2 novembre 2020

Deux instituteurs de l'école laïque et républicaine ont forgé mon éducation intellectuelle

Ce matin, tous les élèves des écoles, collèges et lycées de France ont respecté une minute de silence en mémoire de Samuel Paty, ce professeur d’histoire et géographie décapité par un islamiste radical Tchetchène domicilié à Evreux. Jean Castex, le Premier ministre et Jean-Michel Blanquer, ministre de l’Education nationale, étaient présents dans le collège de Conflans-Sainte-Honorine où M. Paty enseignait. Ce fut aussi l’occasion d’écouter la lecture d’un texte écrit par Jean Jaurès adressé à la jeunesse française dans le but de promouvoir un enseignement des fondamentaux et une éducation morale et civique. « Faire nation » pourrait résumer ce beau texte.

 

Serge Bove

Cette journée est pour moi l’occasion de saluer deux instituteurs aujourd’hui disparus qui ont marqué ma jeunesse à l’école Jules Ferry de Louviers. Je veux parler de Jean Fermanel et Serge Bove. L’un et l’autre exerçaient leur métier avec passion. L’un et l’autre veillaient à nous ouvrir au monde. On apprenait par cœur des poèmes, on écoutait Pierre et le loup, on assistait à des séances de cinéma dans la salle des colonnes de la cour de la mairie, sans oublier les dictées, les exercices de calcul, les commentaires de textes savamment corrigés et souvent préparés à la ronéo. Ils étaient savants, c’est un fait, mais surtout, ils étaient heureux de partager leur savoir et de forger des têtes bien faites plutôt que bien pleines.

Ces deux maîtres de l’école laïque et républicaine m’ont donné toutes les bases nécessaires à une culture générale indispensable dans le métier que je souhaitais exercer un jour : journaliste. Bien sûr, dans les années 1953-1957, Internet n’existait pas. La télévision n’avait pas encore connu le boum des années soixante et soixante-dix. Les réseaux sociaux n’étaient que le réseau de mes copains et de mes amies du quartier dit des Amoureux où d’autres apprentissages se développaient : courir les bois, chercher des vipères, pêcher des grenouilles, cueillir du muguet, se cacher dans les rhododendrons, manger des pommes pas mures. Le bois de Saint-Lubin, la porte au père, la mare même, nous étaient aussi familiers que les jardins de notre domicile.

Jamais, ô grand jamais, on n’aurait pu imaginer qu’un enseignant de cette école républicaine méritocratique enfant des Lumières pourrait mourir un jour sous les coups d’un ignorant fanatisé. Les temps changent, donc, mais le rôle des enseignant(e)s est toujours aussi fondamental. Apprendre à lire, à calculer, à connaître les mots, à faire des phrases…bien évidemment permet de classer ses pensées et de maîtriser les concepts abstraits. Mais aussi de forger un caractère, une personnalité pour vous accompagner durant toute la vie. Je dis encore merci à ces deux maîtres de ma jeunesse.

1 commentaire:

nelly LECHAPT a dit…

Tellement d'émotion!
La plus belle année, mais surtout la plus la plus déterminante de ma scolarité, c'est 1962 aux Fougères, avec Monsieur Bove.
Il m'a appris l'essentiel.
Je ne l'oublierai jamais.