Commençons par la claque. Et c'en est une belle ! La Gauche majoritaire au Sénat, je me demandais si je parviendrais à vivre assez vieux pour connaître ce séisme politique. Je finissais même par regretter d'avoir voté non au référendum proposé par le général de Gaulle en 1969, lui qui proposait de supprimer le sénat sous sa forme actuelle. En politique, il faut donc savoir se montrer patient et obstiné. Il faut également savoir profiter des failles et faiblesses de l'adversaire qui, cette année, n'en manquait pas.
Pour expliquer la victoire de la Gauche, les observateurs indiquent que le vote d'hier ne fait qu'enregistrer les diverses victoires obtenues lors des élections locales depuis 2003. Compte tenu du mode de scrutin, il est bien évident que plus on a de votants favorables à la Gauche, plus il lui est possible d'augmenter ses chances. Monsieur de la Palisse n'aurait rien dit d'autre. Tout de même, cette explication n'est pas suffisante pour expliquer les 26 ou 27 sièges gagnés, souvent dans des départements ruraux et au scrutin majoritaire.
Les réformes territoriales et fiscales de Sarkozy, passées à la hussarde « avec une brutalité de soudard » comme dirait Anne Mansouret, ont conduit nombre d'élus modérés à éprouver des hauts le cœur. J'ai commenté en long et en large la réforme aboutissant à la création des conseillers territoriaux pour en dénoncer les dangers et souligner le rejet massif des élus de gauche et de droite. Il s'agissait d'une manœuvre visant à priver les conseillers généraux et régionaux de certaines de leurs prérogatives et de leurs compétences. Sarkozy a cru que ces élus seraient bien obligés d'avaler le poison. Il en paie le prix.
Sarkozy est également victime d'un autre phénomène. Les Français à la suite de l'affaire dite de Karachi et des révélations de Pierre Péan, viennent d'apprendre que des porteurs de valises ont sans doute aidé à financer la campagne d'Edouard Balladur (1) tout comme ils ont aidé Chirac à une autre époque. Le fonctionnement du clan Sarkozy, avec les Hortefeux, Copé et consorts est jugé sévèrement par les citoyens ordinaires. Des élus, peut-être plus sensibles à ces scandales, ont voulu adresser un avertissement au président qui voulait « une République irréprochable », République finalement placée sous le signe des clans et des cliques. « Les copains et les coquins » disait d'eux Michel Poniatowski, grand connaisseur de l'Etat RPR devenu l'Etat UMP.
On comprend mieux, aujourd'hui, le désir de Borloo de s'émanciper. De sortir d'une nasse où il se sentait pris au piège. Je parie que les résultats des sénatoriales ne vont pas refroidir ses ardeurs. Borloo sera candidat à la présidence de la République !
Quant à la gauche, elle est allée unie à la bagarre. Le résultat est là : convaincant. Samedi prochain, lors de l'élection du président ou de la présidente du Sénat, cette gauche conquérante devra serrer les rangs et se serrer les coudes pour renvoyer le sénateur Larcher dans les Yvelines. Car la Gauche est Bel et bien majoritaire.
(1) Quand je pense que Roland Dumas a approuvé, contre l'avis des experts du conseil constitutionnel, les comptes d'Edouard Balladur ! On aimerait connaître le dessous des comptes.
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