29 octobre 2011

Depuis 30 ans, Sarkozy est dans l’opposition


Inspiré, Nicolas Sarkozy l’était visiblement lors de sa prestation télévisée du 27 octobre. Inspiré par Corneille et la célèbre phrase de l’empereur Auguste : « Je suis maître de moi comme de l’univers ; je le suis, je veux l’être ». Car c’est bien en Auguste que, ce soir là, Sarkozy nous apparut.
Maître de l’univers, il voulait l’être, il le fut. Ne venait-il pas, secondé par Angela Merkel, comme il nous l’annonça, de sauver l’euro, l’Europe et le monde ? Ne sera-t-il pas intronisé, comme il nous l’affirma, en juste récompense de ses rudes batailles, lors du G 20 qu’il présidera les 3 et 4 Novembre à Cannes ? Maître de lui-même, il voulait l’être, il le fut. 


Fini les « casses-toi pauv’con » ! Et pourtant la partie n’était pas gagnée d’avance, face aux questions que lui posait un duo, composé d’un faux méchant et d’un vrai servile, qui avait réussi à faire perdre leur calme à plus d’un téléspectateur. Oubliés les « bling-bling », la soirée au Fouquet’s, les séjours sur le yacht de Bolloré, le doublement de son salaire de Président, le luxueux avion présidentiel : le bureau derrière lequel Nicolas Sarkozy était assis ce soir là provenait, sans nul doute, de la plus proche brocante.
Pas encore candidat mais déjà en campagne
A l’en croire, Nicolas n’était pas en campagne puisqu’il ne serait pas (s’il l’était) candidat avant janvier ou février. Il était là uniquement pour rendre des comptes aux Français après le sommet de l’Euro. Mais quels comptes pouvaient-ils bien rendre sans avoir de mandat précis du Parlement français comme celui qu’Angela Merkel tenait du Bundestag ? De quoi pouvait-il bien rendre compte aux électeurs s’il n’avait d’autre mandat que celui qu’il tenait de lui-même et des grandes banques françaises ?
Un débat politique sur le rôle du Fonds européen de stabilité financière, sur celui de la BCE, sur la recapitalisation des banques, sur le montant de la dette grecque que les banques devaient effacer, faisait rage en Allemagne depuis des mois. L’absence de tout débat sur ce thème en France, a permis à Sarkozy de rester extrêmement évasif sur le contenu réel du plan adopté par le sommet de l’Euro et, au total, de ne pas rendre le moindre compte au peuple français, tout en affirmant le contraire. Le sommet de l’euro n’était plus qu’un prétexte pour vanter les mérites du candidat Sarkozy.
Un programme en pointillé
Avec des mots qui cherchaient à masquer ses réelles intentions, Nicolas Sarkozy a avancé quelques bribes de son futur programme électoral. Les plans de rigueur allaient continuer même s’il convenait de leur donner des noms plus doux ; l’âge légal de départ en retraite et le nombre d’annuités de cotisation allaient encore augmenter pour satisfaire les agences de notation ; les taux de la TVA augmenteraient, eux-aussi, car si Sarkozy disait s’opposer à une augmentation « généralisée » de la TVA, il s’était surtout empressé de ne pas se prononcer sur une augmentation des taux de TVA entre 5,5 % et 19,6 %.
Un déni de réalité
Sarkozy n’est pas président de la Ve République depuis 4 ans, la droite n’est pas au pouvoir depuis 2002, Sarkozy n’a jamais été ministre de l’Intérieur ou de l’Economie, des Finances et de l’Industrie de Chirac. Il ne porte aucune responsabilité dans la crise financière, économique, sociale et politique actuelle. La crise est, d’ailleurs, pour lui une figure à éclipse avec laquelle il a joué constamment lors de son intervention télévisée. La crise disparaissait quand son existence l’aurait amené à reconnaître que l’augmentation de la dette publique française entre 2008 et 2011 n’avait pas d’autre origine que le transfert des dettes privées (celles des banques en particulier) vers la dette publique pour tenter de sauver les banques et les actionnaires en faisant payer la facture de la crise au salariat.
Il préférait répéter inlassablement la même antienne : si la dette publique augmente, c’est parce que l’État vit « au dessus de ses moyens ». Ce qui n’expliquait en rien comment la dette publique avait fait un bond de 35 % en 4 ans. Il préférait oublier au passage que c’était justement l’État qui fixait le montant de ses propres moyens et qu’en baissant les impôts des riches et des sociétés, c’est la droite qui avait vidé les caisses publiques. Il préférait oublier qu’alors qu’il venait de proclamer que les « caisses étaient vides », la droite avait quand même réussi à trouver quelques centaines de milliards d’euros pour sauver les banques de la faillite, sans exiger d’elles la moindre contrepartie, préserver les profits grâce à la « prime à la casse » et autres plans d’aide à un patronat qui ne se gênait pas pour licencier à tour de bras.
La crise réapparaissait quand cela arrangeait Sarkozy et qu’il cherchait à l’utiliser pour tenter de se dédouaner de toute responsabilité dans le naufrage actuel : « Ce n’est pas moi, c’est la crise ! ». Comme si cette crise n’était pas celle de son monde, de son système, de ses amis du Fouquet’s, d’une économie bâtie sur un océan de dettes qu’il a encouragé, d’une bulle immobilière qu’il a largement contribuer à gonfler, d’une finance déréglementée qu’il n’a jamais essayé de réglementer même après la crise de 2007-2008 et ses promesses creuses de « moralisation du capitalisme ». Comme si cette crise n’était pas celle de la « rupture » vers un néolibéralisme encore plus dur dont se réclamait le candidat Sarkozy en 2007. Comme si cette crise n’était pas celle du Parti populaire européen (dont l’UMP est l’un des fleurons) qui dirige aujourd’hui deux gouvernements sur trois de l’Union européenne.
Si l’Union européenne est en crise, c’est la faute de Chirac qui a fait entrer la Grèce dans l’Union européenne en 2001. Si la France est en crise, c’est la faute de Mitterrand et de sa retraite à 60 ans, de Lionel Jospin et de ses 35 heures. Sarkozy lui n’y est pour rien : depuis 30 ans, il est dans l’opposition. 
Communiqué de Démocratie et socialisme

   http://www.democratie-socialisme.org 

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