Nous
nous garderons de reprendre ici leur inventaire de ses principaux soutiens. Il
suffit pour cela d’acheter ce mensuel totalement indépendant. Nous nous
contenterons plus modestement de proposer une mise en perspective des
conclusions auxquelles les auteurs de cet article sont parvenus.
Pour
cela, rappelons que la Droite se compose dans
ce pays de deux grands courants de pensée. Le premier est ce qu’il est convenu
de nommer la Droite bonapartiste. C’est une droite populaire dans laquelle
s’inscrit le Gaullisme qui, de la Libération jusqu’à l’achèvement du dernier
mandat de Jacques Chirac, a largement dominé le paysage politique. Cette
droite, plus ou moins sociale selon les périodes, farouchement indépendante — d’où le retrait de l’OTAN et la mise en place de la force de frappe nucléaire — est pro-européenne, mais soucieuse de la souveraineté nationale.
Le
second courant est celui qu’on nomme généralement la Droite orléaniste. C’est
la partie la plus réactionnaire de cet ensemble formant deux mondes bien
distincts. Viscéralement anticommuniste, c’est une droite légitimiste,
bourgeoise, catholique, affairiste. C’est celle dite des « Deux cents familles »
d’avant-guerre, à la tête de l’industrie, de l’assurance et de la finance. Son
assise sociologique est par conséquent beaucoup plus étroite. Ces deux mondes
se côtoient par nécessité mais ne se mélangent pas.
Entre
les deux, perdure, de génération en génération, une rancœur tenace. Parce que
la Droite orléaniste est aussi pour l’essentiel la Droite de Vichy, celle qui a
pactisé avec l’occupant nazi. Celle dont un certain nombre de ses membres les
plus éminents a vu ses industries, ses entreprises ou ses banques saisies et
nationalisées au lendemain de la Libération par le gouvernement du général De
Gaulle comprenant des ministres communistes. Celle enfin dont les plus
compromis furent à la même époque, condamnés à des peines de prison ou à
l’indignité nationale en raison même de cette collaboration avec l’ennemi.
Cette
droite-là a été, à quelques exceptions près, écartée durablement du pouvoir par
le général De Gaulle lui-même et par ses successeurs gaullistes. Elle pointe,
le bout de son nez pendant le septennat de Valéry Giscard d’Estaing avec par
exemple le prince Louis de Broglie dont on sait ce qu’il advint. Mais c’est
Nicolas Sarkozy qui, avec le retour de la France dans le commandement intégré
de l’OTAN, signe l’arrêt de mort du gaullisme. Et simultanément rouvre les
portes du pouvoir à cette droite orléaniste tenue si longtemps à distance, pour
en recueillir le soutien.
Cette
droite revancharde, antisociale, réactionnaire et affairiste est celle-là même
qu’incarne François Fillon. Il en a fait siens tous les codes. Il n’est que de
connaître les principales lignes de la politique qu’il entendait mettre en
œuvre dans son programme de la Primaire pour s’en convaincre. Ce serait une
régression sociale d’une brutalité inouïe.
Identifiant
les personnes qui font cercle autour de François Fillon, François Denord et
Paul Lagneau-Ymonet apportent les preuves irréfutables de son appartenance à ce
groupe. Oui, son entourage est bien constitué de la descendance de cette France
de Vichy, de la Révolution nationale : celle des maîtres de forges, des
grands capitaines d’industrie — aujourd’hui encore du grand patronat — des
banquiers d’affaires et autres assureurs, prêts à tout pour rattraper le temps
perdu et asseoir leur domination.
Reynald Harlaut
François
Denord & Paul Lagneau-Ymonet, Le
Concert des puissants, Éd. Raisons d’agir, Paris, 2016
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