(photo Jean-Charles Houel) |
Cette décision peut paraître
anecdotique voire sans intérêt. On aurait pourtant tort de ne pas saluer l’action
entreprise par le président de la région Haute-Normandie, Nicolas
Mayer-Rossignol, visant à favoriser le développement de l’apiculture auprès des
lycéens et des apprentis de la Seine-Maritime et de l’Eure. En acceptant de
financer l’implantation de ruches dans les établissements scolaires de
Haute-Normandie en accord avec les groupements apicoles locaux, Nicolas
Mayer-Rossignol fait plus qu’un geste symbolique.
On sait combien le rôle des
agents pollinisateurs comme les abeilles est important pour l’agriculture, l’arboriculture
et la culture des fruits et légumes. On sait aussi que de nombreuses causes
comme le développement d’agents pathogènes ou l’emploi systématique de
pesticides ou d’insecticides conduisent à l’effondrement des colonies d’abeilles.
Dans l’Eure, par exemple, on recense 6 000 ruches appartenant à quelques
professionnels et de nombreux amateurs passionnés. Pour remplir les besoins, on
estime qu’il en faudrait le double. L’apport de la région, sans être considérable
n’en est donc pas moins souhaitable dans la mesure où les lycéens et apprentis
prendront goût à une activité de loisir riche d’enseignements et de découvertes
sur la nature qui nous entoure.
J’entendais, hier soir sur Arte, un apiculteur
de Lozère raconter sa vision très personnelle et poétique de l’apiculture
considérée comme un art et non plus seulement comme une activité humaine.
Depuis des siècles, les abeilles et le miel sont dotés d’une connotation
positive pour la santé et pour la vie. La Région considère que les jeunes Eurois
et Seino-marins doivent être concernés par l’avenir des abeilles qui est un peu
le nôtre. Elle a raison.
Justement. Il existe des
ruchers-écoles (deux dans l’Eure) ouverts à tous ceux et toutes celles qui
souhaitent se lancer dans l’apiculture. Il suffit d’un coin de jardin, de
quelques bases solides et d’outils rudimentaires, mais surtout d’un intérêt non
démenti pour les insectes pollinisateurs et pour maintenir leur place dans l’équilibre
naturel des échanges avec les plantes florales. Je ne saurais trop encourager
les vocations et je profite de l’occasion pour vous donner à lire l’introduction
d’un dossier de presse édité par l’INRA et consacré aux recherches conduites
sur l’abeille mellifère. (1)
« Un monde
sans abeilles ? N’y pensons pas ! Bien sûr, les produits de la ruche, miel,
pollen, cire, nous manqueraient. Mais surtout, ces super-pollinisateurs sont
indispensables à l’agriculture. Si on parle de tonnage, 35% de ce que nous
mangeons dépend directement de leur travail
silencieux. Si on parle de diversité, c’est 84% des espèces
cultivées en Europe et plus de 80% des espèces sauvages qui ont besoin de leurs
pattes et de leur toison pour s’échanger du pollen et se reproduire. Alors,
seriez-vous prêt à vous passer de la plupart
des fruits et légumes ?
Pourtant, on
le sait, les abeilles connaissent des moments difficiles. Pesticides, pathogènes,
prédateurs invasifs rendent leur survie difficile. Facteurs auxquels il faut
ajouter l’agriculture intensive qui uniformise les paysages et prive les abeilles
d’une alimentation constante, accessible et variée. La mortalité hivernale des
ruches a de quoi inquiéter : entre 20 et 30% en
France, autour de 40% pour la Belgique et la Suède. De
quoi désespérer les apiculteurs. Nombreux sont ceux qui jettent l’éponge. Ceci
est d’autant plus inquiétant que le monde agricole manque
cruellement de pollinisateurs. L’Europe aurait
besoin de 13,4 millions de colonies d’abeilles en plus pour ses cultures.
Que faire ?
Les chercheurs fournissent d’intenses efforts pour mieux comprendre les causes
du déclin des abeilles, et notamment pour trouver les synergies entre facteurs
environnementaux, produits phytosanitaires et maladies. Efforts payants non
seulement en termes scientifiques, mais aussi en termes politiques : ce sont
bel et bien les résultats de leurs recherches,
notamment celles menées dans les labos Inra, qui ont abouti
au moratoire européen sur les insecticides néonicotinoïdes.
Les efforts des chercheurs pour déterminer
les causes du déclin ne peuvent se passer d’une meilleure connaissance de l’abeille
mellifère : sa physiologie, son alimentation, ses
extraordinaires formes de communication, la structure sociale des colonies, les
pratiques apicoles et surtout, la relation des abeilles avec les divers environnements
et écosystèmes qu’elles peuvent rencontrer. »
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