7 juin 2011

« Mélenchon est dans le formatage politique » par Alain Lefeez


André Chassaigne et Jean-Luc Mélenchon (DR)

La direction du PCF, traumatisée par le score de Marie-George Buffet (1,93%) à la présidentielle de 2007, a choisi de longue date de ne pas présenter de candidat et de s’en remettre à l’option Mélenchon sous le label Front de Gauche. Ce n’est pas une surprise, la Conférence Nationale du PCF s’est prononcée pour la candidature de Jean-Luc Mélenchon, à 63,6 % des voix. La composition de la Conférence assurait d’avance une majorité à la direction nationale du parti. Je n’ai jamais été favorable aux décisions prises d’en haut et je me réjouis donc que les militants du PCF aient tout de même le choix, le 18 juin prochain, de départager les trois derniers postulants de la primaire (même s’il ne faut pas l’appeler comme ça) : Emmanuel Dang Tran, seul candidat opposé à la stratégie du Front de Gauche, l’ogre médiatique Jean-Luc Mélenchon et son principal rival, André Chassaigne.

Au cours des dernières semaines, le mécontentement de nombreux communistes s’est exprimé de plus en plus fortement, dans les sections et fédérations du parti. Ce mécontentement s’alimente de plusieurs sources. A travers la candidature de Chassaigne, beaucoup de communistes défendent la nécessité que le PCF, et les idées du communisme, figurent au premier plan de la campagne électorale. Par ailleurs, la position de Mélenchon sur la guerre en Libye a choqué bon nombre d’entre nous. Mais même des camarades plutôt favorables à Mélenchon, initialement, ont eu le sentiment, parfaitement fondé, que la direction du parti cherchait à imposer cette candidature au détriment d’un débat pleinement démocratique, au sein du parti. Au final, si la Conférence Nationale avait adopté un bulletin de vote ne comprenant pas la candidature d’André Chassaigne, ça ce serait très mal passé à la base du parti. Et ni André Chassaigne, ni la direction nationale ne voulaient prendre la responsabilité de déclencher une crise interne sur cette question.

André Gerin a annoncé qu’il retirait sa candidature pour appeler les militants à voter André Chassaigne. A l’inverse, Emmanuel Dang Tran a annoncé qu’il maintenait sa candidature et le fait qu’il maintienne sa candidature apparaît comme une division qui risque de favoriser la candidature de Mélenchon. Dans les jours à venir, on entendra certainement l’argument suivant : « Si les militants communistes désignent Chassaigne, le Front de Gauche explosera ». Pourquoi ? Parce que Mélenchon maintiendrait tout de même sa candidature à la présidentielle. Il est vrai que Mélenchon l’a suggéré à plusieurs reprises. Mais ceci n’est pas vraiment un argument, c’est plutôt un chantage

Or, je me moque un peu de qui sera le candidat du Front de Gauche à la prochaine présidentielle, car quel que soit ce candidat, à l’issue du premier tour, l’un ou l’autre donnera exactement la même consigne de vote pour la suite. Pour ma part, j’ai toujours souhaité et soutenu la candidature d’André Chassaigne parce qu’il défend une alternative révolutionnaire au capitalisme en crise. Son  « programme populaire et partagé » comporte de nombreuses propositions positives. Mais la Conférence Nationale ne s’est concentrée que sur la question des candidatures, au détriment du programme. 

Pourtant la question du programme demeure absolument décisive. Aujourd'hui, dans la grande masse des citoyens, il y a une forme d'indignation et de rejet qui se manifeste par rapport à la politique institutionnalisée, super médiatisée autour de personnalités. Le Front de Gauche devrait montrer une autre façon de faire de la politique, très collective, un peu comme ce qui s'est passé lors du traité constitutionnel européen. Il n'y a pas ceux qui savent et ceux qui ne savent pas. Jean-Luc Mélenchon est dans le formatage politique en ce sens qu'on veut nous obliger à réduire la politique à des personnalités. Sa campagne est faite sur des prestations télévisées, sur des buzz, sur des coups de gueules. Cela peut paraître séduisant car médiatique mais je pense que cela ne correspond plus aux attentes d'aujourd'hui.

Alain Lefeez

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