la main sur le cœur qu’il n’avait pas de compte en Suisse ou à l’étranger. Cela prouve, tout simplement, que le mensonge en politique est devenu une denrée courante et si Jérôme Cahuzac fait la Une des journaux aujourd’hui, ce n’est que justice de la part des médias, lesquels se sont montrés dédaigneux et hautains vis à vis de Médiapart. Le site vient de gagner ses lettres de noblesse, rien ne sera plus comme avant dans le monde de l’information en France.
Jérôme Cahuzac a été mis en examen pour blanchiment de fraude fiscale. Il sera donc traduit devant un tribunal correctionnel où il pourrait être condamné et, peut-être, déclaré inéligible pour quelques années. Peut-on dire pour autant que sa carrière politique est terminée ? On a vu tant d’aigrefins de droite et de gauche être blanchis par le suffrage universel…Ayrault invite Cahuzac à ne plus solliciter les suffrages des électeurs. Ces derniers seraient-ils assez fous pour confier du pouvoir à un homme si sûr de lui et de son impunité que ses actes risquent de faire sauter un gouvernement ?


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