14 mai 2010

Loi sur le voile intégral : la conviction contre la répression

Le Conseil d'Etat vient de donner un avis consultatif sur l'interdiction «intégrale» du port de la burqa ou du niqab sur le territoire national. Il confirme que le gouvernement va très loin, trop loin. Le projet de loi soumis à l'avis de la docte assemblée confirme qu'il devrait être impossible au législateur d'imposer une interdiction totale quel que soit l'espace public dans lequel une porteuse de voile évoluerait.

François Fillon se contrefout de l'avis du Conseil d'Etat. Il prend le risque d'une déclaration d'inconstitutionnalité par le conseil idoine mais parie qu'il ne se trouvera pas 60 parlementaires pour saisir ce dernier. Et s'il se trompait. Si, ce que je souhaite, 60 députés et sénateurs osaient braver la certitude de ce M. Fillon décidément bien imprudent. En voulant jouer la stigmatisation de l'Islam, on aboutit à des profanations de tombes ou à des tirs de fusil automatique sur une mosquée. On aboutit à désigner des boucs émissaires et à conforter les racistes et les xénophobes dans ce qu'ils ont de plus exécrable.

Fillon a déclaré qu'il allait passer outre l'avis du Conseil d'Etat. J'espère que les députés socialistes ne vont pas tomber dans le piège qui leur est tendu et approuver une loi qui ne concerne qu'une infime minorité de nos compatriotes. Contrairement à ce que j'entends, il ne s'agit pas de choisir entre liberté et oppression mais bien d'opter pour la conviction contre la répression. Viendra le temps où les femmes voilées, consentantes ou obligées, découvriront le bonheur d'aller et venir librement, et vêtues comme telles.

4 commentaires:

Denis a dit…

Je ne comprends pas ta position. Ces femmes sont-elles libres lorsqu'une minorité de personnes et/ou la pression sociale qui s'exercent sur elles les poussent à se voiler ?

On ne peut pas se réclamer de l'universalisme et accepter que, dans notre pays et ailleurs, des femmes puissent ne pas apparaître sous leur vraie visage. Pourquoi ? Parce qu'elles seraient le "diable" ? Cela nous renvoie au pire des obscurantismes.

Ce n'est pas parce que d'autres instrumentalisent cette question que nous devons refuser la loi. Pour ma part, je suis pour l'interdiction du voile intégral dans l'espace public au nom des valeurs de notre République, au nom de notre modèle d'intégration. Il s'agit, au travers de cette loi, de s'opposer au communautarisme rampant que certains d'entre nous finissent par accepter ! Au nom de la liberté ? Oui, mais laquelle ? Celle de ces femmes ? Drôle de conception de la liberté dans ce cas !

Jean-Charles Houel a dit…

« Il y a quand même d’autres problèmes en France, non ? Des boîtes qui ferment, la misère pour une partie de la population. Alors la burqa, je pense que beaucoup de gens s’en moquent. C’est un débat qui nous est imposé.
Mais cela n’intéresse pas grand monde et concerne 2 000 femmes au maximum. Attention, je ne veux pas jouer à l’exilé américain qui juge les autres lorsqu’il rentre dans son pays. Mais franchement, parler de la burqa pendant des semaines, c’est beaucoup, c’est dur. »
Yannick Noah dans le Parisien

Jean-Charles Houel a dit…

Mon avis. Je pense que le problème de la Burqa entre dans le cadre d'une stratégie plus large qui consiste à stigmatiser une partie de la population. Burqa et débat sur l'identité nationale ne font qu'un. C'est si vrai que nombre de policiers annoncent d'ores et déjà que si la loi est votée et constitutionnalisée, elle sera inapplicable. Ils précisent, non sans bonne raison, qu'exiger d'une femme qu'elle ôte son voile génèrera des violences, des protestations, des émeutes. La burqa n'est pas une prescription religieuse mais l'interdire intégralement sera ressentie comme une humiliation puisque c'est cela qui est derrière cette loi. Le texte et l'esprit du texte.

Denis a dit…

@Jean-Charles


Je suis d'accord, avec toi, sur le fait que nous avons d'autres chats à fouetter. Je l'avais d'ailleurs écrit.


C'est mon seul point d'accord. Sur le fond, je crois qu'il faut statuer le plus rapidement possible sur cette question.