Communiqué de Terra eco :
« La France pourrait imposer une taxe
Tobin, sans attendre ses voisins ni menacer son économie. C'est ce que montre
un rapport de l'ONG Unitaid. Assez pour convaincre nos dirigeants ? Non. «
Terra eco » vous explique pourquoi.
Repoussée par le président de la République pendant longtemps, la taxe Tobin pourrait être adoptée très rapidement, avant l’élection présidentielle, révèleLibération. Selon le quotidien, le chef de l’Etat serait prêt« à partir seul » et à laisser la chancelière allemande Angela Merkel « sur le quai ».
Repoussée par le président de la République pendant longtemps, la taxe Tobin pourrait être adoptée très rapidement, avant l’élection présidentielle, révèleLibération. Selon le quotidien, le chef de l’Etat serait prêt« à partir seul » et à laisser la chancelière allemande Angela Merkel « sur le quai ».
« Le montant annuel des transactions financières dans
le monde représente 60 fois la richesse mondiale. Cela montre bien que l’essentiel
des richesses aujourd’hui sont des richesses financières, réparties de manière
très inéquitable, et que c’est là que la fiscalité doit peser. »
Difficile à
croire, mais c’est bien le très libéral Jean-Pierre Jouyet qui scandait ces
mots, le 14 septembre, au siège de l’Unesco. Le président de l’Autorité des
marchés financiers (AMF) intervenait après la publication d’un rapport explosif de l’ONG Unitaid.
— Une taxe sur les transactions serait trop complexe à mettre en place
techniquement : FAUX
« Il suffit d’ajouter une ligne de filtre dans les
logiciels existants et la taxe serait instaurée. »L’argument des difficultés techniques est balayé au
micro par Arielle de Rothschild, gérante de la banque du même nom et présidente
de Care France. Euroclear, l’organisme qui enregistre les transactions en
France, pourrait très facilement instaurer une taxe et reverser les fonds à un
organisme chargé de sa gestion.
— A l’échelle de la France ce genre de taxe ne rapporterait pas grand chose :
FAUX
Que nenni ! A l’échelle
de l’Hexagone, elle permettrait de lever 12 milliards et demi d’euros. Soit légèrement
plus que les gains visés par le plan d’austérité voté dans la
douleur par les parlementaires au début du mois. Avec
une telle taxe, le voisin allemand toucherait lui 16 milliards, l’Union européenne
dans son ensemble 76 milliards et l’intégralité des pays du G20 265 milliards.
—
Si la France y va seul, cette taxe serait dangereuse pour son économie : FAUX
Le rapport
montre que plusieurs pays ont mis en place des taxes de ce type. Même l’Angleterre
en a une - la Stamp duty reserve tax
certes pas très sévère puisqu’elle ne touche que 20% des transactions. Les
auteurs ont étudié ces exemples et conclu qu’à taux très faible, l’incidence de
cette taxe est nulle : les investisseurs ne réduisent pas outre mesure leur
nombre de transactions, et ne sont pas tentés de passer par un pays étranger
pour échanger leurs actions. « Il n’y
a aucun risque que cela mette à mal le financement de l’économie réelle.
Contrairement à ce que l’on croit, ça aiderait la stabilité financière, ça
calmerait même un certain nombre d’opérations comme les transactions à haute fréquence expose par ailleurs Jean-Pierre
Jouyet. Le débat est clos !
Cette taxe n’a
donc rien d’utopique. « Elle
pourrait être mise en place dès l’automne, lors du vote du projet de loi de
finances 2012 », confirme Alexandre Naulot, d’Oxfam. Une promptitude qui
pourrait sembler logique, tant les discussions menant à l’adoption d’une taxe
européenne pourraient prendre de temps. Par ailleurs Nicolas Sarkozy a maintes
fois vanté les mérites de cette taxe, l’Assemblée nationale a voté en
août dernier une résolution en ce sens, enfin le ministre de l’Économie François
Baroin a défendu cette taxe avec son homologue allemand
Et pourtant les
dirigeants français interrogés par Terra eco rechignent. Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l’Écologie,
botte en touche sur l’hypothèse d’une taxe franco-française. Après avoir répété
que nous vivons « un moment critique
pour les financements innovants », elle dit préférer « attendre les conclusions des processus en
cours ». En clair, une décision européenne. D’ailleurs, elle croit pouvoir
rallier nos voisins à cette taxe, en faisant des efforts sur les autres
financements innovants comme la taxe sur les émissions des avions.
Très ardent à
la tribune, Jean-Pierre Jouyet se refuse aussi à évoquer l’idée d’une taxe française.« Il y a des expériences de taxes nationales
qui sont intéressantes mais c’est un autre sujet. Pour ma part, je souhaite qu’a
minima ce soit une taxe européenne. » Sauf que les Britanniques
risquent de bloquer le processus. Alors pour commencer, on pourrait « montrer l’exemple dans la zone euro »,
précise M. Jouyet. Contacté par Terra
eco, le cabinet de François Baroin n’était lui pas en mesure de commenter
ce rapport mercredi.
Seule consolation, des proches des négociations
confirment que la France pourrait se jeter à l’eau si un groupe de pays leaders, composé, par exemple, de l’Allemagne, de l’Italie
mais aussi de l’Afrique du Sud ou du Brésil se lancent avec elle. C’est ainsi
qu’a été lancée en 2005 la taxe sur les billets d’avions adoptée aujourd’hui par 25 pays. Mais en cas d’échec,
il faudrait effectivement attendre l’unanimité de la Commission européenne ou
du G20, et croiser les doigts pour que cette taxe soit allouée aux Objectifs du millénaire
et non au budget des États ou de l’Union européenne. Il y a quarante ans, l’idée de cette
taxe germait dans l’esprit de James Tobin. Les ONG pourraient
patienter encore de longues années avant de la voir éclore. »
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