M. François Loncle interpelle le Premier ministre sur
le décret n° 2012-441 relatif aux conditions particulières d'accès à la
profession d'avocat.
« Publié en catimini le 3 avril dernier au Journal
officiel, ce décret institue de nouvelles passerelles vers le métier d'avocat
pour « les personnes ayant exercé des responsabilités publiques les
faisant directement participer à l'élaboration de le loi pendant huit années »,
à la seule autre condition de posséder une maîtrise de droit ou un diplôme équivalent.
Cette généreuse disposition s'applique, en fait, aux anciens ministres et
parlementaires qui bénéficient, en outre, d'avantages supplémentaires
puisqu'ils sont dispensés de « formation théorique et pratique ainsi que
du certificat d'aptitude à la profession d'avocat ».
Autrement dit, les
personnes concernées peuvent désormais revêtir la robe d'avocat sans avoir
jamais suivi de formation spécifique ni passé d'examen. Cette dérogation équivaut
à un privilège éhonté. M. François Loncle demande au Premier ministre de lui
expliquer de quelle manière un mandat électif ou une fonction gouvernementale
pourrait se substituer à un diplôme, en quoi un ministre ou un député serait sui
generis apte à exercer un métier qui requiert des compétences particulières.
Si cette singulière règle était extrapolée, on pourrait imaginer que tout
ministre de l'Intérieur serait susceptible d'endosser l'imperméable du
commissaire Maigret, que tout secrétaire d'Etat au Commerce, à l'Artisanat etc.
pourrait se transformer en philosophe voltairien, que tout ministre de la défense
se verrait bombardé général, que tout ministre de la Santé pourrait revêtir la
blouse blanche de chirurgien, que tout président de la Commission des affaires étrangères
deviendrait ambassadeur.
C'est carrément saugrenu: il ne suffit pas d'avoir son
permis de conduire pour prétendre être
mécanicien, de manger une brioche pour être boulanger, de boire du vin pour être
viticulteur, d'être député ou sénateur pour pouvoir défendre un justiciable
devant un tribunal. Ce passe-droit est indigne et méprisable: non seulement il
dégrade la belle profession d'avocat, mais il accroît les risques de conflits
d'intérêt et même de trafics d'influence, alors que l'actuel président de la République,
avocat lui-même, vantait une république irréprochable.
Au cas où le Conseil d'Etat
ne souscrirait pas au recours formé par le Conseil national des barreaux (CNB)
contre ce décret, il reviendrait au prochain gouvernement d'abroger un texte
inique dont l'urgence ne paraît guère évidente. C'est pourquoi M. François
Loncle souhaite que le Premier ministre justifie la date de publication de ce décret,
à quelques semaines d'échéances électorales importantes. Il aimerait savoir si
les membres du gouvernement et les députés de la majorité sortante cherchent
ainsi une solution préventive de reconversion professionnelle. »
François LONCLE
Député de l'Eure
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