17 août 2010

Il faut battre le fer quand il est chaud

Jean-Jacques Urvoas (photo le Télégramme de Brest)

Christian Estrosi, maire de Nice et ministre de l'Industrie, fait le malin. En accusant les maires, surtout ceux de gauche évidemment, de se montrer indifférents aux problèmes posés par l'insécurité dans les villes, il les provoque et les place aussi devant certaines de leurs contradictions. Au-delà du caractère totalement inique de ses propos (1) le maire de Nice agit en service commandé reprenant des « éléments de langage » élaborés dans le cabinet privé de Nicolas Sarkozy et destinés à disqualifier la gauche tout en renforçant la tentative de pêche aux voix des électeurs du Front national.

Quand je parle des contradictions de la gauche, je veux parler de ces maires qui, par leurs pratiques, leurs discours et leurs choix, agissent comme des maires de droite. Il est évident que même si c'est parfois difficile, la gauche n'a jamais intérêt à renier ses valeurs et ses principes. Pour être crédibles sur le long terme, il faut s'accrocher à ce que l'on croit et défendre ses idées bec et ongle. Quand des maires de gauche cautionnent la vidéosurveillance ou l'usage des tasers, ils se situent sur un terrain qui n'est pas le leur et contribuent à une confusion des idées. C'est pourquoi, d'ailleurs, nous sommes amers quand des hommes et des femmes de gauche braconnent sur les terres traditionnelles de la droite.

A Louviers, par exemple, il est évident qu'il n'y a pas l'épaisseur d'une feuille de papier à cigarette entre ce que fait le maire dit de gauche et ce que ferait un maire dit de droite. La généralisation de la vidéosurveillance entretient le climat voulu par Nicolas Sarkozy : une suspicion permanente, une peur quotidienne. Tout cela sans aucun résultat. Et à un coût démesuré !

La gauche, comme le dit bien Jean-Jacques Urvoas, responsable de la sécurité au Parti socialiste, ne doit pas entonner les chants guerriers de la droite et de l'extrême droite. Elle doit, selon lui, assumer ses choix : la prévention, la proximité, la médiation et la répression bien évidemment indispensable…Elle doit inscrire son action et ses propositions dans la droite ligne des textes fondamentaux : notre constitution, la déclaration des droits de l'homme, la devise de la République et la durée.

Les Français ne sont pas des imbéciles même si le président les considère comme tels. Ils sont rétifs aux propositions de déchéance de la nationalité française surtout quand celles-ci sont inconstitutionnelles. Une importante majorité d'entre eux constate l'impasse dans laquelle est enfermé Nicolas Sarkozy. Après huit ans de présence au pouvoir, la violence aux personnes a augmenté (2) la fracture sociale est de plus en plus importante dans certains quartiers et certaines villes et, surtout, le Front national se trouve renforcé dans ses choix. La lepénisation des esprits a gagné l'Elysée. L'idée républicaine risque de reculer.

On nous dit que Sarkozy ne mettra jamais en œuvre ce qu'il propose. Que ce sont des mots. Rien que des mots. On nous dit que ce phraseur adapte son discours au moment, au contexte. Qu'il dit tout et son contraire, qu'il ne tient aucune de ses promesses. Si fait. Ces agressions verbales contre les maires suscitent des critiques légitimes à gauche, bien sûr, mais aussi à droite. Jacques Pélissard, le président de l'association des maires de France, membre de l'UMP, n'a pas du tout apprécié la mise en cause venant d'Estrosi ni ses menaces de faire condamner les « mauvais » maires. Déjà qu'ils veulent supprimer les allocations des « mauvaises » mères…

Depuis le discours de Grenoble (un tournant du quinquennat ?) le clan sarkozien se relaie sur les ondes pour marteler ses vérités. Paillé, Bertrand, Hortefeux, Guéant, Morano…ils y vont tous de leur couplet répressif. le PS annoncera ses propositions en…janvier 2011 ! Dans cinq mois ! Je suggère aux ténors de la gauche de ne pas attendre si longtemps pour organiser la riposte. Il faut battre le fer quand il est chaud.

(1) la sécurité est une affaire régalienne. C'est donc à l'Etat de se donner les moyens de mener une politique policière et judiciaire digne d'une démocratie avancée.
(2) le président et le ministre de l'Intérieur vantent sans cesse des statistiques soi-disant avantageuses. En réalité les violences aux personnes ont très sensiblement augmenté ces dernières années.

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