Le chantier des voies piétonnes du centre-ville a causé la perte du pouvoir du CAG aux élections de 1983. (photo JCH) |
Nous sommes nombreux(ses) à
avoir vécu la belle aventure — car c’en fut une — du comité d’Action de Gauche
de Louviers. Créé après la défaite de la liste Martin aux municipales de 1969,
inspiré par l’exemplarité de la politique municipale d’Ernest Martin, ancien
maire de 1965 à 1969, le comité d’Action de Gauche a été l’initiateur de
combats aussi divers que ceux engagés en faveur de la libre expression, par
exemple, et de l’accès libre pour tous aux équipements collectifs.
Quand je lis, aujourd’hui,
sous la plume de Pierre Lescure, chargé d’un rapport sur la culture et adressé à
Aurélie Filipetti, ministre de François Hollande, que « la gratuité est contre-nature » je me dis que, décidément, des
hommes dits de gauche peuvent être animés des meilleurs sentiments du monde
mais que leur idéologie et leur manière de voir la vie respirent le libéralisme
à plein nez. Pour se cultiver, il faut payer. Pour acheter son beefsteak aussi,
tout comme pour aller à la piscine. Payer, toujours payer. C’est ce droit
payant, ce droit à « consommer » que nous souhaitions à cette époque remettre
en cause. C’est cet accès forcément ségrégatif que nous souhaitions supprimer.
Au bénéfice des enfants de familles modestes, surtout, mais surtout au bénéfice
de tous les enfants de Louviers.
Le mot de gratuité ne
convient d’ailleurs pas. Car rien n’est gratuit. Construire une piscine et la
faire fonctionner coûte évidemment de l’argent. Mais si l’on veut qu’un maximum
d’enfants apprennent à nager, continuent de faire du sport durant toute leur
vie et s’épanouissent collectivement, la communauté doit faire un effort. Cet
effort c’est l’impôt. L’impôt redistributeur que tout un chacun devrait
contribuer à alimenter en fonction de ses moyens et de ses besoins. Et sans
barguigner.
L’action du Comité d’Action
de gauche et son programme ont servi de tremplin programmatique et électoral à
la liste conduite par Henri Fromentin. Une municipalité dite autogestionnaire a
géré les affaires de Louviers de 1976 à 1983. C’est cette action qu’Hélène
Hatzfeld, chercheuse au CNRS, scrute depuis plusieurs mois, analyse, mêlant
entretiens avec les acteurs de l’époque et consultation des documents qu’elle a
sous la main.
Sur ses conseils, j’ai fait
don au service des archives municipales lovériennes de l’ensemble des archives
personnelles que je possédais. Si j’écris cet article, c’est pour inciter tous
les témoins, acteurs, amis, élus, à en faire autant et pour qu'ils alimentent par leur don (1)
la connaissance et le savoir liés à l’action de cette municipalité
Fromentin-Martin. Je peux comprendre le déchirement affectif ressenti à l’idée
d’abandonner les traces d’une période individuelle et collective très riche. Je
veux pourtant espérer que chacun et chacune d’entre nous se soucient plus de l’avenir
que du passé. Le travail d’Hélène Hatzfeld sera une pierre de plus au récit
municipal lovérien. Il est de notre devoir de l’aider et d’alimenter les archives
municipales afin que les futures générations comprennent combien dès cette époque,
la citoyenneté active était un vrai marqueur de la gauche solidaire.
(1) Les personnes qui
souhaitent faire don de leurs archives personnelles (journaux, photographies,
affiches, textes divers) peuvent m’adresser un commentaire en précisant leurs
coordonnées. Je prendrai ensuite contact avec elles pour assurer une
transmission officielle au service d’archives municipal.
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