Ernest Martin, Henri Fromentin et Gérard Martin. (photo JCH) |
L’émission de France Culture
« La fabrique de l’histoire » diffusée le matin entre 9 et 10 heures est célèbre.
Emmanuel Laurentin, son producteur, veille à ce que des reportages soient
connectés à une actualité historique en lien avec les événements sociaux, économiques,
politiques, de notre temps. Ainsi, Séverine Liatard, productrice déléguée et
journaliste au sein de la chaine publique, est elle venue à Louviers (et autour
de Louviers) sur les traces du comité d’Action de gauche et d’Ernest Martin
initiateurs d’une politique originale privilégiant les services publics dans
toute leur diversité. Accompagnée d’un technicien du son et d’une assistante, Mme
Liatard a souhaité consacrer une émission à ce Louviers d’hier et rencontrer d’anciens
membres du CAG survivants d’une époque épique qui, de 1965 à 1983, ont vécu de
près ce qu’Hélène Hatzfeld a appelé « les inventions citoyennes à Louviers ».
Monique Morelli à la salle des fêtes |
Rendons justice à Hélène
Hatzfeld. C’est grâce à son livre (1) et sa remarquable analyse des événements
lovériens vus au prisme d’une chercheuse spécialiste des mouvements ouvriers et
de la démocratie directe que Séverine Liatard a découvert la route de Louviers
qu’avaient, avant elle, empruntée Pierre Mendès France et les partisans de l’autonomie
communale. L’occasion me fut donc donnée de relire et de remettre au goût du
jour le Manifeste de l’Union des Gauches qu’avait rédigé en mars 1965 le
Docteur Ernest Martin quelques jours avant le second tour des élections
municipales qui le virent prendre la tête d’une liste d’union appelée à battre
la liste Montagne. Ce document unique est d’une actualité brûlante. Il produisait
avant l’heure une pensée aussi classique que moderne plaçant le citoyen dans l’axe
central des préoccupations. Du citoyen comme homme et femme libre mais aussi de
la jeunesse, dont l’avenir devait être construit par l’éducation et la
formation si essentielles aux yeux de l’ancien président du Conseil et du maire
d’alors dont l’aventure prit fin en 1969 après une trahison de ceux (le PCF)
qui aurait dû soutenir mordicus la politique conduite.
Les trois grandes périodes
du programme d’action du Dr Martin et de ses amis doivent être restituées ainsi :
1965-1969, théorisation pratique de l’union des gauches et de ses principes,
1969-1976, combat idéologique contre une droite dure, 1976-1983, mise en
pratique de la notion de services publics à accès libre dans toutes les dimensions
de l’action locale avec le renfort d’Henri Fromentin, doté d’une volonté au
moins aussi puissante que celle de son premier adjoint.
Ce qui frappe, c’est l’actualité
de cette pensée. Alors que des gilets jaunes qui « ne sont rien » comme dirait
Emmanuel Macron, exigent une reconnaissance, une dignité et de meilleures
conditions de vie, la geste du CAG resurgit pour rappeler que les élus, à tous
les niveaux de responsabilité : local, régional, national, ne doivent pas
se contenter des rythmes électoraux. Pour être vivante, la démocratie doit constamment
s’appuyer sur les associations, les corps « intermédiaires », les élus devenant
les réceptacles des revendications individuelles ou collectives. Sans nier,
certes, le programme pour lequel ils ont été choisis puisque les élus sont tout
de même là où ils sont pour agir au service du bien public et de l’intérêt général
à toujours placer au-dessus des
intérêts individuels.
A Louviers, Séverine Liatard
m’a entendu puisque j’ai eu l’honneur de rappeler ces souvenirs si vivants,
Reynald Harlaut (dessins affiches), Sabine Anquetin (service famille), François
Bureau (adjoint), ainsi qu’Isabelle Martin (fille d’Ernest, très engagée auprès
de son père et de ses idées) et le couple que forment Simone (animatrice d’ateliers
d’expression libre et Jacques Etienne (architecte). Tous et toutes ont participé
à la belle aventure lovérienne à une période où la solidarité politique s’appuyait
sur des hommes et femmes exceptionnel(le)s qui formaient une équipe solide aux
origines multiples. La date de diffusion de « La fabrique de l’histoire » à la
mode lovérienne n’est pas encore connue. On sait qu’elle aura lieu au mois de
janvier…le 14, le 17…ou à une autre date. Je ne manquerai pas de signaler sur
ce blog le rendez-vous que nous propose France Culture, une chaîne du service
public dont l’audience ne cesse de croître à l’image de choix éditoriaux
courageux.
(1) « La politique à la ville » inventions citoyennes à Louviers (1965-1983) éditions PUR.
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