19 avril 2012

Du Fouquet’s au Crillon, en passant par le yacht de Bolloré…


Illustration :
Maurice Boutet de Monvel (1850-1913) L’Apothéose de la canaille – Huile sur toile – (430 x 332) – 1885 – Orléans, Musée des Beaux-Arts

Décidément, Nicolas Sarkozy et avec lui les gens qui l’entourent sont incorrigibles, grisés par l’argent et le pouvoir qu’il procure. Il était déjà permis de penser que commençant son quinquennat en fêtant sa victoire le 6 mai 2007 au Fouquet’s, l’un des endroits les plus chics et les plus chers de Paris, en compagnie de ses amis-patrons, Nicolas Sarkozy allait le payer très cher au moment d’être à nouveau candidat en vue de sa réélection. Quand il s’agit de régler les comptes, le peuple n’a pas la mémoire courte et il est des plats qui se mangent froids. Circonstance aggravante, au lieu de faire retraite comme il l’avait annoncé, et comme chacune et chacun le supposait, dans un monastère, le choix qu’il fit de partir en croisière sur le yacht de son ami milliardaire Vincent Bolloré fut désastreux et lui valut dès lors le qualificatif de « président des riches ».

Certains pouvaient encore croire, puisqu’il s’en était même dernièrement excusé, que ces deux monumentales erreurs, allaient au moins lui servir de leçon et le pousser à être plus prudent. Que nenni ! Chassez le naturel, il revient au galop. C’est donc à l’hôtel de Crillon, place de la Concorde, dans un des plus prestigieux restaurants de Paris, que le monarque républicain avait choisi de régaler – aux frais de qui ? – ses plus généreux donateurs, ceux dits du « Premier cercle », dimanche 15 avril, juste avant de parcourir les quelques mètres qui le séparaient de la tribune d’où il a tenu ce que nous sommes très nombreux à espérer être son dernier grand discours.

Que de similitudes troublantes avec le parcours du roi Louis XV, dit le Bien-Aimé, qui commença son règne entouré de l’affection de ses sujets et le termina dans la détestation la plus profonde du peuple à son égard, préparant les esprits à la révolution future. Époque d’une injustice inouïe, celle du bon plaisir, au mépris du peuple dont on ignore les souffrances et qui croule sous l’impôt dont sont exemptés les riches. C’est aussi sous son règne et pour sa gloire que fut créée cette place appelée alors place Royale, au centre de laquelle trônait la statue équestre du monarque, détruite à la Révolution. Cette place, aujourd’hui de la Concorde, choisie par Nicolas Sarkozy pour y parader et y prononcer son premier et son dernier grand discours de président. Et quelle curieuse idée a-t-il eu durant son quinquennat de choisir pour résidence secondaire à Versailles, le pavillon de la Lanterne, d’ordinaire réservé au Premier ministre qu’il a prié d’aller voir ailleurs... Mais aussi, que de différences ! Entre cette aristocratie du XVIIIe siècle, brillante, lettrée, cultivée, raffinée jusqu’à l’extrême préciosité, portant les Lumières, et cette oligarchie qui s’est choisie pour la représenter cette sorte de moderne Rastignac, arriviste, grossier personnage, inculte et qui s’en vante, fasciné par le luxe voyant, vulgaire et tapageur.

Ah, ça ira, ça ira, ça ira
Nicolas Sarkozy à la Lanterne
Ah, ça ira, ça ira, ça ira
Nicolas Sarkozy, on le pendra

De nos jours c’est heureux, grâce aux lois de la République et à François Mitterrand qui fit abolir la peine de mort, on ne guillotine plus les monarques, fussent-ils républicains, destitués, renversés ou remerciés par le suffrage universel, pas plus qu’on ne les pend. Mais on peut le cas échéant les juger, et qui sait les jeter en prison lorsqu’ils y sont condamnés au nom du peuple souverain. Pour combien de temps encore ? Nos institutions sont en si piteux état qu’il n’est que temps d’en changer.

Reynald Harlaut
Parti de Gauche, membre du Front de Gauche







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