Angela Merkel et François Hollande à Minsk. (DR) |
Réélue avec 88 % des voix des membres du congrès
de la CDU-CSU, hier, à Berlin, Angela Merkel demeure la favorite pour occuper
le poste de chancelière de la RFA pour la 4e fois de suite. Il était
d’autant plus intéressant de mieux connaître la vie et l’œuvre d’Angela Merkel,
hier soir sur la chaine Arte. Ce fut pour beaucoup d'entre nous, j'imagine, la découverte d’une personnalité littéralement extraordinaire. Si la chancelière de la République fédérale d’Allemagne semble
si importante dans l’Europe et dans le monde d’aujourd’hui, c’est évidemment dû
à une conjugaison de facteurs multiples mais le caractère bien trempé
de Mme Merkel ainsi que ses facultés d’écoute et d’anticipation ne sont pas
pour rien dans la confiance que lui accorde le peuple allemand.
Le documentaire d’Arte retrace
la vie de l’exceptionnelle étudiante en physique, fille de pasteur, dans l’Allemagne
de l’Est d’avant la chute du mur. Une Allemagne communiste avec un gouvernement
sous l’influence du grand frère soviétique et d’une police secrète intrusive
autant que redoutée. Angela Merkel est alors une jeune fille enjouée, déjà très
volontaire et dotée de talents évidents : intelligence vive,
sens du travail et de l’organisation, charisme discret mais ravageur servi
par une volonté de réussite apte à surmonter tous les obstacles. Dans cette
Allemagne du bloc de l’est, soumise à Moscou donc, la jeune Angela se montre
capable de résister au rouleau compresseur de la pensée unique. Cela ne l’empêche
pas de briller dans ses études : doctorat en sciences physiques, lauréate
en langue russe qu’elle parle couramment et, également, engagement progressif dans
la vie politique, lequel va lui permettre de digérer rapidement la réunification
qu’elle saisit à bras le corps.
Elle choisit alors la
CDU-CSU d’Helmut Khol, qui de mentor et de protecteur, va devenir celui par qui
le scandale arrive (l’affaire des caisses noires) avant qu’Angela décide (un
vrai coup de poker) de le sacrifier et de postuler pour les premiers rôles. Ce
sera difficile tant les hommes au pouvoir vont s’efforcer de réduire cette
jeune ambitieuse aux fonctions subalternes de collaboratrice. Il en faudra plus
pour mettre à bas les ambitions de celle qui, fruit de hasards et de sens
politique aigu, domine la politique allemande et européenne depuis une décennie.
Les témoignages sont éloquents :
souvent positifs, ils sont tout de même réservés lorsqu’il s’agit qualifier les
sentiments de celle qu’on appelle «Mutti» dans l’Allemagne d’aujourd’hui. Est-elle
calculatrice, fausse naïve, intrigante ? Ou au contraire, sait-elle se
faire mutique pour mieux encaisser les coups, moins s’exposer, mieux préparer
ses stratégies ? A la Commission de Bruxelles, on connaît l’autorité d’Angela
Merkel, on sait aussi qu’elle s’appuie sur un pays industriel fort, aux excédents
commerciaux importants, aux déficits réduits et au taux de chômage très inférieur
au taux français par exemple.
S’agissant de l’accueil des
réfugiés, on ne peut que louer le caractère humaniste de la chancelière et une
sincérité évidente face au malheur des dizaines de milliers de malheureux. La France
n’est pas arrivée à la cheville de l’Allemagne. Il subsiste pourtant quelques taches
sur le blason de Mme Merkel : un retard à allumage important lors de la
crise financière de 2008, une lente incompréhension de la situation grecque et plus
largement de la spécificité européenne, enfin et surtout, un leadership dans le
monde conservateur bien qu’ayant réalisé une coalition avec les sociaux-démocrates
du SPD.
Après 10 ans de pouvoir, Mme
Merkel fatigue. Si son envie de réussir demeure intacte, elle est tout de même
contrainte de s’adapter à un monde globalisé avec Poutine, Trump, Xi Jinping,
Erdogan…et des démocraties fortement attaquées par les extrêmes. En tout état
de cause, le portrait dressé sur Arte laisse poindre une personnalité solide
dont le slogan « nous y arriverons » a été mis en application de manière telle
qu’il fait bien des jaloux en Europe…et en France.
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