Nous sommes déjà plus de 23 000 à avoir répondu à l’Appel au débat et pour une primaire des gauches et des écologistes.
Merci
à chacune et chacun d'entre-vous d'avoir rejoint notre volonté de ne
pas se résigner au fatalisme politique qui mine notre démocratie et
notre pays. Comme le disait ce matin Marie Desplechin sur France Inter :
« Depuis des années on va voter à reculons. Ca suffit ! Ce ne sont pas
de noms dont on a besoin à ce stade, mais de visions et d’idées ».
http://www.dailymotion.com/video/x3mcrdc_appel-pour-l-organisation-d-une-primaire-a-gauche-marie-desplechin-est-l-invitee-de-lea-salame_news
Mardi
matin déjà Thomas Piketty, invité par Jean-Jacques Bourdin, le disait
avec d’autres mots : « nous ne sommes plus en 1988 où pour tout débat le
slogan était un « Tonton laisse pas béton » qui attendait que le
Président en place se déclare à quelques mois de l'élection. Nous
voulons du débat, du choix, et de l'évaluation. La défiance politique
n'est pas une fatalité. »
http://www.bfmtv.com/mediaplayer/video/thomas-piketty-face-a-jean-jacques-bourdin-en-direct-733158.html.
Les
initiateurs de cet appel (Julia Cagé, Dany Cohn-Bendit, Mariette
Darrigrand, Marie Desplechin, Guillaume Duval, Romain Goupil, Yannick
Jadot, Hervé Le Bras, Dominique Méda, Thomas Piketty et Michel
Wieviorka) et des signataires ont tous exprimé avec force, depuis
dimanche soir, notre détermination à créer du débat, à travailler à des
pistes de réflexion et d’action commune pour les différentes
sensibilités de gauche et les écologistes, à oxygéner la politique, à
organiser un grand moment démocratique avec une belle primaire. Bref,
contre tous les conservatismes qui sont déjà à la manœuvre pour nous
expliquer que rien n’est possible, que rien ne doit changer, nous avons
expliqué ce qu’il y a dans le manifeste que vous avez signé. http://notreprimaire.fr/2016/01/10/manifeste-pour-la-primaire-des-gauches-et-des-ecologistes/. Vous pouvez retrouver les interventions médiatiques sur http://notreprimaire.fr. Vous verrez qu’elles sont riches, fraîches et diverses.
D'abord
un grand débat, ensuite un candidat ! Nous allons publier dans quelques
jours différents textes pour ouvrir des pistes à mettre en débat entre
nous et avec toute la société. Puis nous organiserons début février
quatre premières réunions thématiques à laquelle chacune et chacun
d'entre-vous sera invité, vous serez naturellement les premiers informés
des lieux et dates.
23 000 signatures c'est beaucoup, mais ce
n'est qu'un début. Nous devrons être beaucoup plus pour peser dans la
préparation de 2017 et sur les appareils politiques. Chacune et chacun
d'entre-nous doit agir pour être plus nombreux. Parlez de cette
initiative autour de vous, envoyez des mails, communiquez l'adresse de
la pétition à vos contacts et sur les réseaux sociaux https://www.change.org/p/mesdames-et-messieurs-les-responsables-des-partis-politiques-des-gauches-et-de-l-%C3%A9cologie-r%C3%A9-enchantons-le-d%C3%A9bat-politique-exigeons-une-primaire-des-gauches-et-des-%C3%A9cologistes. Si vous ne l'avez pas encore fait et êtes présents sur ces outils, abonnez vous au compte Twitter https://twitter.com/notreprimaire et « aimez » la page Facebook https://www.facebook.com/NotrePrimaire/
Ces
débats, cette primaire, ça dépend de nous. Faisons les vivre en les
faisant connaître, en y participant, en faisant signer l’Appel, en
débattant, en s’engueulant s’il le faut ! Ré-emparons de la politique !
15 janvier 2016
13 janvier 2016
Goodyear : Une justice forte avec les faibles et faible avec les forts
La condamnation à neuf mois
de prison ferme à l’encontre des quelques syndicalistes de l’ancienne usine
Goodyear est choquante. Cette décision prise par une justice certes indépendante,
mais après des réquisitions ahurissantes de la part du procureur représentant
l’Etat, l’est d’autant plus, qu’aucune violence physique n’a été exercée à
l’encontre des deux cadres séquestrés. L’existence d’une violence morale d’un
niveau somme toute supportable puisque les deux personnes en question ont
retiré leur plainte est sans doute réelle. Comme toujours, il faudra placer sur
les plateaux de la balance les insupportables effets des licenciements et des
pertes d’emplois par centaines (1) ainsi qu’un geste aussi désespéré
qu’éphémère.
Il ne fait pas de doute que
la création d’une situation précaire voire humiliante pour les salariés
résultant du mépris des responsables du groupe américain n’a pu qu’engendrer
une rancœur et une amertume facilement compréhensibles.
Revenons à la décision de
justice. Quels sont les buts avoués (ou non) des juges du tribunal
d’Amiens et du gouvernement actuel ? Créer un climat d’inquiétude et de
renoncement de la part des salariés menacés de perdre leur emploi ? Les
empêcher d’engager une lutte dégageant un rapport de forces favorable pour
sauver ce qui peut encore l’être ? Amener les syndicats à se coucher
devant l’oppression qu’entraînent des décisions industrielles mortifères souvent
motivées par l’appât du gain ?
J’avoue ne pas comprendre.
Cogner si fort contre une séquestration de 48 heures sans nuire aux conditions
de vie confortables des « victimes » de la part des « criminels » n’est pas un
bon signal. J’espère que les juges de la cour d’appel sauront apprécier à sa
juste mesure une attitude symbole de détresse et non d’agressivité. Il est
heureux qu’une ministre — Mme Boitard — et que des députés socialistes (en plus
de représentants de la gauche de la gauche) aient considéré comme outrancier le
jugement d’Amiens. Personne ne pourrait en effet comprendre la mansuétude
affichée à l’égard des délinquants en col blanc et le traitement brutal infligé
aux salariés.
(1) Depuis le licenciement
des salariés de Goodyear dont l’usine a été délocalisée en Russie, on a compté
suicides, divorces, dépressions en pagaille. Si ce n’est pas de la violence…
11 janvier 2016
Un appel à l'organisation d'une primaire à gauche avant la prochaine élection présidentielle
![]() |
Lors du dépouillement de la primaire à gauche en 2011 à Louviers. (photo JCH) |
Le journal Libération publie, aujourd'hui, un appel signé par de nombreux élus et militants de gauche de tous partis et de tous horizons. Cet appel est destiné à permettre l'organisation d'une primaire ouverte à gauche avant la prochaine élection présidentielle. Elle devrait éviter la multiplicité des candidatures à gauche et empêcher que cette dernière soit absente du second tour. Je soutiens cet appel et vous invite à le signer également. Je publie les extraits principaux de l'appel.
« Nous refusons la passivité face
à l’abstention, au vote Front national et à la droitisation
de la société. Nous refusons les renoncements face aux inégalités sociales, à
la dégradation environnementale, aux discriminations et à l’affaissement démocratique.
Nous refusons la paralysie de nos institutions.
«Nous n’acceptons pas que la menace
du FN, le risque terroriste et l’état d’urgence
permanent servent de prétexte pour refuser de débattre des défis extraordinaires
auxquels notre société est confrontée. Il n’y a pas de fatalité à l’impuissance
politique. La France est riche de son énergie vitale et de ses talents qui
aspirent à forger un avenir bienveillant. Nous voulons faire de la prochaine élection
présidentielle la conclusion d’un débat approfondi qui est passionnément
désiré et attendu dans le pays.
«Nous voulons du contenu, des idées,
des échanges exigeants. Nous appelons à une grande
primaire des gauches et des écologistes. Notre primaire est la condition sine
qua non pour qu’un candidat représente ces forces à l’élection présidentielle
en incarnant le projet positif dont la France a besoin pour sortir de l’impasse.
Elle est l’opportunité de refonder notre démocratie.
En signant cet appel, je m’engage à
voter lors de la primaire des gauches et des écologistes. Je participerai dans
la mesure du possible aux débats qui seront organisés pour la nourrir.
Signez et faites signer cet appel pour
réanimer le débat politique, pour se réapproprier l’élection présidentielle, pour
choisir notre candidat-e! »
10 janvier 2016
Des vœux sobres et dignes à la fédération de l'Eure du Parti socialiste
![]() |
Marc-Antoine Jamet s'adresse aux militants socialistes de l'Eure. (photo JCH) |
Annus horribilis. L’année
2015 restera pour la France une année horrible. Après les attentats du 7
janvier et du 13 novembre, l’insouciance a disparu de nos vies. Chacun et
chacune d’entre nous doivent, dorénavant, faire preuve de vigilance. Notre art
de vivre « sans haine et sans crainte » a été durablement entamé avec la mort de
tous ces innocents, journalistes, juifs, policiers, amateurs de musique, de
football ou heureux de partager un verre, morts pour ce qu’ils représentaient
aux yeux de fanatiques ivres de violence : la vie contre la mort.
Et la Gauche
là-dedans ? Le président de la République et le gouvernement ont réagi
avec sang-froid et une grande maîtrise des situations. Pourquoi cette attitude
à la fois courageuse et responsable est-elle devenue cette proposition de
déchéance de nationalité contraire à toutes nos valeurs fondamentales. Marc Antoine Jamet,
lors de ses vœux hier devant les militants de la fédération PS de l’Eure, s’en
est ému. Tout comme il a attiré l’attention de ses camarades sur la réforme
prévue du code du travail dans un sens inquiétant…
Mais avant d’évoquer 2016,
il fallait bien tirer le bilan de 2015. Dans une ambiance globale morose pour
le PS et la gauche, MAJ a mis en exergue la personnalité porteuse d’avenir de
Nicolas Mayer-Rossignol, lequel a démontré des qualités personnelles et
collectives exceptionnelles. Le président sortant du conseil régional de
Haute-Normandie (avec ses colistiers) n’a raté la plus haute marche du podium
que d’une courte tête. 4000 et quelques suffrages…lors d’un scrutin marqué par
la présence, notamment dans l’Eure, d’un Front national à un niveau bien trop
élevé. Mais aussi par une domination de la gauche dans 38 villes sur 55 à
l’échelle de la Normandie réunifiée. Un motif d’espoir pour les futures
municipales.
Pas d’élection dans l’année
à venir. L’occasion, donc, de reconstituer des forces dont la gauche aura bien
besoin en 2017. L’occasion de retrouver les valeurs essentielles d’un
engagement humaniste, solidaire, fraternel. L’occasion enfin d’exprimer un refus
de tous les projets de lois portant atteinte au patrimoine que nous ont légué
les philosophes des lumières et les grandes voix de la gauche : Jaurès,
Blum, Mendès France.
8 janvier 2016
François Mitterrand 1996-2016
![]() |
François Mitterrand en visite au château de Gaillon. (photo Jean-Charles Houel) |
Il y a vingt ans et un jour, le 8 janvier 1996, François
Mitterrand nous quittait. Le chat de Château-Chinon, artisan et maître de son
destin, avait, d’une certaine façon, choisi de mettre fin à son agonie. Loin du
Mont Beuvray où il avait rêvé construire son tombeau, l’éternité qu’il
attendait, enfin, s’ouvrait à lui. Au petit matin, Pierre Joxe, pour qui il ne
pouvait y avoir de secret, en l’annonçant à Laurent Fabius, me l’apprit aussi.
Jarnac, Chardonne, l’entre-deux-guerres, la Charente, celui qui reposait dans
la chambre sans apprêt de l’avenue Frédéric Le Play n’était en rien mon père.
Comme des millions de Français, j’ai pleuré sa disparition, orphelin d’un
symbole, orphelin d’un espoir. Il faut aujourd’hui rendre hommage à cet homme exceptionnel, l’hommage de
la mémoire, de la reconnaissance et de la fidélité. Mais pas seulement… Par-delà
le temps passé, au-dessus des clivages, celui qui fut, à partir du Congrès d’Epinay,
pendant neuf ans le premier secrétaire du Parti Socialiste avant d’être pour
deux mandats de sept ans le président de la République, le président de tous
les Français, le chef de l’Etat, nous laisse un exemple, une leçon et un
message.
L’exemple, c’est celui de la dignité. François Mitterrand
ne s’en est pas départi un instant quatorze ans durant. Dignité, majesté diront
ces critiques et ils ne manquaient pas, face aux obligations de sa charge et
aux épreuves du pouvoir. Faut-il le regretter ? Certainement pas et pour
une simple raison. On pouvait bien l’attaquer. On en avait rarement honte. En
tenant son rang, dans le monde et à l’Elysée, il tenait le nôtre. Pour avoir
une certaine idée de la France, il avait choisi d’avoir une certaine idée de
lui-même. Ce n’était pas sans grandeur, ni sans vérité. Dignité, courage
pensait ses amis et ils restent nombreux, tout au long du « combat honorable » qu’il a mené
contre la maladie en osant, lui qui aimait tant la vie, regarder la mort en
face. Qui peut, avant l’heure, revendiquer d’avoir ce cran ? Trois fois, à
l’Elysée, à Liévin, à Solferino, avec d’autres, je l’ai vu tomber, s’effondrer,
inerte, livide, cadavérique et, trois fois, je l’ai vu, de mes yeux vu, se
relever comme ressuscité par un miracle qui n’était pas « uniquement »
celui de la médecine. Son souffle, son instinct, sa survie, tout chez lui était
politique. Une tribune, un micro, un discours et Lazare revenait parmi nous. Le
verbe le refaisait chair.
La leçon, c’est celle de la ténacité. Combien de fois,
au cours d’un long parcours politique, François Mitterrand, brocardé, raillé,
vilipendé, calomnié, n’a-t-il pas été donné pour coulé, pour perdu, pour fini
sans jamais cesser d’être égal à lui-même dans l’épreuve et le succès, dans la
victoire et dans la défaite ? Il fut bassement insulté, injurié, humilié.
Pour autant, les reproches qui lui étaient adressés n’étaient pas tous infondés.
L’abeille n’avait pas toujours été architecte. Dans sa jeunesse française, sous
l’occupation allemande et, encore, par des amitiés inconsidérées, il commit
probablement de terribles fautes. Certaines, hors de leur époque, ne sont pas
explicables. C’est dire qu’elles pouvaient l’être sur le moment. Quelques unes,
demain comme hier, sont inacceptables. Elles resteront condamnables. Il était complexe. Ce n’est
pas une excuse. Il était ambigu. Ce n’est pas une qualité. Il revendiquait ce
clair-obscur. Etait-ce un art ? Etait-ce un jeu ? Il poussait, devant lui, comme chacun d’entre
nous, mais à son échelle, évidemment plus grande, plus massive, un « misérable petit tas de secrets ».
Il s’en défendait. Mais il le savait. Il avait des faiblesses. Mais il avait du
génie. Il tenait dans sa main ce qu’il appelait « le talisman de la chance ». Il sût faire face à tous ses
adversaires, surmonter tous les obstacles, remporter tous les défis. La France
Unie ! Après deux tentatives vaines, en étant élu le 10 mai 1981, il a vaincu
le sortilège, brisé l’implacable fatalité qui depuis un quart de siècle fermait
à la gauche les portes du pouvoir. Là encore, il commit des erreurs. La tâche était
rude. Les temps étaient durs. Une élection ne rend pas infaillible. Faisons la
part de la paille et du grain. Devant l’Histoire, décentralisation, abolition
de la peine de mort, libération des ondes, démocratie dans l’entreprise, construction
européenne, son œuvre demeurera.
Le message, c’est celui de l’espérance. D’où il est, où
qu’il soit, François Mitterrand nous rappelle, après l’avoir démontré, qu’il ne
faut jamais désespérer. Je continue de croire en les forces de son esprit. Il
suscitait l’aigreur, la jalousie, l’envie. Trop intelligent. Trop cultivé. Trop
subtil. Ses ennemis disaient « florentin ». Depuis longtemps il avait
transformé le sarcasme en compliment. Refusant de voir la haine que lui
portaient ceux qui, dans un raccourci méprisant, l’appelaient Mitt-rand, il s’aveuglait,
il se rassurait. Il avait une nature qui n’était pas aisé à saisir et à apprécier.
Voilà tout. « Après avoir été le
plus impopulaire des Français, disait-il, pourquoi n’en serais-je pas le mieux aimé ? ». Les
années écoulées vont lui rendre justice. Aujourd’hui, avec le temps qui passe, cent ans après sa
naissance, au-delà des tempêtes, du tumulte, des passions, un sondage nous
apprend que deux tiers de nos compatriotes gardent un bon souvenir des années
Mitterrand. Quel homme politique, quel homme d’Etat, quel homme tout court ne
se satisferait d’un tel résultat ? Le modeste hommage que nous lui devons entre
en résonance avec ce tribut posthume que rend le peuple français à un homme qui
aura finalement incarné dans la légende des siècles, après quelques autres et
pendant un long moment de notre histoire, la France, cette Nation qu’un des prédécesseurs
de François Mitterrand, sans doute le plus illustre, appelait « son cher et vieux pays ».
Marc-Antoine Jamet
Premier secrétaire fédéral
6 janvier 2016
Un état fort n'est pas forcément un état policier
Un état fort. C’est ainsi qu’Alain
Juppé nous décrit la France qu’il imagine une fois parvenu au pouvoir c’est-à-dire
à la présidence de la République. Porté par les flots déchainés des sondages,
Alain Juppé, maire de Bordeaux, ancien Premier ministre, ex-exilé au Canada,
blogueur devant l’éternel, sort, à petit feu, les livres qui valent projet présidentiel.
![]() |
Alain Juppé. |
Un état fort, donc. Et en
lisant attentivement les mesures qu’il compte faire adopter par un futur
parlement à ses bottes dans lesquelles il continue de se tenir droit, Alain
Juppé ne va pas rassurer les électeurs de gauche dont certains, aujourd’hui,
ont un faible pour lui. Si ses propositions économiques à venir sont du même
tonneau que ses motivations en matière de sécurité, de justice, de police et de
répression, les syndicats de salariés et quelques autres ont du mouron à se
faire.
Alain Juppé est malin. Il
est contre la déchéance de la nationalité qu’il juge inutile mais déclare qu’il
voterait la proposition Hollande s’il était député. Il propose également de
supprimer la circulaire actuelle sur les migrants, de cogner contre les parents
de délinquants en leur coupant les vivres, de supprimer les réductions de
peine, de revenir aux peines plancher…etc.etc. Alain Juppé est bien un homme de
droite. Il pense à droite et n’a donc que très peu de différences idéologiques
avec Sarkozy.
Il se trouve que les
propositions de modification de la loi pénale avancée par Manuel Valls collent
parfaitement avec l’état policier souhaité par la droite ; La mise sur la
touche du juge judiciaire au bénéfice des procureurs devrait soulever les
foules. Qu’on puisse pénétrer chez vous à deux heures du matin et fouiller
votre véhicule sans discernement c’est-à-dire sans contrôle d’un magistrat indépendant
du pouvoir ne laisse pas d’inquiéter. Il s’agit ni plus ni moins de maintenir l’état
d’urgence sous une forme plus policée mais pas moins policière. Je ne doute pas
que les associations de défense des droits de l’homme et des garanties
attendues d’une démocratie mature vont se mettre en branle pour stopper les dérives
en cours.
4 janvier 2016
L'IRFM, une indemnité parlementaire qui fait tache en période de disette

Tous ceux qui, parmi les élus
de la nation tel Charles de Courson, ont tenté de réformer son existence se sont heurtés à un mur. Non
pas le mur de l’argent mais le mur des habitudes et des situations privilégiées.
Autant on peut comprendre qu’un élu de la nation soit défrayé pour ses déplacements,
ses frais d’habillement, les dépenses d’équipement de sa permanence etc. autant le
rituel mensuel versé sur un compte à part ne trouve pas de justification
rationnelle s’il sert aux élus à arrondir leur fin de mois. Si les députés doivent,
en théorie, reverser le trop plein de leur indemnité, bien peu s’en
soucient. Il est loisible de comprendre leur faiblesse et la force de l’habitude
face à des sommes non négligeables et si peu régulées.
Je viens de signer une pétition
sur change.org proposant que l’argent versé au titre de l’IRFM soit utilisé
autrement. Par exemple pour alimenter les budgets de la Défense, de l’Intérieur
ou de la Justice, autant de dépenses bien utiles en ces temps de menace
terroriste. Je sais que certains crieront à la démagogie, au poujadisme, à l’antiparlementarisme…mais
comme de nombreux députés ont demandé, eux-mêmes, une révision des usages, je
pense qu’il ne faut pas se montrer plus royaliste que le roi et se rendre à l’évidence :
cette IRFM fait tache quand tant de Français ont du mal à joindre les deux
bouts.
2 janvier 2016
Les Français plébiscitent un renouvellement du personnel politique
Un sondage Odoxa sur le
jugement des Français à l’égard du monde politique est éloquent et
contradictoire. S’ils sont immensément favorables à un renouvellement de la vie
politique en France et donc à un renouvellement des hommes (puisque les femmes
sont quasi absentes du pouvoir) ils approuvent quand même majoritairement la
candidature d’Alain Juppé à la prochaine présidentielle contrairement à celles
de François Hollande et de Nicolas Sarkozy. Alain Juppé n’est donc pas un
perdreau de l’année et son âge n’en fait pas un petit jeune qui monte. Et
pourtant…
![]() |
Bruno Le Maire est nouveau mais tellement vieux dans sa tête. |
Les sondés sont également archi
favorables au non cumul des mandats que l’ex-UMP veut revoir (pour supprimer
les mesures limitatives applicables en 2017) et que certains politiciens de
droite mais de gauche aussi malheureusement cultivent avec abondance. Le non
cumul des mandats et la limitation du nombre de mandats dans le temps sont deux
mesures impératives puisque les défaites subies n’entraînent pas (contrairement
aux démocraties anglo-saxonnes ou nordiques, en Espagne aussi) dans notre beau
pays la disparition de la scène politique des perdants. Au contraire. Ils
s’accrochent à leur situation et leur notoriété lesquelles, il est vrai, présentent
bien des avantages.
Etrange démocratie que la démocratie
française. Elle épuise dans tous les sens du terme son personnel politique mais
limite l’accession aux responsabilités des femmes, des Français issus de l’immigration,
des classes sociales considérées comme non élitistes. Les textes destinés à améliorer
son fonctionnement sont systématiquement vidés de leur substance ou considérés
comme dangereux (cf. le vote des étrangers aux élections locales). Quelqu’un a
dit récemment : « le système est à bout de souffle. » Si les politiciens
ne prennent pas eux-mêmes conscience de la nécessaire précarité de leur état, il ne serait
pas étonnant que les citoyens soient obligés d’agir à leur place. Dès lors, le
pire du pire pourrait nous pendre au nez.
Le 23 janvier à Louviers Eric Roussel évoquera la vie de François Mitterrand
Je viens de terminer la
lecture de la biographie de François Mitterrand écrite par Eric Roussel. De ce
livre important et passionnant, on retiendra la personnalité exceptionnelle de l’ancien
président de la République élu en 1981 après son échec de 1974 face à Valéry
Giscard d’Estaing et celui de 1965 contre le général De Gaulle.
![]() |
Dernière page de couverture du livre d'Eric Roussel. |
Exceptionnelle est bien le
mot puisque François Mitterrand, situé à la droite de la droite pendant sa
jeunesse et finalement maréchaliste jusqu’à la mi 43, effectua ensuite et
progressivement plusieurs virages : d’authentique résistant de 1943 à 1944,
il devint 13 fois ministre sous la 4e République et évolua ensuite à
gauche pour prendre la tête du Parti socialiste, réduire l’influence du Parti
communiste, et enfin devenir le premier des Français, son but avoué dès sa plus
tendre enfance. Si l’on ajoute au portrait ses « affaires » (l'observatoire, le Rainbow warrior, les Irlandais de Vincennes etc.) ses pérégrinations sentimentales, on
comprend que François Mitterrand, comme l’a justement décrit Laurent Fabius,
est un personnage dont le trait principal est l’ambivalence.
Eric Roussel sera présent à
Louviers le 23 janvier prochain à 16 heures dans le cadre des conférences de la
Société d’études diverses. Les Lovériens et tous ceux que la vie politique
passionne ne manqueront pas d’assister à celle qu’il y donnera pour tenter de
comprendre la trajectoire d’un homme supérieurement intelligent, cultivé,
courageux, secret, machiavélien, parfois cynique, souvent distant mais toujours
fidèle en amitié quels que soient les hommes et leurs travers.
30 décembre 2015
Déchéance de la nationalité, un texte de Pierre Joxe sur le site Mediapart : « La gauche est bien vivante »
![]() |
Pierre Joxe |
Voici le texte de Pierre Joxe paru ce jour sur le site d'information Mediapart :
« Bonne année ! Bonne nouvelle ! La gauche est bien vivante !
On pensait bien –
malgré les mots crispés d’un oracle nerveux au regard sombre –, on savait
bien que non, la gauche ne pouvait pas mourir.
Mais aujourd’hui on
le voit bien : elle est en pleine santé la gauche, jeune, claire et
tonique, affirmant sa volonté avec confiance et s’adressant – comme il
convient – à l’armature démocratique de la République, aux représentants
du peuple, ceux qui sont les seuls, tous ensemble, à pouvoir faire la Loi,
expression de la volonté générale : les parlementaires.
Je viens de lire sur
internet l’appel
adopté par le Mouvement des Jeunes Socialistes.
Jugez vous-mêmes.
Allez les lire !
Je les cite ici :
« Les Jeunes Socialistes déplorent le choix fait
par le gouvernement…
« Permettre la déchéance de nationalité de
binationaux, même lorsqu’ils sont nés en France, crée une inégalité de droit
entre les citoyens. Cette mesure place les Français binationaux sous un régime
juridique différent de celui de tous les autres Français. Elle fige une différence
symbolique et de droit entre les citoyens français.
« Cette mesure ouvre une brèche dans le droit du
sol, qui fait partie de notre identité républicaine et qui est attaqué depuis
des décennies par l’extrême droite.
« Cette mesure est surtout inefficace car elle n’a
aucun caractère dissuasif. En effet, comment imaginer que des fanatiques
puissent renoncer à commettre des actes sanglants par peur de perdre leur
nationalité française alors qu’ils sont prêts à mourir ?
« Si cette mesure est autant contestée et avait été
écartée par le gouvernement à la suite des attentats de janvier, c’est sans
doute parce qu’elle heurte nos valeurs de justice, notre conception de la République,
et que son inefficacité est certaine.
« Les Jeunes Socialistes espèrent que la sagesse
parlementaire permettra d’écarter cette mesure et de concentrer l’action de l’Etat
sur ce qui permet de lutter efficacement contre le terrorisme, et de préserver
notre modèle démocratique et républicain pour l’égalité de tous les citoyens. »
Ces Jeunes
Socialistes ont bien raison de se tourner vers le Parlement, car en France la
Loi ne découle pas d’un discours, même proféré à Versailles.
Et la
Constitution ne peut être modifiée que par un référendum ou par une majorité
dite « qualifiée » de 3/5 des parlementaires – et non par la bouche
cousue d’un Conseil des ministres surpris.
Ces jeunes
socialistes ont bien raison de défendre des valeurs.
Non, ils
ne « s’égarent » pas –
comme le leur reproche ingénument un Premier Ministre feignant d’ignorer que,
bien au contraire, c’est en oubliant leurs valeurs que de vieux socialistes « égarés » ont jadis déconsidéré
la gauche, détruit pour dix ans leur Parti et abattu la IVe République.
Non
seulement ces Jeunes Socialistes ne s’égarent pas, mais ils donnent le bon
exemple, un exemple saisissant. Dans un texte vibrant d’indignation contenue,
ils montrent qu’ils ont parfaitement assimilé les aspects juridiques les plus
ardus de ce dossier complexe.
Ils ont décrypté
les réserves polies et les hésitations précautionneuses des quatre-vingts
honorables membres de l’Assemblée générale du Conseil d’Etat évoquant la
violation de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme.
Ils ont
bien compris la portée de la jurisprudence ancienne et récente du Conseil
constitutionnel, non seulement sur l’état d’urgence, mais surtout sur la déchéance
de nationalité.
Ils ont
bien lu le stupéfiant exposé des motifs du projet (n° 3381) de réforme
constitutionnelle.
Comme ce
texte officiel semble être passé inaperçu, j’en cite cet extrait éclairant,
facilement consultable sur le site de l’Assemblée :
« ... pour des personnes nées françaises, les
lois républicaines n’ont jamais retenu la possibilité d’une déchéance de
nationalité... Il en a d’abord été ainsi de la Loi du 7 avril 1915
puis avec la Loi du 10 août 1927 ainsi qu’avec le Décret-loi du 12 novembre 1938...
Ainsi toutes les caractéristiques dégagées par le Conseil constitutionnel dans
sa jurisprudence sont réunies pour qu’il existe un principe fondamental reconnu
par les lois de la République relatif à l’absence de possibilité de déchéance
de nationalité pour une personne née française même si elle possède une autre
nationalité » (Ass. Nat. : projet n° 3381, exposé des motifs).
Oui, c’est
bien « notre conception de la République »,
invoquée à juste titre par les Jeunes Socialistes, qui est en cause. Et qu’un
socialiste adulte, encore jeune, mais déjà très mûr, puisse proférer qu’« une partie de la gauche s’égare au
nom de grandes valeurs », cela
rappelle de vieux et mauvais souvenirs.
Heureusement
peut-être, entre précipitation et velléités, la longue liste des « Projets
de réformes constitutionnelles » exhibés puis enterrés depuis bientôt
trois ans peut laisser penser que l’explosif effet d’annonce d’aujourd’hui va
disparaître dans l’effet de souffle qu’il a provoqué...
On ne le
regrettera pas.
On
regrettera peut-être davantage les réformes annoncées, rédigées et mises au
congélateur depuis trois ans, comme en particulier :
– Le projet de loi
constitutionnelle relatif à la démocratie sociale, n° 813 : oublié.
– Le projet de loi
constitutionnelle relatif à la composition du Conseil constitutionnel, n°
814 : oublié.
– Le projet de loi
constitutionnelle portant réforme du Conseil supérieur de la magistrature,
n° 815 : oublié.
– Le projet de loi
constitutionnelle relatif à la responsabilité juridictionnelle du Président de
la République et des membres du Gouvernement, n° 816 : oublié.
Tous ces
projets déposés en 2013, consultables sur le site internet de l’Assemblée,
confiés au rapport du président de la commission des lois, Jean-Jacques Urvoas,
et tombés rapidement dans l’oubli... parfois sans qu’un rapport soit rédigé !
Souhaitons
cette douce euthanasie au projet n° 3381 et félicitons les Jeunes Socialistes. Quand
on les lit, on n’a pas peur : la gauche est bien vivante.
*
On le
sait, qu’un ou plusieurs personnages politiques parvenus au pouvoir changent d’avis,
renient leurs promesses ou oublient tel ou tel engagement pris publiquement, ce
n’est pas un phénomène rare.
On l’a déjà
constaté en France sous la Ve République ; mais aussi sous la
IVe – qui en est morte ; sous la IIIe et
déjà sous la IIe République – celle de Badinguet ;
sans oublier notre Première République – celle de la Terreur.
Ce qui est
singulier dans les circonstances présentes, c’est le contraste entre certaines
déclarations passées – mais récentes – et les décisions qui les contredisent.
Ce
contraste éclate entre les propos tenus en 2010 contre les propositions de
Sarkozy pour l’extension de la déchéance de nationalité. On pouvait lire à l’époque
dans Le Figaro :
« “Est-ce que c’est conforme à notre histoire,
nos traditions, notre Constitution, quand on sait que depuis 1889, la
nationalité française s’exerce par la naissance et s’acquiert par mariage au
bout de quelques années après un contrôle? (...) Pourquoi remettrait-on en
cause ces principes essentiels ? (...) C’est finalement attentatoire à
ce qu’est finalement la tradition républicaine et en aucune façon protecteur
pour les citoyens”, a jugé le député de Corrèze. Interrogé sur les réserves
exprimées par Bernard Kouchner, Hervé Morin ou Fadela Amara sur le virage sécuritaire
du chef de l’Etat, François Hollande a répondu que ces ministres avaient “leurs
responsabilités entre leurs mains” » (Le Figaro du 31 août 2010).
Décalage
singulier aujourd’hui entre l’effet juridique espéré d’une décision controversée
et l’effet politique instantané : soudain, la gauche anesthésiée se réveille.
Tous mes vœux. »
Pierre
Joxe
Avocat au Barreau de
Paris
Membre honoraire du Parlement
Membre honoraire du Conseil constitutionnel
Premier président honoraire de la Cour des comptes
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Premier président honoraire de la Cour des comptes
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