9 juin 2011

Cinq conditions pour sauver M'Real


Communiqué de Marc-Antoine Jamet, Maire de Val-de-Reuil, Vice-président du Conseil régional de Haute-Normandie.

« Cinq conditions sont nécessaires pour sauver M'Real :

La réunion en préfecture d'Evreux qui a rassemblé, aujourd'hui 10 juin, représentants de l'Etat, dont la Préfète de l'Eure et un nouveau membre du cabinet de Bruno Le Maire (dont le rythme de remplacement à la table des négociations est presque aussi rapide que celui des titulaires du portefeuille de l'industrie à la table du conseil des ministres, soit trois en trois ans), les représentants du personnel et les collectivités locales laisse une pénible impression de "déjà vu" pour tous ceux qui se battent depuis 2010 pour sauver cette entreprise.

En deux heures, rien de décisif n'a été avancé, rien de concret n'a été proposé. Au contraire, le délégué du Ministère de l'Agriculture a encore évoqué comme il y a six mois, comme il y a un an, comme il y a un an et demi, sur le même dossier et malgré la détresse des plus de 300 salariés menacés, de fantomatiques repreneurs, d'hypothétiques solutions, d'invraisemblables montages sans financements précis, sans le moindre nom, sans aucune référence. A la stupéfaction générale, ce sont les syndicats et et les élus de Gauche qui ont apporté des informations et des suggestions aux envoyés gouvernementaux.

Alors que l'usine ferme, on amuse la galerie

C'est pourquoi, avec les autres élus, j'ai exigé que cinq conditions soient remplies pour ramener sérieux et sincérité dans la définition d'une solution.

1) le site ne peut fermer au 1er septembre, contrairement à ce que la direction a déclaré, car les cabinets de recherche de repreneurs, soi-disant missionnés par l'actionnaire finlandais de M'Real, n'auront jamais le temps en moins de 90 jours d'été de travailler.

2) la transparence doit désormais s'installer dans les négociations et les tractations, les documents, les solutions ne peuvent être tenus secrets par le seul Ministère de l'agriculture. On s'étonne d'ailleurs que le Ministère de l'Industrie soit tenu à l'écart, par qui, au profit de qui et pour quoi, de ce processus. Il faut jouer collectif. Il en va de l'avenir du site.

3) Huit repreneurs auraient été contactés et devraient visiter l'entreprise cette semaine. Aucun ne serait un industriel. Tous seraient des groupes financiers. Il faut souhaiter que ce ne soit ni des dépeceurs, ni des chasseurs de primes. La priorité doit être donnée à une proposition porteuse d'activités et garante d'emplois.

4) Le papier et sa pâte ne peuvent être les seules activités recherchées. La production d'énergie et de chaleur est, notamment, une piste qui doit être explorée. Le maître mot doit être diversification. Aucune idée ne doit être écartée.

5) De même que Alain Le Vern et la région ont clairement indiqué qu'ils soutiendraient financièrement la reprise économique du site d'Alizay, le gouvernement, au lieu de prétendre avoir mobilisé l'Agence Française pour les Investissements internationaux pour dénicher , dont ce n'est pas le métier ni l'objectif, devrait associer plus fermement le fonds stratégique d'investissement.

C'est à ces conditions que la reprise de M'Real et le maintien des emplois seront de nouveau possibles. Je demande qu'elles soient exigées, obtenues et respectées. »

« Front de Gauche : entre le cœur et la raison, les militantes et militants communistes vont devoir choisir ! »


Fruit de la nécessité d’apporter aux Françaises et aux Français des réponses véritablement de gauche aux difficultés que traversent notre pays et l’Europe tout entière après la crise de 2008 et le cuisant échec des politiques libérales, le Front de Gauche, né de la volonté commune de rassemblement du Parti communiste français, du Parti de Gauche et de la Gauche unitaire, a commencé d’être porteur d’un espoir pour l’avenir. Qu’il s’agisse de justice sociale, de solidarité ou de partage des richesses. Cet espoir a commencé de se concrétiser dans les résultats encourageants qu’a obtenus successivement le Front de Gauche aux élections européennes, puis régionales et enfin cantonales.


Les Françaises et les Français, attachés aux valeurs fondamentales de la République : Liberté, Égalité, Fraternité, comprennent que seule une union solide bâtie autour d’un programme clairement en rupture avec le modèle économique actuel, dont chacun pressent bien qu’il mène le monde au-devant de désastres économiques, sociaux et environnementaux, peut être de nature à provoquer dans l’opinion un mouvement semblable à celui qui les amena à voter contre toute attente à plus de 54% contre le Traité constitutionnel européen, en 2005.

Toutes et tous constatent à la lumière de la situation dans de nombreux pays européens comme la Grèce, l’Irlande, le Portugal et l’Espagne, mais aussi la Grande-Bretagne, que la gauche institutionnelle sociale-libérale, se voulant ressemblante aux Démocrates états-uniens ou aux Travaillistes britanniques façon Anthony Blair, est incapable d’apporter aux problèmes auxquels elles et ils sont confrontés, d’autres solutions que celles consistant à atténuer les conséquences les plus outrancières d’un capitalisme financier totalement débridé. Sans jamais s’attaquer aux causes. Ni l’ancien directeur du FMI, ni désormais François Hollande, ce candidat de second choix, n’ont jamais manifesté la moindre velléité d’affronter l’ordre libéral établi. C’est pourquoi l’oligarchie qui nous gouverne, ne croyant plus aux chances de son candidat préféré de 2007, en a fait successivement les tristes héros de ses enquêtes d’opinion.

Nos concitoyennes et concitoyens sont définitivement lassés de ces alternances tant de fois répétées, qui toujours ont abouti aux mêmes résultats : augmentation du chômage, aggravation des inégalités, dégradation des services publics et des comptes sociaux en dépit de la richesse créée toujours plus grande. Il faudra un jour nous expliquer la différence de nature existant entre une privatisation de gauche et une privatisation de droite.

Fort de ces constats, de l’exaspération qui monte partout d’une jeunesse sacrifiée sur l’autel du profit, de la souffrance silencieuse de ces millions de personnes privées d’emploi ou installées dans la précarité et sans aucun avenir, de cette politique de bas salaires imposée par le patronat au bénéfice des seuls actionnaires et produisant chaque jour davantage de travailleuses et travailleurs pauvres, le Front de Gauche porte en même temps que cet espoir de vrai changement, une responsabilité immense. Celle de ne pas les décevoir.

Cet espoir doit à présent s’incarner. Parmi les postulants à cette responsabilité, la Conférence nationale du Parti communiste a fait son choix sans ambiguïté. N’en déplaise à quelques-uns de nos camarades communistes, le talent et la force de conviction qu’il met au service des idées que nous toutes et tous, militantes et militants du Front de Gauche, voulons promouvoir au sein du programme partagé de gouvernement, font de Jean-Luc Mélenchon – compte tenu de la nature actuelle des institutions – le candidat de l’autre gauche le plus apte à porter les espoirs du changement auquel aspirent les Françaises et les Français. Nous lisons depuis ici ou là à son encontre, des commentaires peu amènes, parfois même blessants et pour tout dire indignes du respect que nous nous devons entre partenaires d’une même alliance.

C’est pourquoi nous affirmons que tout repli sur des intérêts strictement partisans de l’une ou l’autre des formations politiques composant le Front de Gauche porterait le risque d’un échec que nous n’osons imaginer. Dans les âpres négociations qui ont précédé la Conférence nationale du Parti communiste, le Parti de Gauche et la Gauche unitaire ont consenti à d’importants efforts afin de préserver l’union. Il appartient par conséquent désormais à chacune et à chacun de nos camarades communistes, en leur âme et conscience, de prendre leurs responsabilités dans le choix qu’ils feront bientôt du candidat commun qui aura l’honneur de porter les couleurs du Front de Gauche en 2012. Devant l’Histoire, ils en seront comptables.

Le Parti de Gauche de l’Eure

« Soutenez la première candidature altermondialiste à la tête du FMI »


(photo DNA)

Attac France a rendu publique hier la candidature de sa coprésidente Aurélie Trouvé à la direction du FMI (voir ci-dessous le communiqué de presse). Pour que celle-ci soit prise en compte, il faut qu'elle soit soutenue par un gouverneur du FMI d'ici vendredi 10 juin, date limite de dépôt des candidatures.
Un comité de soutien à cette candidature est nécessaire pour appuyer cette demande auprès des gouverneurs. Pour en faire partie, merci de transmettre vos coordonnées (nom, prénom, qualité) à l'adresse fmi@attac.org, ou en renseignant directement celles-ci sur le site d'Attac France
http://www.france.attac.org/soutenez-la-premiere-candidature-altermondialiste-la-tete-fmi
<http://www.france.attac.org/soutenez-la-premiere-candidature-altermondialiste-la-tete-fmi>

Le FMI joue un rôle décisif dans la régulation – ou plutôt l’absence de régulation – de la finance internationale. C’est pourquoi l’association Attac a décidé de proposer une candidature pour succéder à Dominique Strauss-Kahn.
Aurélie Trouvé, 31 ans, est maître de conférences en sciences économiques et coprésidente d'Attac depuis quatre ans. Elle est spécialiste des marchés agricoles, actuellement l’un des domaines de prédilection de la spéculation financière internationale. Elle bénéficie du soutien technique et politique du Conseil scientifique d’Attac, qui comporte de nombreux économistes spécialistes des questions financières. Si elle ne bénéficie pas encore du soutien officiel d’États, sa candidature suscitera l’intérêt de tous ceux, gouvernants ou citoyens, qui désirent remettre l’industrie financière à sa place, celle de soutien aux initiatives de l’économie réelle.

Depuis l’éclatement de la crise financière en 2008, ni le G20, ni le FMI, pas plus que le comité de Bâle ou les autorités nationales de régulation financière, n’ont pris de mesures pour réduire significativement l’instabilité des marchés financiers internationaux. La spéculation fait aujourd’hui rage sur les matières premières et les titres des dettes publiques.

Avec Dominique Strauss-Kahn, la politique du FMI a consisté, comme par le passé, à défendre inconditionnellement les intérêts des créanciers des États endettés, en imposant à ces derniers des plans d’austérité brutaux : Hongrie, Ukraine et Lettonie en 2008, Islande en 2009, Grèce, Espagne, Portugal, Irlande en 2010… Les banques et les fonds d’investissement sont les principaux bénéficiaires de politiques qui détruisent les solidarités sociales et mènent l’Union européenne au bord du gouffre.

Tout indique que Christine Lagarde fera encore pire que Dominique Strauss-Kahn. Christine Lagarde a été à la tête d'une technostructure du Ministère de l'Economie (Direction Générale du Trésor et Direction du Budget), composée de fonctionnaires ultralibéraux acquis aux intérêts financiers. C'est ainsi que la France a refusé en 2010 de soutenir l'Allemagne sur la question de l'interdiction de la spéculation sur les CDS (vente à nu à découvert). Les représentants de la France à Bruxelles ont toujours freiné les maigres initiatives de la Commission sur la régulation financière. Sur la question de la taxation des transactions financières, malgré le discours apparemment offensif de Nicolas Sarkozy, le ministère de Christine Lagarde s'est toujours refusé à produire des notes et études préparant une décision, et la France ne s'est jamais engagée réellement auprès de ses partenaires de l'Union européenne ou de l'Eurogroupe.

Aurélie Trouvé propose une réorientation fondamentale du FMI, partant du principe que la stabilité financière mondiale est un bien public qui doit être démocratiquement géré par la communauté internationale dans son ensemble. Son programme pour le FMI comporte donc :
- l’arrêt des plans d’austérité, et la mise en place d’une taxe sur les transactions financières et d’une stricte régulation des transactions sur les produits dérivés
- la coordination des politiques économiques au plan international, amenant les pays présentant des déséquilibres excessifs (Chine, Allemagne, Japon du côté des pays excédentaires, États-Unis du côté des pays déficitaires) à se rééquilibrer de façon coordonnée par des ajustements des taux de change ainsi que des politiques budgétaires et salariales actives ;
- le développement d’une monnaie internationale basée sur un panier des principales devises, comme alternative au dollar ;
- l’émission de Droits de tirage spéciaux pour aider les pays en difficulté durant la période de réduction des déséquilibres internationaux ou face à des chocs conjoncturels imprévus ;
- la démocratisation du FMI, par l’élargissement de son Conseil d’administration à tous les pays de la planète et l’intégration du FMI dans le système onusien, avec une voix pour chacun des 187 pays membres du Fonds : il s’agit d’en finir avec le pouvoir exclusif des grandes puissances.

C’est sur cette base qu’Attac a envoyé hier 1er juin 2011 au FMI la candidature officielle de Mme Aurélie Trouvé, 31 ans, économiste. Toute candidature doit être présentée par un des gouverneurs et administrateurs du FMI. L'association Attac compte sur le fair play de Christine Lagarde, actuel gouverneur du FMI pour la France.

communiqué d'Attac France

8 juin 2011

Je vous écris du fond de ma Bretagne…lettre à Martine Aubry


Je n'ai pas l'habitude de publier des commentaires anonymes. Mais celui ci-dessous exprime sans doute, même si je ne partage pas ces propos, une opinion assez répandue parmi les socialistes et quelques autres.

« Il est du devoir du PS de se mobiliser pour sensibiliser tout le monde au sort qui est réserve a DSK.
Je ne comprendrais pas que le PS le laisse ainsi traîner dans la boue sans rien faire.  Monsieur Dominique Strauss Kahn est un homme d'état et c'est a l'état de le tirer de là même s'il n'en a aucune envie. Et le PS devrait agir dans ce sens plutôt que de passer à autre chose. Comment, le meilleur candidat de toute la gauche est a terre par la volonté de ceux qui ont tout intérêt à ce qu'il soit éliminé de la course, et on ne fait rien pour lui ?
Pour le coup c'est notre sens de la justice qui est violé. Autour de moi personne ne vous soutiendra, Martine Aubry, si vous tournez la page aussi facilement. Ni vous, ni aucun autre candidat.
Vous auriez dû tout faire pour le rapatrier, sachant pertinemment que la "justice américaine " ne lui laissera aucune chance de s'en sortir , il y a tant d'intérêts en jeu , que ni l'intelligence de M. Strauss Kahn, ni celle de ses avocats , ni même sa fortune, ni même son innocence, ne réussiront à le sortir de là, j'en ai peur. Il est trop facile de dire "on s'en remet a la justice américaine " en feignant d'ignorer tous les enjeux qu'il y a derrière.

Appelons tous les français a se mobiliser lors d'une manifestation en faveur de DSK . Vous montrerez ainsi que vous croyez en son innocence. Ne voyez vous pas, Martine Aubry, que non contents de l'humilier , on cherche a le ruiner , à l'anéantir ?  Comment pourrait on croire a la justice américaine, qui va jusqu'à lui faire payer les policiers charges de sa surveillance.
Cette affaire me soulève le cœur car vous savez comme moi qu'il ne s'agit en aucun cas de prouver son innocence et que la réponse est ailleurs. Alors, vous seule, en tant que chef de parti, vous pouvez mobiliser tout le monde, et croyez moi vous en sortiriez grandie. Je vous écris du fond de la Bretagne où je suis entourée de gens indignés tout autant que moi. »

Gouverner face aux banques - I


« La France est en faillite. La France vit au-dessus de ses moyens : la dette explose. Face à la mondialisation, il n’y a pas d’alternative possible aux politiques menées par les pays occidentaux. Nous ne pouvons rien entreprendre qui s’oppose à l’Union européenne et contredise le Traité de Lisbonne dont nous sommes signataires. La crise est une fatalité, une sorte de maladie comme les humains en ont tous ; c’est un passage obligé. Etc. »

(Quentin Metsys)
Voilà résumés quelques uns des refrains de la petite musique qu’on nous diffuse partout en boucle à longueur d’année. Au point que pour beaucoup de nos concitoyens, il s’agit là de vérités indépassables. C’est ainsi. On ne peut rien faire contre car on ne peut aller contre le cours de l’histoire – dont, au passage, quelques uns nous avaient même annoncé la fin – ; et il faut faire avec. C’est la crise, donc il est normal que l’on demande à chacun de consentir à des sacrifices pour contribuer à l’effort collectif.

Eh bien non ! Cette crise, la énième dans l’histoire du capitalisme, pas plus que la mondialisation ne sont des fatalités. Elles sont la conséquence du choix d’un modèle économique voulu et imposé par des gouvernements élus, par des politiques délibérément choisies et par un système juridique et normatif qui en est l’outil. Ce modèle, c’est le système capitaliste financiarisé. Cette crise, c’est celle de ce système. Et dire qu’il n’existerait qu’une seule politique possible, celle que nous impose ce modèle, est évidemment complètement absurde.

Car tenir ce raisonnement, c’est reconnaître comme postulat qu’en tout et pour tout l’économique prime sur le politique. C’est donc avouer que le personnel politique est impuissant et condamné à accompagner le mouvement. Et c’est au bout du bout condamner à mort la démocratie faute de choix démocratique.

À cela nous ne pouvons nous résigner. Mais s’opposer à ce système, c’est s’opposer au mur de l’argent. Et sauf à en rester au stade des incantations et des vœux pieux, il faut s’en donner les moyens. C’est pourquoi depuis sa création le Parti de Gauche a réfléchi à cette question. En juin 2010, le Forum intitulé « Gouverner face aux banques » y était consacré. L’économiste Jacques Généreux en a été le maître d’œuvre. Après avoir posé le diagnostic de la situation, il a fallu formuler les principes de ce que serait une autre politique économique, au service de l’intérêt général et respectueuse de notre planète, puis définir à moyen terme quelle serait une réforme de la finance publique et privée qui permettrait de la faire vivre, tant au plan national qu’au plan européen. Enfin, et pour que la stratégie soit complète, il fallait aussi définir les moyens et les outils dont il faudrait se doter à très court terme car il semble peu probable que de simples négociations suffisent à convaincre l’oligarchie qui nous domine et qui place les intérêts privés au-dessus de tout, du bien fondé de la primauté de l’intérêt général.

C’est ce tout cela que nous allons tenter de vous rendre compte dans cette nouvelle série d’articles.

Reynald Harlaut
Parti de Gauche, membre du Front de Gauche

7 juin 2011

« Mélenchon est dans le formatage politique » par Alain Lefeez


André Chassaigne et Jean-Luc Mélenchon (DR)

La direction du PCF, traumatisée par le score de Marie-George Buffet (1,93%) à la présidentielle de 2007, a choisi de longue date de ne pas présenter de candidat et de s’en remettre à l’option Mélenchon sous le label Front de Gauche. Ce n’est pas une surprise, la Conférence Nationale du PCF s’est prononcée pour la candidature de Jean-Luc Mélenchon, à 63,6 % des voix. La composition de la Conférence assurait d’avance une majorité à la direction nationale du parti. Je n’ai jamais été favorable aux décisions prises d’en haut et je me réjouis donc que les militants du PCF aient tout de même le choix, le 18 juin prochain, de départager les trois derniers postulants de la primaire (même s’il ne faut pas l’appeler comme ça) : Emmanuel Dang Tran, seul candidat opposé à la stratégie du Front de Gauche, l’ogre médiatique Jean-Luc Mélenchon et son principal rival, André Chassaigne.

Au cours des dernières semaines, le mécontentement de nombreux communistes s’est exprimé de plus en plus fortement, dans les sections et fédérations du parti. Ce mécontentement s’alimente de plusieurs sources. A travers la candidature de Chassaigne, beaucoup de communistes défendent la nécessité que le PCF, et les idées du communisme, figurent au premier plan de la campagne électorale. Par ailleurs, la position de Mélenchon sur la guerre en Libye a choqué bon nombre d’entre nous. Mais même des camarades plutôt favorables à Mélenchon, initialement, ont eu le sentiment, parfaitement fondé, que la direction du parti cherchait à imposer cette candidature au détriment d’un débat pleinement démocratique, au sein du parti. Au final, si la Conférence Nationale avait adopté un bulletin de vote ne comprenant pas la candidature d’André Chassaigne, ça ce serait très mal passé à la base du parti. Et ni André Chassaigne, ni la direction nationale ne voulaient prendre la responsabilité de déclencher une crise interne sur cette question.

André Gerin a annoncé qu’il retirait sa candidature pour appeler les militants à voter André Chassaigne. A l’inverse, Emmanuel Dang Tran a annoncé qu’il maintenait sa candidature et le fait qu’il maintienne sa candidature apparaît comme une division qui risque de favoriser la candidature de Mélenchon. Dans les jours à venir, on entendra certainement l’argument suivant : « Si les militants communistes désignent Chassaigne, le Front de Gauche explosera ». Pourquoi ? Parce que Mélenchon maintiendrait tout de même sa candidature à la présidentielle. Il est vrai que Mélenchon l’a suggéré à plusieurs reprises. Mais ceci n’est pas vraiment un argument, c’est plutôt un chantage

Or, je me moque un peu de qui sera le candidat du Front de Gauche à la prochaine présidentielle, car quel que soit ce candidat, à l’issue du premier tour, l’un ou l’autre donnera exactement la même consigne de vote pour la suite. Pour ma part, j’ai toujours souhaité et soutenu la candidature d’André Chassaigne parce qu’il défend une alternative révolutionnaire au capitalisme en crise. Son  « programme populaire et partagé » comporte de nombreuses propositions positives. Mais la Conférence Nationale ne s’est concentrée que sur la question des candidatures, au détriment du programme. 

Pourtant la question du programme demeure absolument décisive. Aujourd'hui, dans la grande masse des citoyens, il y a une forme d'indignation et de rejet qui se manifeste par rapport à la politique institutionnalisée, super médiatisée autour de personnalités. Le Front de Gauche devrait montrer une autre façon de faire de la politique, très collective, un peu comme ce qui s'est passé lors du traité constitutionnel européen. Il n'y a pas ceux qui savent et ceux qui ne savent pas. Jean-Luc Mélenchon est dans le formatage politique en ce sens qu'on veut nous obliger à réduire la politique à des personnalités. Sa campagne est faite sur des prestations télévisées, sur des buzz, sur des coups de gueules. Cela peut paraître séduisant car médiatique mais je pense que cela ne correspond plus aux attentes d'aujourd'hui.

Alain Lefeez

6 juin 2011

Démocratie et socialisme : qui devra payer ? Le capital ou le travail ?

Démocratie et socialisme est un courant du Parti socialiste animé par Gérard Filoche. Il publie une lettre régulière que j'ai plaisir à rendre publique à mon tour :

« Loin de s’éloigner, la crise financière continue de ronger la zone euro. Une crise qui a transformé des dettes privées en dettes publiques, lorsque les états se sont portés au secours du système bancaire au bord de la faillite. Une crise que de nombreux Etats veulent maintenant faire payer à leurs populations… alors que les banques ont retrouvé leurs profits d’avant crise, et continuent allégrement leurs pratiques spéculatives.
L’exemple de la Grèce est frappant. La Banque centrale européenne et le Fonds monétaire international exigent toujours plus du peuple grec. Toujours plus d’austérité, encore plus de privatisation. La baisse des revenus, le chômage, la précarité entrainent tous les jours un peu plus ce pays dans la récession. Les spéculateurs (ce qu’en langage libéral, on appelle les marchés financiers) n’ont toujours pas l’assurance que la Grèce pourra rembourser, les notes des agences de notation sont jour à après jour un peu plus dégradées, et la Grèce trouve alors des emprunts à taux de plus en plus élevés. Cercle vicieux sans fin ! Le Portugal semble emprunter le même chemin. La théorie des dominos appliquée à l’Europe ?

Les Grecs fainéants ?

Pour la chancelière démocrate-chrétienne Angela Merkel, les raisons de cette situation sont simples. Elle s’en est prise à la mi-mai aux Grecs, Portugais et Espagnols tire-au-flanc. Pas de chance pour elle, selon les données de l’OCDE, la durée annuelle du travail est (chiffres de 2009) nettement moindre en Allemagne (1390 heures en moyenne) qu’en Espagne (1654 heures), au Portugal (1719 heures) et surtout en Grèce (2119 heures). Quant à l’âge effectif moyen de départ à la retraite, il est le même pour les salariés allemands (62,2 ans), espagnols (62,3 ans), portugais (62,6 ans) ou grecs (61,5 ans). La productivité par tête Outre-Rhin est dans la moyenne de l’Europe du sud. Quant à la productivité horaire, elle est au-dessus de la moyenne mais pas meilleure que celle de la Grèce(*). Angela Merkel a donc tout faux ! Elle oublie volontairement le rôle des grandes banques (notamment celles de son pays), mais aussi le choix fait par elle de baisse imposée du coût du travail afin de favoriser les exportations allemandes (politique qui, pour être « efficace », ne peut être mise en œuvre que par un seul pays).

Des plans d’austérité de plus en plus rejetés par les populations
Les manifestations et les grèves en Grèce, le mouvement des Indignés dans l’État espagnol commencent à inquiéter les milieux financiers. « Le risque de contagion des mouvements sociaux en Europe est un facteur supplémentaire d’aversion aux marchés d’actions » lit-on dans une note du courtier CMC Markets.(**).

La question de la dette publique sera aussi au centre de la présidentielle de 2012 en France. 
Résultat de la crise financière et de la politique de baisse des impôts pour les riches pratiquée par Sarkozy depuis 5 ans, la dette publique française sera-t-elle mise en avant par certains à gauche pour justifier à l’avance tous les renoncements ? En arrivant au gouvernement en 2012, un gouvernement de la gauche unie devra organiser un audit de la dette de la France. Les raisons de cette dette devront être débattues publiquement. Pourquoi faudrait-il rembourser la part de cette dette qui serait jugée illégitime car due aux pratiques spéculatives du capitalisme financier ? Débattons-en dès maintenant !

(*)Tous ces chiffres proviennent d’une étude du chef économiste de Natixis, Patrick Artus, cités par Le Monde du 2 juin
(**) Le Monde de l’économie du 31 mai

5 juin 2011

Trois mois après la catastrophe, rien n'est réglé à Fukushima


Trois mois après la catastrophe, rien n'est réglé à Fukushima, même si l'actualité médiatique l'a fait passer au second plan.
Les cœurs des trois réacteurs ont fondu, celui du réacteur 1 a percé sa cuve en plusieurs endroits, l'eau radioactive s'est écoulée vers l'océan depuis le réacteur 3. On se demande même si les réacteurs 1, 2 et 3 ne sont pas en train de tomber en miettes, leurs structures métalliques étant de plus en plus défaillantes après que celles en béton ont été ébranlées par les explosions dès les premiers jours et le 7 mai de la fumée est sortie du site, ce qui signifie que l'un des réacteurs est en feu. La pollution radioactive a atteint des pics au Bangladesh, au Botswana, sur la côte est des États-Unis.

Au japon, elle dépasse les zones d'évacuation et de confinement et elle atteint des niveaux  de 10 à plus de 100 millisieverts par an. Les normes de dangerosité  ont été multipliées par 20 et l'incapacité du gouvernement japonais à appliquer la loi face au lobby nucléaire a conduit son conseiller scientifique, le Professeur Toshiso Kosako à démissionner les larmes aux yeux devant tant de gâchis et d'absurdité.
Pendant combien de temps va-t-il falloir continuer à refroidir les lieux en accumulant toujours plus d'eau contaminée qui devra être rejetée dans l'environnement.
En France, le lobby ne désarme pas et compte bien poursuivre dans cette voie dangereuse et coûteuse au lieu de changer de politique énergétique.
Pour que Fukushima ne subisse pas le même traitement de mensonges et d'omerta que Tchernobyl, pour arrêter la poursuite insensée et irresponsable de la politique nucléaire, pour que la France rejoigne les pays qui ont su y renoncer, venez manifester nombreux à l’appel du réseau « Sortir du nucléaire » le samedi 11 juin à Paris. Rendez-vous à 14 h 30 place de la République à Paris. Résistons au lobby du nucléaire !
(communiqué de SDN 27)

 

Les Français majoritairement favorables à une sortie progressive du nucléaire

Selon un sondage de l'Ifop publié dans le Journal du dimanche daté du 5 juin, plus de six Français sur dix (62 %) expriment leur préférence pour un arrêt progressif "sur 25 ou 30 ans" du programme nucléaire hexagonal et de ses centrales. Selon cette enquête, 15 % se prononcent pour un arrêt rapide du programme nucléaire français et 22 % sont au contraire favorables à sa poursuite et à la construction de nouvelles centrales. Une majorité de sondés, 55 %, ne ressent pas d'inquiétude à l'égard des centrales nucléaires françaises, contre 45 % qui se disent préoccupés. Ce sondage a été réalisé après la décision de l'Allemagne d'abandonner l'énergie nucléaire dès 2022.

Je me méfie des sondages comme j'ai une peur bleue des referendums. Les résultats des sondages dépendent souvent des questions posées, du contexte émotionnel dans lequel ils sont réalisés et des marges d'erreur des différents instituts ainsi que des redressements opérés. Quant au referendum, il s'agit d'un exercice antidémocratique de fausse démocratie directe. Chacun sait qu'on ne répond pas à la question mais à celui ou celle qui la pose et je n'en finis pas de regretter d'avoir dit NON au général de Gaulle quand il voulait supprimer le sénat où la représentation des ruraux domine celle des urbains depuis des décennies et fausse la démocratie puisque cette assemblée vote aussi la loi !

Revenons au sondage sur le nucléaire. Evidemment, la catastrophe de Fukushima succédant à celle de Tchernobyl nous incite, tous et toutes, à regarder le problème du nucléaire avec plus d'attention et une prudence de siou. Un ami me disait, récemment, qu'avec le principe de précaution, il n'y aurait ni voiture ni avion puisqu'on déplore des accidents. Le nucléaire soulève bien des questions : environnementales, économiques, scientifiques…et sécuritaires. Le drame de Fukushima démontre que les experts les plus avertis n'avaient pris en compte la possibilité d'un tsunami exceptionnel. Par définition, l'exceptionnel surprend et nous incite donc à beaucoup de modestie.

Le sondage du journal du Dimanche indique que les Français(e)s sont conscients des difficultés et de l'incertitude liée à une technologie dont tout démontre qu'on ne la maîtrise pas totalement. Ils savent que l'Etat, EDF, Areva, ont partie liée pour défendre un choix opéré dans les années soixante et répondant à une logique centralisatrice bien en osmose avec la pensée gaulliste dominante à l'époque. Finalement, les centrales nucléaires sont la conséquence logique de la dissuasion nucléaire. On utilise le même argument : l'indépendance ! Celle de la nation et celle des énergies. Le monde globalisé dans lequel nous évoluons doit tout de même nous inciter à réviser notre manière de voir le monde et d'assumer une responsabilité collective plus large que celle du seul hexagone. Je l'avoue, ce sondage dominical me fait plaisir.

« Dans “capitalisme vert”, le problème, ce n’est pas le mot vert ! »


© Pascal Rossignol / Reuters et Mousse/Abaca / Montage Le Point.fr

Décidément, suivre aveuglément les experts en communication pour organiser la campagne d’un parti politique ou promouvoir des candidats est un exercice risqué. Europe-Écologie – Les Verts en font aujourd’hui la malheureuse expérience. En décidant de confier la candidature de leur parti à des personnalités sans grande expérience politique et sans véritable colonne vertébrale idéologique, mais médiatiquement reconnues, EELV essuie les unes après les autres diverses déconvenues.

Ce fut d’abord Eva Joly dénonçant il y a peu « l’arrogance avec laquelle les Irlandais avaient refusé de ratifier par leur vote le Traité de Lisbonne en 2008 ». En inscrivant le credo du néolibéralisme dans ce qui n’est ni plus ni moins que la copie conforme du Traité constitutionnel européen de 2005, le Traité de Lisbonne interdit tout interventionnisme des États dans la sphère économique, au nom de la sacro-sainte concurrence libre et non faussée. Or, la conversion de l’économie pour la rendre compatible avec les objectifs relatifs au réchauffement climatique ne peut être mise en œuvre sans une politique volontariste des États, interdite par le Traité de Lisbonne. Il ne peut exister de « capitalisme vert » comme voudrait nous le faire croire Daniel Cohn-Bendit.

Ce fut ensuite au cours de la première journée du congrès de La Rochelle Nicolas Hulot qui a semé le trouble en avouant publiquement avoir récemment envisagé un « tandem » avec Jean-Louis Borloo. On sait à présent qui est Borloo et où il se situe politiquement. Ces deux déclarations, venant de personnalités qui chacune dans leur domaine de compétence, ont acquis une notoriété incontestable, sont pourtant porteuses de la négation de ce que fut l’idée fondatrice des Verts : l’écologie politique.

Eva Joly comme Nicolas Hulot n’ont toujours pas compris qu’il n’est pas possible de négocier avec l’oligarchie qui dirige le monde : les forces économiques d’une poignée de sociétés transcontinentales et le capitalisme financier qui poursuivent un seul but : croître et s’enrichir le plus possible et le plus rapidement possible, au bénéfice de quelques uns et au détriment du plus grand nombre. Ces belles personnes n’ont évidemment, quoiqu’elles puissent en dire, aucun égard pour notre planète. Croire, comme on l’a fait en France avec le grotesque « Grenelle de l’Environnement », qu’il suffit de faire asseoir ensemble autour d’une table ces personnes ou ces groupes aux intérêts antagonistes pour que, par la magie de la seule discussion aboutissant au consensus, tous les problèmes soient résolus, tient d’une naïveté affligeante. La planification écologique, qui est un des axes majeurs de réflexion du Parti de Gauche depuis sa création ne pourrait se faire sans contrevenir à certaines des dispositions du Traité de Lisbonne et donc sans affronter le capitalisme qui en est l’inspirateur.

Seul compte en la matière le rapport des forces en présence. La légitimité que donnerait la souveraineté du peuple exprimée par une victoire dans les urnes permettrait de commencer d’établir ce rapport de forces. Tout le reste n’est que fables et autres billevesées. La seule question qui vaut est la suivante : pour accomplir le virage écologique indispensable à la préservation de l’humanité, comment franchir le mur de l’argent qui constitue le rempart derrière lequel est installé le capitalisme ? Et comment ensuite l’affronter sans recourir à la violence ? Si l’on en croit certains économistes – Pierre Larrouturou*, expert d’EELV est de ceux-là –, le rempart ne serait plus aujourd’hui constitué de lingots d’or, mais de vulgaire papier-monnaie sans valeur aucune tant les États-Unis ont, au cours des dernières années, fait fonctionner la planche à billets. Des milliers de milliards de dollars circulent en permanence au-dessus de nos têtes qui n’ont aucune contrepartie réelle. Il se pourrait donc que ce mur de l’argent s’effondre tout seul avant longtemps. Il est malheureusement à craindre que la crise qui en résulterait, telle la vague d’un tsunami, emmènerait tout sur son passage, capitalisme vert compris.

Reynald Harlaut
Parti de Gauche, membre du Front de Gauche

* Pierre Larrouturou, « Pour éviter le krach ultime », Éditions Nova, Paris, 2011