Je n'irai pas manifester dimanche à Paris. J'irai manifester le 27 janvier en faveur de la loi sur le mariage pour tous. Ce dimanche 13 janvier, l'UMP, le Front national, les catholiques intégristes et nombre de catholiques tout court seront dans la rue. Il ne faut surtout pas leur dénier ce droit. La démocratie et la liberté de conscience ainsi que le droit d'exprimer son opinion sont des biens trop précieux pour qu'ils soient minorés ou critiqués. L'Église catholique, les responsables nationaux juifs et musulmans — tous adeptes de religions monothéistes — sont contre la loi, c'est leur droit, ils en usent. Que des politiques flairent le bon coup pour s'opposer au gouvernement, on ne peut que le constater et se dire que l'opposition est un travail difficile, un travail pas toujours ragoûtant. Jean-François Copé saute sur une opportunité. Pourtant, lui le chef contesté de l'opposition de droite devra être un manifestant incontestable. Il ne devra prononcer ni propos homophobes ou ciblés genre « pain au chocolat le jour du ramadan. »
En fait, qui sera le gagnant dimanche prochain si un million de manifestants sont dans la rue ? Jean-François Copé ou Mgr Vingt-Trois ? L'UMP ou l'Église catholique. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, plus les manifestants seront nombreux ce 13 janvier, plus les députés de gauche auront envie d'approuver la loi. Plus les opposants seront nombreux à défiler, dimanche prochain, plus la mobilisation du 27 sera efficace.
Il ne s'agit pas de renouveler 1984 et le grand défilé de Versailles à Paris pour défendre l'école dite libre. Ah, ces Versaillais… Les conditions ne sont plus les mêmes. « Le Monde » d'aujourd'hui insiste sur un point, fondamental : il ne s'agit pas de supprimer des droits mais d'en octroyer de nouveaux. Il ne s'agit pas de stigmatiser ou de marginaliser, mais d'appliquer un principe d'égalité. La promesse de François Hollande d'autoriser le mariage pour tous a même failli être une promesse du candidat Sarkozy. Nombre de ses conseillers l'avaient invité à inscrire cette dernière dans le programme du candidat UMP. Mais Patrick Buisson veillait au grain et Sarkozy a manqué de courage et d'audace.
La manifestation de dimanche prochain sera un succès, n'en doutons pas, quel que soit le nombre de participants. Des trains spéciaux, des cars spéciaux, ont été commandés. Les sites internet de droite et cathos appellent les Français issus de tous les horizons à descendre pour battre le pavé. On peut lire sur certains d'entre eux : « gauche, droite, hétéros, homos, tous dans la rue dimanche pour défendre la famille. » mais de quelle famille parle-t-on ? Des familles recomposées à droite comme à gauche (1) des couples divorcés, à droite comme à gauche, des homosexuels de droite comme de gauche, des enfants adoptés par des familles de droite comme de gauche. La famille est un concept trop vaste et trop respectable pour en laisser l'exclusivité à la droite catholique et au mouvement extrémiste Civitas présent également dans la rue (2). Non, décidément non, je n'irai pas manifester dimanche à Paris.
(1) Les hommes politiques de droite aussi connaissent l'échec la rupture.
(2) Les militants de Civitas sont violents et, en majorité, homophobes.
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