Edwy Plenel, directeur de Médiapart. (photo JCH) |
Jérôme Cahuzac n’a que trop attendu.
Il aurait dû démissionner en janvier quand Médiapart a lancé la petite bombe
qui continue d’exploser. Tant que Jérôme Cahuzac n’est pas déclaré coupable par
un tribunal, il doit être il est vrai, considéré comme un citoyen innocent.
Mais le parquet de Paris — il vient d’ouvrir une information judiciaire pour
blanchiment de fraude fiscale — est dorénavant sûr à 95% que l’enregistrement
que détenait Michel Gonelle (UMP) est fiable et non trafiqué. Et que par conséquent,
c’est bien Jérôme Cahuzac lui-même qui évoque l’existence d’un compte UBS en
Suisse et que « ce n’est pas la banque la
plus planquée. »
Un juge d’instruction va être
désigné pour enquêter sur cette affaire de blanchiment de fraude fiscale et de
fonds dont l’origine pourrait bien être ceux versés par des laboratoires
pharmaceutiques à une période où Jérôme Cahuzac dirigeait un cabinet conseil.
Attendons les prochains épisodes d’un feuilleton qui ne fait que commencer.
On peut tirer, d’ores et déjà,
plusieurs leçons de cette affaire naissante.
A tout seigneur tout
honneur, saluons l’enquête des journalistes de Médiapart. Fidèles à leur pratique
relativement récente (Médiapart n’a que cinq ans d’existence) mais déjà éprouvée
(1) Edwy Plenel, Fabrice Arfi et tous les journalistes dans l’action prouvent
qu’une presse libre, indépendante, courageuse, peut apprendre au public des
faits et des comportements liés à l’exercice de la démocratie. Un ministre du
budget et de gauche peut-il être celui par qui un scandale de fraude fiscale
arrive ?
Si la réponse est évidente,
elle aurait dû l’être beaucoup plus tôt pour François Hollande. La président de
la République a cru (ou fait celui qui y croyait) les affirmations péremptoires
de son ministre : « jamais je n’ai eu de compte à l’étranger ! » Face
à une accumulation de faits troublants, François Hollande aurait dû demander à
Jérôme Cahuzac de se démettre en janvier non par culpabilité mais par volonté
de préserver la crédibilité de l’exécutif.
La situation de Jérôme
Cahuzac ? Redevenu un citoyen ordinaire, il va se défendre comme un
citoyen ordinaire. Autrement dit, il ne sera plus entravé par sa position de
ministre ni par la tentation de se servir du pouvoir pour retarder l’action
judiciaire. J’ignore, évidemment, quelle sera la suite du feuilleton et je
prends même le pari que Jérôme Cahuzac sera réélu triomphalement (sauf s’il était
déclaré inéligible avant mars 2014 et définitivement) à la mairie de
Villeneuve-sur-lot. Les Tibéri, à Paris, condamnés récemment à une inéligibilité
pour des faits remontant à 1995 vont se pouvoir en cassation et se présenter
aux élections de 2014 ! 19 ans après les faits, les Tibéri continuent leur
besogne…
Sans triomphalisme, je
souhaite noter que malgré les attaques des Apathie, des médias parisiens, Médiapart
a maintenu son cap et sort grandi de cette affaire. Depuis le départ, je suis
de ceux qui défendent Médiapart, non par corporatisme mais par la certitude que
des moyens d’informations non conformistes sont absolument indispensables dans
une démocratie toujours en danger.
Enfin, comme militant socialiste,
je ne peux que déplorer l’existence d’une pareille affaire. Quand on milite à
gauche, on attend des dirigeants de gauche, socialistes notamment, moins d’arrogance
et moins d’obsession pécuniaire.
(1) Médiapart est l’organe d’information
responsable des affaires Bettencourt-Woerth et Takiedine-Karachi. Ce n’est pas
rien.
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