Christine Lagarde,
directrice générale du FMI, à la tête d’une institution importante pour la
stabilité financière des états, a été mise en examen, hier, par la chambre d’instruction
de la Cour de justice de la République. Après quatre auditions de plusieurs
heures s’échelonnant sur plusieurs semaines, les magistrats professionnels
issus de la Cour de Cassation, de la Cour des Comptes, notamment, sont arrivés à
la conclusion que Mme Lagarde s’était montrée « négligente » dans l’affaire de
l’arbitrage dont a bénéficié Bernard Tapie.
L’ancien homme d’affaires
(dans tous les sens du terme) ancien ministre de François Mitterrand, ancien président
de l’OM, ancien soutien de Nicolas Sarkozy, ancien taulard pour match truqué,
devenu patron de presse, s’est vu attribuer par un collège privé d’arbitres (1)
une somme d’argent supérieure à 400 millions d’euros dans l’affaire de la
revente d’Adidas au Crédit Lyonnais. L’arbitrage, très utilisé dans les
affaires privées, l’est plus rarement quand il s’agit d’argent public.
Il s’agit d’une pratique
ancienne, dont Christine Lagarde, ex-responsable d’un grand cabinet d’avocats
américain, en connaissait les avantages mais peut-être moins les inconvénients.
Les magistrats instructeurs lui reprochent essentiellement de ne pas avoir contesté
la décision des arbitres visant à attribuer à Bernard Tapie la somme rondelette
déjà citée et surtout de l’avoir fait bénéficier d’un préjudice moral de plus
de 40 millions d’euros, somme extravagante aux yeux des experts et bons
connaisseurs du dossier.
J’avoue que le terme de « négligence
» prête à confusion. Il peut, en effet, s’agir d’une peccadille, d’une
absence d’action ou, au sens juridique du terme, d’un acte non accompli alors
que tout penchait pour sa réalisation. Il s'agirait en quelque sorte d'une faute professionnelle. Mais si Mme Lagarde n’a pas contesté l’arbitrage
dans les délais impartis, c’est tout simplement parce qu’elle a obéi à Nicolas Sarkozy
lequel voulait clore le dossier Tapie-Crédit Lyonnais à l’avantage de celui qui
avait appelé à voter pour lui…mais sur le dos des contribuables français.
Dans l’affaire Tapie, d’autres
intervenants, non ministres, seront comptables de leur comportement devant la justice ordinaire. Mme
Lagarde bénéficie, elle, d’un privilège de juridiction comme ancienne ministre et la sanction qu’elle encourt
(un an de prison, 15 000 euros d’amende) ne lui sera évidemment jamais opposée
puisque les juges de la Cour de justice de la République sont majoritairement
des parlementaires et qu’une solidarité non écrite jouera en sa faveur si, un jour, procès
il y a.
En attendant, Mme Lagarde
continue d’occuper sa fonction à Washington, où le conseil d’administration du
FMI ne tardera pas à lui renouveler sa confiance.
(1) les arbitres :
Pierre Estoup, Pierre Mazeaux, Jean-Denis Bredin. Pierre Estoup semble être l’auteur
de la sentence arbitrale.
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