« La
légitimité de la présence des migrants est incontestable. Les pays dont ils
proviennent - Afghanistan, Erythrée, Irak, Libye, Soudan, Syrie, notamment - en
témoignent. Ils fuient la guerre, la répression, la dictature et l’arbitraire à
la recherche d’une protection en Europe. Contrairement à ce qui est répété
inlassablement, y compris au sommet de l’Etat, il ne s’agit nullement d’une «
invasion ». Les conditions de survie indignes qui leur sont imposées en France
sont intolérables. Malgré la solidarité des associations locales et la
générosité des calaisiens, ils subissent l’abandon des pouvoirs publics qui
proposent, à la marge, des solutions insuffisantes et n’assument pas leur
responsabilité. Des moyens puissants doivent être déployés immédiatement pour
secourir ces réfugiés qui se sont tournés vers nous. Faut-il attendre les
premiers morts de froid dans les jungles de Calais pour déclencher enfin une
réelle prise de conscience ?
Une
nouvelle escalade dans l’aveuglement est en marche avec la construction d’un
mur et le déploiement d’un dispositif sécuritaire de grande envergure à Calais,
véritable appareil de guerre contre les migrants, entre la France et le
Royaume-Uni. Nous, migrants et organisations de la société civile qui
travaillons côte à côte depuis des années, refusons une telle dérive et demandons
à nos concitoyens de s’y opposer fermement et massivement.
Depuis
des décennies, les contrôles renforcés aux frontières, les dispositifs de
surveillance, d’intimidation et de contention, les mesures de déportation des
migrants ont totalement échoué, ont coûté très cher et ont surtout provoqué des
milliers de morts. Le mur en construction à Calais n’est qu’une nouvelle et
triste illustration de cette réponse sécuritaire. Est-ce cela que nous voulons
poursuivre, dans une fuite en avant inacceptable et irresponsable ?
En
refusant l’asile et l’accueil, c’est la liberté dont nous jouissons nous-mêmes
qui est menacée : nous construisons les murs de notre propre prison. De cela
nous ne voulons pas ! L’érection de fortifications à Calais doit cesser et des
discussions s’ouvrir sans attendre avec les autorités britanniques pour
recevoir les demandes d’asile qui s’adressent à elles (comme cela a été pratiqué
en 2002, à l’occasion de la fermeture du camp de Sangatte). Avec tous les Etats
européens, ou avant eux, la France doit revoir la totalité de sa législation et
de sa réglementation en matière d’asile et de migration (dénonciation du
règlement Dublin et suppression de Frontex). Elle doit le faire dans le strict
respect de l’article 13 de la Déclaration universelle des droits de l’Homme,
comme de la Convention de Genève. La France doit enfin réviser sa dangereuse et
illusoire conception « nationale » de la migration, totalement inadaptée à la
mondialisation des échanges humains et aux drames vécus aux portes de l’Europe.
La France doit contribuer, au sein de l’ONU, à promouvoir une nouvelle
gouvernance en matière de migration, respectueuse de la liberté de circulation,
des droits enfin reconnus et appliqués pour tous les migrants.
Le 18
décembre prochain, Journée Internationale des Migrants, nous, migrants et
organisations de la société civile engagées aux cotés des migrants, appelons à
une mobilisation d’ampleur, à Calais et partout en France,
► pour dénoncer l’indignité de l’accueil des migrants et exiger, conformément aux propositions des acteurs
associatifs, la mise en place d’un dispositif d’accueil réaliste dans le
Calaisis ; ► pour refuser la réponse sécuritaire et la
construction, en notre nom, du mur de la honte à Calais ; ► pour obtenir de nouvelles politiques migratoires au niveau national, européen et mondial, respectueuses des
droits et de la dignité des migrants. »
Appel signé, notamment, par la Ligue des droits de l'homme
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