Un ami d’origine maghrébine
m’affirme que la déception des jeunes « rebeus » est telle vis-à-vis de la
gauche et de la droite républicaines qu’ils s’apprêteraient, peut être pas tous
heureusement, à voter pour le FN ce dimanche, histoire de donner « un coup de
pied dans la fourmilière ». Et pourtant. Comme dans une ruche, une fourmilière
est un monde organisé, hiérarchisé, où chaque individu ne dépend que de l’attitude
des autres affirmant ainsi une solidarité sans faille entre tous les membres de
la collectivité. La taille même de chaque individu est fonction de l’utilité
commune. Le tout servant à faire perdurer la colonie, à la faire grandir, à
assurer sa subsistance et sa sécurité. Donner un coup de pied dans la fourmilière
reviendrait donc à semer le désordre, la peur, l’angoisse, à déstructurer la
colonie dont les individus seraient perdus…ce qui n’est que provisoire car les
insectes savent, par bonheur, se reconstituer rapidement et ailleurs. Ce qui n’est
pas toujours le cas au sein des colonies humaines.
Loin de moi l’idée de
comparer notre société à une ruche ou une fourmilière. Je sais que certains économistes
flattent l’organisation des hyménoptères dont il faudrait s’inspirer. Mais il s’agit
d’un anthropomorphisme déplacé. Les jeunes « rebeus » devraient y regarder
à deux fois avant de commettre un geste citoyen libre, certes, mais lourd de
conséquences. Car ce que n’affirme pas péremptoirement Marine Le Pen, Sarkozy
le fait à sa place : pas de menu de substitution dans les cantines
scolaires ! Absence de liberté de choix ! Plus de voile pour les étudiantes
à l’université ! S’ils ne sont pas contents qu’ils aillent dans le privé
confessionnel ! Et que je t’en remets une louche. Au point d’indigner même
des ténors de l’UMP comme Fillon, Juppé…ou Rachida Dati qui demande « qu’on arrête le délire. »
Le mot est bien choisi.
Sarkozy délire. Et certains Français l’approuvent. Il est tellement sûr de
lui, tellement certain de gagner la prochaine présidentielle qu’il ne prend
plus de gants pour asséner ses vérités partagées par les électeurs communs au
Front national et à la droite forte. Mais le « Pas de ça chez nous » crié à la
face d’une jeune femme enceinte de huit mois, portant le foulard et agressée physiquement,
hier, par deux voyous fanatiques devrait pourtant être un signal d’alerte.
« Chez nous » comme si ces
deux voyous pouvaient se revendiquer de la France éternelle, celle des lumières
et des droits de l’homme. Comme si la Laïcité à la sauce Le Pen n’avait d’autre
objectif que de défendre l’espace public pour en interdire l’accès aux
kippas, aux djellabas et aux autres tenues religieuses portées par qui le veut
quand il ou elle le veut. Les Français musulmans ont autant de droits que
les autres. Pas plus, mais pas moins. Ils sont nos compatriotes et doivent
pouvoir circuler librement dans toutes les rues de nos villes. Avec ou sans
foulard sur la tête.
Des responsables du CFCM (Comité
français du culte musulman, d’ailleurs constitué à la demande de Nicolas
Sarkozy) accusent les politiques imprudents ou pyromanes de jeter de l’huile
sur le feu. D’attiser des braises toujours chaudes. Et cela, bien évidemment,
à la veille du second tour d’une élection. Ils ont raison, tout cela recèle des arrières pensées. Le « Pas de ça chez nous » illustre parfaitement
la volonté de marginaliser, stigmatiser, rejeter, tous thèmes à l’œuvre à l’extrême
droite. Jouer sur des réflexes d’exclusion, voilà la nouvelle politique qu’on
nous propose. Comme à Hénin-Beaumont où la ligue des droits de l’homme a été
expulsée de son local, comme à Béziers où la liste des associations subventionnées
a été revue à la baisse. Quand on pense que dimanche, ces gens-là sont bien capables de
gagner quelques cantons. Misère.
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