M. Aubinais à Evreux lors de la conférence sur le prix de l'eau dans l'Eure. (photo JCH)
Je viens de terminer la lecture de la motion sur la gestion des services d'eau et d'assainissement proposée au vote des délégués de la communauté d'agglomération Seine-Eure. Cette motion lue par M. Aubinais, maire de Poses et vice-président chargé de ces questions, préparée par les services techniques de la CASE, est un texte intéressant.
Mais il commence mal. Ecrire que « depuis plusieurs mois certains élus sont la cible de violentes attaques sur la gestion etc. » n'est pas conforme à la vérité. Ces écrits sont donc malheureusement polémiques alors que la vérité est la suivante : l'association que je préside et que j'anime collectivement, cherche à faire passer (chez les élus et dans le public) des messages nécessaires à la fois sur les plans démocratique et financier. Nous faisons le travail que les élus ne font pas car il est légitime de savoir comment sont justifiés les millions d'euros payés à Véolia. Et donc à ses actionnaires.
Malgré des justifications historiquement vraies sur la responsabilité d'Odile Proust, M. Aubinais en tire des conclusions opposées aux nôtres uniquement pour conforter l'analyse de Franck Martin favorable au privé. Autrement dit, M. Aubinais est l'otage de Franck Martin. Quand il affirme que « les élus de l'agglomération sont très fiers de la politique conduite en ces domaines complexes et très techniques » il ne fait que reprendre l'antienne de M. Martin. Ce dernier a toujours vanté la soi-disant «complexité» pour s'exonérer de l'absence d'informations citoyennes. Cette motion est une réponse à nos critiques et en ce sens, nous considérons que le dialogue est amorcé alors qu'il était impossible jusqu'à maintenant.
Je suis heureux, également, de constater que cette motion affirme enfin, haut et fort, que le contrat avec Véolia sera caduc en février 2015 ! Il en aura fallu des mois d'affirmation répétées de notre part pour en arriver là ! Pourquoi avoir tant tardé à admettre l'inévitable ? Pourquoi M. Martin s'est-il obstiné à affirmer, il y a encore quelques semaines, que le contrat expirerait en 2024 ?
Je remarque, d'autre part, que l'essentiel du plaidoyer de M. Aubinais est un plaidoyer pro domo. La CASE a beaucoup investi, beaucoup dépensé… tout cela est très bien. L'eau est de bonne qualité (bravo !) la ressource est protégée (encore bravo !) mais l'essentiel est ailleurs. Quand on regarde sa facture d'eau que voit-on ? Que la part de Véolia dans le mètre cube d'eau potable est de 87 % (13 % pour la CASE) alors que pour le mètre-cube d'eau assainie, elle est de 52 % pour Véolia et 48 % pour la CASE laquelle a effectivement construit des stations d'épuration performantes. Qui paiera sinon les usagers ? Idem pour l'action au Bénin. Je suis favorable au creusement de puits en Afrique et à la solidarité technique et financière avec le Bénin d'Hubert Zoutu. Mais quand la fondation Véolia verse 82 000 euros à l'association pour Bohicon, d'où vient l'argent sinon du 1% de contribution pour les pays en voie de développement ? Véolia est généreux avec l'argent des autres !
S'agissant des révisions quinquennales, elles ne sont pas du fait de la CASE mais sont rendues obligatoires par la loi (1). Je suis de ceux qui pensent, comme MM. Aubinais-Martin, qu'une tarification progressive est utile pour responsabiliser les usagers mais faire croire que cela favorise une tarification sociale pour les ménages les plus modestes est une contre-vérité dans la mesure où les coupures d'eau continuent de sévir et les pénalités avec (de quatre à six par mois en moyenne).
Le rendement et le renouvellement de réseau ? M. Aubinais se targue d'un rendement de 84 % (84 mètres-cubes distribués sur 100 mètres-cubes produits soit 16 % de fuites) sur le territoire de la CASE. Il s'agit, là encore, d'un leurre. Ce résultat excellent n'est dû qu'au rendement rolivalois (93 %) lui-même conséquence de réseaux neufs. Qu'en est-il à Acquigny ou même à Louviers où le rendement n'est que de 77 % !
L’année 2009 a été une mauvaise année pour le taux de renouvellement des réseaux qui a été particulièrement faible. Avec un taux de 0,36 % on peut dire que le résultat n'est pas bon du tout. Sur les quatre dernières années, il a été de 1,3 % ! La moyenne française.
Un peu de sémantique enfin : la case s'est dotée, selon MM. Aubinais-Martin d'une régie d'«ingénierie» terme que nous avons utilisé pour décrire la régie créée par Daniel Leho que M. Martin a traité d'escroc intellectuel et de manipulateur. Affirmer ainsi que la CASE est devenue la donneuse d'ordres est un abus de langage. Car le contrôle des élus et des techniciens sur les prestations de Véolia demeure laxiste. M. Yung, vice-président de la CASE l'a reconnu : « quand on passe un contrat, on fait confiance. »Les actionnaires de Véolia n'en demandent pas plus.
Je ne saurais conclure sans m'insurger (pour le coup) contre l'affirmation de M. Aubinais : « la CASE a renégocié ses contrats à deux reprises. » C'est formellement vrai mais l'usager n'en a rien su ni rien vu. Et cette renégociation n'a eu aucune influence sur le prix de l'eau, bien au contraire. Si la régie publique peut modifier le prix du mètre-cube chaque année, ce n'est pas le cas de Véolia qui voit le prix être modifié au gré des indexations acceptées par l'autorité organisatrice à l'origine du contrat sans préjudice des procédures de révision quinquennale. Le prix du mètre-cube d'eau est de 3,86 euros sur la majeure partie du territoire de la CASE. Il pourrait baisser de 20 à 30% en cas de renégociation serrée avec le délégataire (2). C'est cela que nous aurions aimé lire sous la plume de MM. Aubinais-Martin. Et c'est vers cela que tendra notre action jusqu'à complète satisfaction.
(1) La loi sur l'eau contraint les agglomérations à mettre en ligne sur Internet le rapport sur le prix et la qualité de l'eau. A la CASE, ce n'est pas fait, M. Aubinais !
(2) La marge nette ne doit pas aller dans la poche des actionnaires de Véolia. Elle doit permettre de baisser le prix de l'eau, d'améliorer la capacité d'investissement de la CASE et les conditions de travail des salariés.
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