12 novembre 2020

Pourquoi le vote par correspondance n'est pas la panacée

Un certain nombre d’élus, du MODEM notamment, proposent de rétablir le vote par correspondance. Ce système a existé dans des temps pas si lointains mais le législateur l’a supprimé pour n’autoriser que le vote par procuration ou en personne. Pour connaître assez bien l’histoire politique de Louviers, je souhaite rappeler que le Comité d’Action de gauche, dans les années soixante-dix est parvenu à obtenir l’annulation d’élections municipales suite à des manœuvres frauduleuses de la part de certains élus de la liste Rémy Montagne relatives au vote par correspondance.

 

De quelles manœuvres s’agissait-il ? Avec mon ami Claude Dumer, nous avions remarqué que des votes par correspondance émanaient de lieux collectifs et qu’ils avaient été enregistrés groupés à la Poste. Enquête faite, il était apparu que des personnes « dévouées » avaient  réussi à obtenir le vote par correspondance d’hommes et de femmes âgées dont le discernement n’était plus évident. Autrement dit, on avait utilisé des électeurs et électrices qui ignoraient totalement que des élections avaient lieu. Et comme leur état de santé ne permettait pas un choix rationnel, les juges administratifs, face aux preuves rassemblées, avaient annulé l’élection. Il faut dire que l'écart séparant les candidats élus et non élus n'était pas très important.

 

Le vote par correspondance, dans la grande majorité des cas, pourrait être utile mais il ne permet pas une régularité absolue tandis que le vote par procuration — s’il n’est pas infaillible et l’élection municipale de Marseille l’a démontré en juin dernier — oblige un officier de police judiciaire à contrôler que la personne désirant voter s’adresse en toute connaissance de cause à un(e) représentant(e) dûment choisi(e). L’expérience prouve donc que Gérald Darmanin, le ministre de l’Intérieur, a raison de refuser de rétablir le vote par correspondance pour éviter les tricheries. Le vote par Internet, une voie à explorer compte tenu des progrès techniques, pose d’autres problèmes puisque tous les Français et toutes les Françaises ne possèdent pas un ordinateur…

8 novembre 2020

Trump est devenu un fait alternatif : il a perdu mais assure qu'il est vainqueur

Un grand ouf de soulagement. A compter du 21 janvier 2021, on  ne verra plus Donald Trump fanfaronner devant les networks. On ne l’entendra plus affirmer qu’il attrapait les femmes par leur « pussy ». On essaiera d’oublier qu’en 2016, aidé par la Russie et ses hackers, soutenu par la frange la plus raciste, la plus homophobe, la plus sexiste de cette grande nation que sont les Etats-Unis, les électeurs et électrices des 50 états ont élu un psychopathe dangereux pour son pays et un grand nombre d’autres. Sa façon de traiter la crise sanitaire en minimisant le COVID, ses morts et ses malades, ou ses affirmations sur le refroidissement à venir lors des incendies de Californie, le disqualifient totalement comme chef d’état. Il est ignorant comme sont ignorantes les sectes évangéliques créationnistes qui le soutiennent de manière fanatique. Non le monde n’a pas été créé il y a 8000 ans !

 

On ne le verra plus taper dans la main de Kim Jung Un, le président de la Corée du Nord, considéré comme un état terroriste et dangereux pour le monde entier et qui le demeure malgré les images de Trump et Kim faisant la risette. Les missiles coréens sont maintenant capables d’atteindre les Etats-Unis. Et ne parlons pas du conflit israélo-palestinien : Trump et Netanyaou ont foulé aux pieds toutes les résolutions de l’ONU ! En baisant les babouches des pétromonarchies il s’est discrédité. Il en sera de même terminé avec les insultes et des jurons à l’égard des journalistes du moins ceux et celles qui n’ont jamais accepté ses rodomontades permanentes ou ses crises d’enfant pourri gâté. D’ailleurs même Fox News, la chaîne favorite de Trump a franchi le Rubicon en annonçant la victoire de Joe Biden quelques minutes après les autres. Robert Murdoch est un patron de presse avisé. La directrice de ses publications demande aujourd’hui à Trump de ne pas dilapider l’héritage !

 

La nièce de Trump, qui le connaît bien, affirme qu’en 2024 il ne pourra pas se représenter à la présidence pour une raison simple : « Il sera en prison. » Je ne sais si cette prévision se réalisera. Il reste que le procureur de New York, Cyrus Vance, l’attendra de pied ferme le 22 janvier pour régler un tas de dossiers notamment fiscaux sans parler de ces plaintes pour agressions sexuelles ou même viol. Trump a utilisé tous les moyens de l’Etat (une enquête est ouverte) mélangeant sa campagne de candidat et sa fonction de président au mépris de tous les règlements. Comme il a utilisé tous les moyens de l’Etat (dont Air Force One) pour se rendre dans ses golfs où il triche honteusement…

 

Mais soyons positif. Plus que la victoire populaire de Joe Biden (avec un écart de cinq millions de voix au moins) je retiens surtout celle de sa vice-présidente, Kamala Harris. Cette femme d’origine jamaïcaine et indienne, ancienne procureur de Californie, dorénavant ancienne sénatrice, a beaucoup apporté à Joe Biden. Elle est considérée comme celle qui pourrait lui succéder. Elle aura quatre années pour continuer d’engranger expérience et meilleure connaissance du fonctionnement gouvernemental. Elle aurait, si les deux sièges de sénateurs de Géorgie reviennent aux Démocrates en janvier prochain (1) une voix prépondérante dans les principales décisions budgétaires de Joe Biden puisque Républicains et Démocrates seraient à égalité. D’ailleurs la campagne pour ces deux sièges sera ouverte dès demain ! Son entrée dans la Maison blanche illustre magnifiquement la promotion des femmes et des femmes de couleur notamment démontrant s’il en était encore besoin après la victoire de Barack Obama en 2008, que les Etats-Unis sont un pays plus ouvert et plus tolérant que l’épisode Trump a masqué.

 

Le trumpisme continuera pourtant de faire des ravages car les comportements machistes, les allures dominatrices, le langage simpliste sont des ingrédients fort répandus sur toute la planète. Les Erdogan, les Bolsonaro, les Orban…les Le Pen en France (une délégation du FN-RN était aux USA pour suivre la campagne) ne vont pas disparaître du jour au lendemain. La brutalité et l’arrogance de Trump sont des défauts partagés par les populistes les plus ringards. Joe Biden a du pain sur la planche mais la levée des jeunes, des afro-américains, des latinos, qui avaient boudé Hillary Clinton, devrait lui assurer une marche conquérante. 

 

(1) en Géorgie, le sénateur vainqueur doit avoir la majorité absolue. Les deux sénateurs soumis à renouvellement n'ont pas obtenu 50 % des suffrages plus un.

6 novembre 2020

« Les cons ça ose tout c’est même à ça qu’on les reconnaît. » Michel Audiard

 « J'ai divisé la société en deux catégories : mes amis ou mes cons à moi et les cons des autres que je ne supporte pas. Les cons ça ose tout c’est même à ça qu’on les reconnaît. » Plutôt que de traiter Donald Trump de « tortue obèse qui se débat carapace renversée face au soleil » (comme l’a déclaré un journaliste d’une chaine d’info aux Etats-Unis) je préfère la férocité et l’humour d’un Michel Audiard…dans  « les Tontons flingueurs. »

Car enfin, voir  et entendre un président des Etats-Unis, la plus grande puissance mondiale, financière, militaire, économique (polluante aussi après la Chine) qui ment, ment encore, ment toujours, dans une conférence de presse totalement surréaliste ne manque pas de surprendre. Au point que les directions de plusieurs chaines de télévision ont décidé, cette nuit,  de couper le son et l’image alors que Trump tenait le micro pour demander qu’on arrête le dépouillement dans plusieurs états tels que la Géorgie ou la Pennsylvanie deux états qu’il va vraisemblablement perdre dans les heures qui viennent.

Il s’est trouvé près de 70 millions d’Américains (Joe Biden en a quatre à cinq millions de plus quand même) pour donner leur voix à cet énergumène, bateleur de télé redoutable, qui a malmené sa fonction pendant quatre ans, nui aux institutions de ce grand pays, fait preuve d’une ignorance crasse à maintes reprises et qui a bien failli conserver son siège de président comme dans une mauvaise série qu’affectionnent tant les amateurs de coups tordus et de bras cassés. Mais il arrive que les voyous perdent dans la vraie vie et pas seulement dans les téléfilms. Trump l’animateur de  «the apprentice » s’est fait connaître des Américains et du monde entier pour sa fameuse phrase « you’re fired » (1) Il se trouve — si les résultats à venir se confirment — que Joe Biden « l’endormi » pourra lui balancer à la première occasion « Donald, tu es viré ». Le 20 janvier, quand Joe Biden jurera sur la Bible (la laïcité n’existe pas aux USA) il pourra regarder Trump (s’il est là) dans les yeux et sourire au destin.

Marine Le Pen qui soutenait Donald Trump a perdu, elle aussi, une belle occasion de se taire. La victoire annoncée de Joe Biden va porter un coup d’arrêt à tous les dictateurs, les tenants des thèses dites « illibérales » ces supporteurs des vérités alternatives et des phrases toutes faites. Finalement, l’élection américaine, en penchant du bon côté, nous donne une leçon de démocratie même si leur système (très ancien) nous paraît bien compliqué et surtout très bizarre, nous qui sommes habitués à « un homme ou femme, une voix. »

(1) « Vous êtes viré »

3 novembre 2020

Report de conférences à la SED

La SED (Sociétés d'études diverses de Louviers) avait prévu ce mois-ci deux conférences. Le samedi 14 novembre, à 16 heures, elle devait accueillir Gérard Gengembre, professeur émérite à l’Université de Caen, pour aborder un aspect de l’œuvre de Maurice Leblanc et de Georges Simenon : « La Normandie d’Arsène Lupin et de Maigret ». D’autre part, le jeudi 19 novembre, à 18 heures, l’Université populaire avait reprogrammé la conférence de Claude Cornu, initialement prévue le 19 mars et annulée en raison du confinement. Il devait évoquer la personnalité et l’œuvre de la première épouse de Pierre Mendès France, qui se consacrait avec talent à la peinture : « Lily Mendès France, peintre méconnue ». Le reconfinement en vigueur jusqu’au 1er décembre oblige à reporter en 2021 ces deux manifestations. La SED espére toutefois qu’une amélioration de la situation sanitaire permettra dès le mois prochain le retour à une vie normale. Si tel est le cas, elle pourrait maintenir, le samedi 12 décembre, la conférence d’Éric Roussel, historien et membre de l’Institut : « Printemps 1940 : de Gaulle entre dans l’Histoire ». Nous ne manquerons pas de vous en informer le moment venu.

2 novembre 2020

Le fonds d'archives consacré à la démocratie participative consultable depuis aujourd'hui

Les Lovériens apprendront sans surprise que, depuis aujourd’hui, mon fonds d’archives donné à la ville de Louviers en 2018 est accessible sur Internet grâce aux liens indiqués en bas de page. Ce fonds a été constitué à la fois dans le cadre de mon travail de journaliste à La Dépêche et de mon engagement militant auprès du Dr Ernest Martin, d’abord et Henri Fromentin ensuite, deux hommes exceptionnels aux qualités très différentes mais tellement complémentaires. Ce fonds comprend également divers articles de presse et éléments documentaires consacrés à Pierre Mendès France, un homme que j’ai toujours admiré pour son courage politique, son éthique et la haute qualité de ses idées et propositions. 

 

Je dois rendre hommage, tout d’abord, au remarquable travail de Vanina Gasly, archiviste en chef du pôle archives de l’agglomération qui, pendant plusieurs mois, a pris connaissance des documents, les a classés, répertoriés pour que leur consultation publique soit possible dans les meilleures conditions. J’imagine qu’elle a été assistée par ses collaborateurs(trices) à qui je manifeste une reconnaissance sincère.

 

Je dois, également, profiter de l’occasion pour remercier Hélène Hatzfeld (1). Cette belle personne est à l’origine de ce don. Amenée à consulter des documents épars pour l’écriture de son livre (en plus des rencontres avec des témoins encore vivants), elle m’a encouragé à fouiller dans mon grenier pour redonner vie à des délibérations, jugements, articles de presse, affiches, journaux militants ou journaux d’informations générales, évoquant « l’aventure » lovérienne et son expérience de démocratie directe et participative pour la période 1965-1983…tantôt au pouvoir, tantôt dans l'opposition.


 

Le pôle archives de l’agglomération Seine-Eure met donc, dès maintenant, à disposition des chercheurs, des historiens, des citoyens, un fonds qui eut pu disparaître sans la vigilance d’observateurs avertis. Je souhaite, enfin, que toutes les personnes disposant de documents patiemment collectés et conservés s’interrogent sur leur devenir. Le pôle archives se tient à leur disposition pour évoquer avec elles la possibilité d’écrire des histoires qui, souvent, font la grande Histoire.

 

-          Lien direct vers l’inventaire : https://www.agglo-seine-eure.fr/wp-content/uploads/2020/11/AggloSeineEure_Archives_Inventaire_JChouel_5S.pdf

-          Lien vers la page où sont proposés tous les inventaires du Pôle archives : https://www.agglo-seine-eure.fr/pole-archives%e2%80%af/moyen-age-jours-gouts/ (descendre dans la page jusqu’à « archives privées »

 

(1) Hélène Hatzfeld, « La politique à la ville, inventions citoyennes à Louviers » (1965-1983) Presses universitaires de Rennes avec le soutien de l'Institut Mendès France et de la Fondation Jean Jaurès.

 

Deux instituteurs de l'école laïque et républicaine ont forgé mon éducation intellectuelle

Ce matin, tous les élèves des écoles, collèges et lycées de France ont respecté une minute de silence en mémoire de Samuel Paty, ce professeur d’histoire et géographie décapité par un islamiste radical Tchetchène domicilié à Evreux. Jean Castex, le Premier ministre et Jean-Michel Blanquer, ministre de l’Education nationale, étaient présents dans le collège de Conflans-Sainte-Honorine où M. Paty enseignait. Ce fut aussi l’occasion d’écouter la lecture d’un texte écrit par Jean Jaurès adressé à la jeunesse française dans le but de promouvoir un enseignement des fondamentaux et une éducation morale et civique. « Faire nation » pourrait résumer ce beau texte.

 

Serge Bove

Cette journée est pour moi l’occasion de saluer deux instituteurs aujourd’hui disparus qui ont marqué ma jeunesse à l’école Jules Ferry de Louviers. Je veux parler de Jean Fermanel et Serge Bove. L’un et l’autre exerçaient leur métier avec passion. L’un et l’autre veillaient à nous ouvrir au monde. On apprenait par cœur des poèmes, on écoutait Pierre et le loup, on assistait à des séances de cinéma dans la salle des colonnes de la cour de la mairie, sans oublier les dictées, les exercices de calcul, les commentaires de textes savamment corrigés et souvent préparés à la ronéo. Ils étaient savants, c’est un fait, mais surtout, ils étaient heureux de partager leur savoir et de forger des têtes bien faites plutôt que bien pleines.

Ces deux maîtres de l’école laïque et républicaine m’ont donné toutes les bases nécessaires à une culture générale indispensable dans le métier que je souhaitais exercer un jour : journaliste. Bien sûr, dans les années 1953-1957, Internet n’existait pas. La télévision n’avait pas encore connu le boum des années soixante et soixante-dix. Les réseaux sociaux n’étaient que le réseau de mes copains et de mes amies du quartier dit des Amoureux où d’autres apprentissages se développaient : courir les bois, chercher des vipères, pêcher des grenouilles, cueillir du muguet, se cacher dans les rhododendrons, manger des pommes pas mures. Le bois de Saint-Lubin, la porte au père, la mare même, nous étaient aussi familiers que les jardins de notre domicile.

Jamais, ô grand jamais, on n’aurait pu imaginer qu’un enseignant de cette école républicaine méritocratique enfant des Lumières pourrait mourir un jour sous les coups d’un ignorant fanatisé. Les temps changent, donc, mais le rôle des enseignant(e)s est toujours aussi fondamental. Apprendre à lire, à calculer, à connaître les mots, à faire des phrases…bien évidemment permet de classer ses pensées et de maîtriser les concepts abstraits. Mais aussi de forger un caractère, une personnalité pour vous accompagner durant toute la vie. Je dis encore merci à ces deux maîtres de ma jeunesse.

28 octobre 2020

Louviers : le groupe « Unis » saisit la CADA pour avoir accès aux études réalisées sur l'avenir du Manoir de Bigards

Aux 160 signataires de la pétition pour conserver le Manoir de Bigards dans le domaine public, le maire oppose 19 000 Lovériens qui ne l’ont pas signée. Dans ces Lovériens, on compte évidemment les nourrissons, les jeunes enfants et tous ceux et toutes celles qui ignorent tout du sujet même si certain(e)s d'entre eux ont entendu parler de la médiation de Stéphane Bern particulièrement sensible à tout ce qui touche le patrimoine.

 

En toute modestie, je pense que le maire a tort de balayer d’un revers de manche la demande de consultation par Philippe Brun et le groupe municipal « Unis » des études réalisées et financées sur fonds publics pour déterminer le devenir du Manoir de Bigards. Pourquoi tant de rétention ? Pourquoi tant de mystère puisque tôt ou tard, la municipalité devra solliciter l’avis du conseil municipal et, ainsi, rendre publiques lesdites études ? Gagner du temps ? Ne pas donner satisfaction à l’opposition ? Ou encore hésiter devant le choix à faire ? J’ignore quelle est la véritable raison qui oblige Philippe Brun et ses amis à saisir la CADA (la Commission d’accès aux documents administratifs) laquelle aura à satisfaire (ou non) la demande formulée.

 

Cette affaire autour du Manoir de Bigards est édifiante. Elle éclaire d’un jour neuf le dialogue  — ou l’absence de dialogue — entre des hommes et des femmes qu’on doit croire de bonne volonté et appelés à se supporter pendant six ans. J’ai indiqué au maire de Louviers que le futur sera immanquablement ouvert à des sujets polémiques et qu’il ne devra pas surréagir avec des anathèmes symboles d’un vieux monde qu’il honnit tant. Il faut des minorités agissantes pour empêcher les majorités de s’endormir. Cela n’empêche nullement de respecter les choix des uns ou des autres même en les contestant.

 

23 octobre 2020

Un Parisien faisant la leçon à un Lovérien, on aura tout vu !

Dans un article du journal « La Dépêche » titré « Ce sont des mensonges » de ce vendredi 23 octobre, je lis la phrase suivante mettant en cause Philippe Brun, conseiller municipal d’opposition, sous la dictée de François-Xavier Priollaud, maire de Louviers « …il fait signer des gens qui ne sont pas de Louviers et d’anciens élus de Louviers qui n’ont jamais rien fait pour ce lieu (NDLR : le Manoir de Bigards) c’est à peu près les gens qui sont dans notre opposition, dont beaucoup ne sont pas de Louviers comme…M. Charmot, Mme Sanchez, M. Houel ou M. Taconet…On les connaît ces gens-là…»

J’ignore si les personnes qu’il cite habitent ou non à Louviers. Je n’accepte pas le ton méprisant utilisé par le maire à mon égard (1). Si M. Priollaud s’était mieux renseigné il saurait que j’ai toujours habité à Louviers et que j’y réside encore. Il saurait que j'y ai suivi une grande partie de ma scolarité et participé à la vie de maintes associations sportives, culturelles ou politiques. J’accepte d’autant moins le ton utilisé par le maire que M. Priollaud — à ma connaissance — a surtout découvert Louviers le jour où il a eu des ambitions électorales et s’est présenté aux élections législatives contre François Loncle qui l’avait battu à plates coutures. M. Priollaud avait d’ailleurs conduit une campagne dont la violence des mots en avait étonné plus d’un, même à droite. Il était alors ce qu’on appelle un parachuté. M. Priollaud a eu raison d’insister puisqu’il a été élu en 2014 à la mairie de Louviers alors même que sa résidence habituelle est parisienne. Je lui reconnais donc le mérite d’avoir adopté notre bonne ville mais cela n’en fait pas pour autant un homme du cru. Il reste un horsain si bien décrit par l’abbé Alexandre dans un livre du même nom. Un Parisien faisant la leçon à un Lovérien, on aura tout vu !

(1) Certains élus de la liste Priollaud, et non des moindres, n'habitent pas à Louviers.Ils n'en méritent pas moins toute notre considération.

La sagesse exigerait un report des élections cantonales et régionales

Le premier tour des élections municipales a été pour beaucoup, un cauchemar. Le samedi soir qui précédait l’élection, le Premier ministre, Edouard Philippe, annonçait au pays la mise en place d’un plan destiné à restreindre les déplacements des Français à compter du 17 mars : c’était le confinement. Mais le dimanche 15 mars, jour de vote, bien des électeurs et électrices ont choisi de s’abstenir pressentant un danger de contamination que, malheureusement, les faits allaient confirmer. Jamais élection municipale n’avait connu un si faible taux de participants. D’ailleurs, le second tour, pour les communes où il devait avoir lieu, fut reporté à des jours meilleurs.

Se pose, aujourd’hui, le problème des élections cantonales et régionales de mars 2021. Le gouvernement vient de nommer Jean-Louis Debré à la tête d’une autorité indépendante chargée de faire des propositions au gouvernement avec ce choix cornélien de tenir l’élection aux dates prévues ou de les reporter…à un moment jugé propice. Propice voulant dire que le coronavirus aura été vaincu ou tout au moins jugulé.

Choisir une date d’élection c’est une chose. Organiser une campagne électorale digne de ce nom, c’en est une autre. Lors du premier tour des municipales, la campagne s’était déroulée à peu près convenablement. Réunions publiques et conférences de presse avaient permis de connaître les listes candidates et leur chef de file. Ainsi, pour les cantonales et les régionales, tous les partis et mouvements responsables s’accordent pour souhaiter qu’une campagne soit réellement démocratique et pour l’organiser suffisamment tôt en amont. Mais l’épidémie, telle qu’elle se présente aujourd’hui, ne sera pas vaincue ni même maîtrisée en janvier et en février 2021. Le risque d’une abstention massive est donc grand et le gouvernement a raison de chercher une solution de rechange. Il n’est pas dans mon propos d’imaginer si ces élections doivent se dérouler avant ou après la présidentielle.

Il me parait, en tout état de cause, impossible qu’elles aient lieu en mars 2021 sous peine d’avoir un scrutin totalement dénaturé et donc antidémocratique. Des élus de tous bords ne sont pas d’accord sur cette décision de report. M. Bussereau, président de l’association des départements est favorable aux dates « normales ». D’autres contestent cette position. On se souvient que Gérard Larcher et quelques amis à lui avaient plaidé pour que le premier tour des municipales ait lieu malgré l’épidémie. Emmanuel Macron, personnellement favorable au report avait cédé à ses opposants. Des élus ont été contaminés le jour du vote et lors du dépouillement. Les bulletins allaient de main en main et on sait que c’est un acte facilitant la propagation du virus. La sagesse voudrait un report. Mais la sagesse n’a pas toujours fait bon ménage avec les intérêts politiciens.

20 octobre 2020

Après la mort de Samuel Paty, relisons Albert Camus et son instituteur républicain laïque

Après le drame de Conflans-sainte-Honorine et la mort de Samuel Paty, on mesure l’importance du rôle de l’école de la République dans la formation des esprits libres et la construction du citoyen en devenir. Comment pourrait-on écrire mieux que les lettres échangées par Albert Camus et son instituteur ? Au lendemain de l’attribution du prix Nobel de littérature, l’auteur de « l’Etranger » a trouvé le temps de s’adresser à l’homme qui a vu en lui ses capacités intellectuelles exceptionnelles et deviné le chemin qu’il emprunterait. M.Germain consacre un long passage à son attitude à l’égard des religions. Il le fait avec dignité et respect en insistant sur le rôle de l’école de la République. Celle-ci doit demeurer ce temple de la raison qu’aucun fanatisme d’aucune sorte n’aura la possibilité d’attaquer ! A constater les décisions des gouvernants et à lire les déclarations de certains responsables politiques, il semble bien que l’Etat ait décidé de se protéger de toute influence pernicieuse et de protéger l’éducation nationale des prosélytes de tous poils. Il était grand temps.

 

La lettre d’Albert Camus 19 novembre 1957 Cher Monsieur Germain, J’ai laissé s’éteindre un peu le bruit qui m’a entouré tous ces jours-ci avant de venir vous parler un peu de tout mon cœur. On vient de me faire un bien trop grand honneur, que je n’ai ni recherché ni sollicité. Mais quand j’ai appris la nouvelle, ma première pensée, après ma mère, a été pour vous. Sans vous, sans cette main affectueuse que vous avez tendue au petit enfant pauvre que j’étais, sans votre enseignement, et votre exemple, rien de tout cela ne serait arrivé. Je ne me fais pas un monde de cette sorte d’honneur mais celui-là est du moins une occasion pour vous dire ce que vous avez été, et êtes toujours pour moi, et pour vous assurer que vos efforts, votre travail et le cœur généreux que vous y mettiez sont toujours vivants chez un de vos petits écoliers qui, malgré l’âge, n’a pas cessé d’être votre reconnaissant élève. Je vous embrasse, de toutes mes forces. Albert Camus  

La réponse de Monsieur Germain 30 Avril 1959 Mon cher petit, (…) Je ne sais t’exprimer la joie que tu m’as faite par ton geste gracieux ni la manière de te remercier. Si c’était possible, je serrerais bien fort le grand garçon que tu es devenu et qui restera toujours pour moi « mon petit Camus». (…) Qui est Camus ? J’ai l’impression que ceux qui essayent de percer ta personnalité n’y arrivent pas tout à fait. Tu as toujours montré une pudeur instinctive à déceler ta nature, tes sentiments. Tu y arrives d’autant mieux que tu es simple, direct. Et bon par-dessus le marché ! Ces impressions, tu me les a données en classe. Le pédagogue qui veut faire consciencieusement son métier ne néglige aucune occasion de connaître ses élèves, ses enfants, et il s’en présente sans cesse. Une réponse, un geste, une attitude sont amplement révélateurs. Je crois donc bien connaître le gentil petit bonhomme que tu étais, et l’enfant, bien souvent, contient en germe l’homme qu’il deviendra. Ton plaisir d’être en classe éclatait de toutes parts. Ton visage manifestait l’optimisme. Et à t’étudier, je n’ai jamais soupçonné la vraie situation de ta famille, je n’en ai eu qu’un aperçu au moment où ta maman est venue me voir au sujet de ton inscription sur la liste des candidats aux Bourses. D’ailleurs, cela se passait au moment où tu allais me quitter. Mais jusque-là tu me paraissais dans la même situation que tes camarades. Tu avais toujours ce qu’il te fallait. Comme ton frère, tu étais gentiment habillé. Je crois que je ne puis faire un plus bel éloge de ta maman. J’ai vu la liste sans cesse grandissante des ouvrages qui te sont consacrés ou qui parlent de toi. Et c’est une satisfaction très grande pour moi de constater que ta célébrité (c’est l’exacte vérité) ne t’avait pas tourné la tête. Tu es resté Camus: bravo. J’ai suivi avec intérêt les péripéties multiples de la pièce que tu as adaptée et aussi montée: Les Possédés. Je t’aime trop pour ne pas te souhaiter la plus grande réussite: celle que tu mérites. Malraux veut, aussi, te donner un théâtre. Je sais que c’est une passion chez toi. Mais.., vas-tu arriver à mener à bien et de front toutes ces activités ? Je crains pour toi que tu n’abuses de tes forces. Et, permets à ton vieil ami de le remarquer, tu as une gentille épouse et deux enfants qui ont besoin de leur mari et papa. A ce sujet, je vais te raconter ce que nous disait parfois notre directeur d’Ecole normale. Il était très, très dur pour nous, ce qui nous empêchait de voir, de sentir, qu’il nous aimait réellement. « La nature tient un grand livre où elle inscrit minutieusement tous les excès que vous commettez.» J’avoue que ce sage avis m’a souventes [sic] fois retenu au moment où j’allais l’oublier. Alors dis, essaye de garder blanche la page qui t’est réservée sur le Grand Livre de la nature. Andrée me rappelle que nous t’avons vu et entendu à une émission littéraire de la télévision, émission concernant Les Possédés. C’était émouvant de te voir répondre aux questions posées. Et, malgré moi, je faisais la malicieuse remarque que tu ne te doutais pas que, finalement, je te verrai et t’entendrai. Cela a compensé un peu ton absence d’Alger. Nous ne t’avons pas vu depuis pas mal de temps… Avant de terminer, je veux te dire le mal que j’éprouve en tant qu’instituteur laïc, devant les projets menaçants ourdis contre notre école. Je crois, durant toute ma carrière, avoir respecté ce qu’il y a de plus sacré dans l’enfant: le droit de chercher sa vérité. Je vous ai tous aimés et crois avoir fait tout mon possible pour ne pas manifester mes idées et peser ainsi sur votre jeune intelligence. Lorsqu’il était question de Dieu (c’est dans le programme), je disais que certains y croyaient, d’autres non. Et que dans la plénitude de ses droits, chacun faisait ce qu’il voulait. De même, pour le chapitre des religions, je me bornais à indiquer celles qui existaient, auxquelles appartenaient ceux à qui cela plaisait. Pour être vrai, j’ajoutais qu’il y avait des personnes ne pratiquant aucune religion. Je sais bien que cela ne plaît pas à ceux qui voudraient faire des instituteurs des commis voyageurs en religion et, pour être plus précis, en religion catholique. A l’École normale d’Alger (installée alors au parc de Galland), mon père, comme ses camarades, était obligé d’aller à la messe et de communier chaque dimanche. Un jour, excédé par cette contrainte, il a mis l’hostie « consacrée» dans un livre de messe qu’il a fermé ! Le directeur de l’École a été informé de ce fait et n’a pas hésité à exclure mon père de l’école. Voilà ce que veulent les partisans de « l’École libre » (libre.., de penser comme eux). Avec la composition de la Chambre des députés actuelle, je crains que le mauvais coup n’aboutisse. Le Canard Enchaîné a signalé que, dans un département, une centaine de classes de l’École laïque fonctionnent sous le crucifix accroché au mur. Je vois là un abominable attentat contre la conscience des enfants. Que sera-ce, peut-être, dans quelque temps? Ces pensées m’attristent profondément. Sache que, même lorsque je n’écris pas, je pense souvent à vous tous. Madame Germain et moi vous embrassons tous quatre bien fort. Affectueusement à vous. Germain Louis