29 novembre 2009

La complexité, un obstacle à la démocratie !

J'ai assisté pendant une heure trente (sur les trois heures prévues) à la réunion d'information organisée par l'Association normande des communautés de France au cinéma Grand Forum sur la réforme des collectivités territoriales. Les organisateurs avaient vu grand, trop grand sans doute, dans la mesure où les seuls présents étaient des élus de la CASE ou d'autres communautés de communes plus lointaines. Les citoyens n'avaient certainement pas compris l'intérêt d'une rencontre consacrée aux projets de réformes du gouvernement concernant l'organisation territoriale et la taxe professionnelle. Dommage car l'avenir institutionnel des outils de proximité est en jeu.

Heureusement, Michel Champredon, président de l'agglomération d'Evreux, était présent pour exposer les dangers que recèlent ces projets de réformes (1). Il y voit la revanche de la haute fonction publique sur les élus dotés de pouvoirs importants depuis l'adoption des lois de décentralisation. Il y devine aussi la volonté du pouvoir central… de recentraliser des décisions qui, aujourd'hui, lui échappent. En fait, le gouvernement veut porter atteinte aux contre-pouvoirs que sont les régions et les départements majoritairement administrés par la Gauche. Cet état de fait est insupportable à Nicolas Sarkozy qui tient à renforcer les pouvoirs des préfets et à limiter celui des élus locaux.

Sous prétexte de simplification et de clarification, on voit bien que la nouvelle organisation ne simplifie rien et ne clarifie rien car la complexité règne. Cette complexité n'inquiète pas le président de la CASE (2). Il considère même qu'elle est nécessaire et qu'il appartient aux élus de la maîtriser, pas aux citoyens qui ne doivent être informés que des grandes lignes des modes de gestion. Sur d'autres points, il est hostile aux propositions du gouvernement mais ne dit pas ce qu'il ferait sur les textes en l'état.

La CASE, assure-t-il, fonctionne sur le consensus, la recherche de compromis, elle doit, selon lui, éviter la politisation et donc la création d'une majorité et d'une opposition. C'est ainsi que la CASE se retrouve avec une vingtaine de vice-présidents avec délégations et indemnités (3). En favorisant « le flêchage » (4) — comme le prévoit le projet de loi — des représentants des communes au sein des agglomérations, les élus seront élus au suffrage universel. Franck Martin préfère la seule élection du président (ou de la présidente) au suffrage universel direct. Cette solution aurait l'inconvénient de permettre que la majorité des délégués des communes soit opposée à un président élu pour son charisme ou son savoir-faire. Selon moi, le président (la présidente) doit donc demeurer une personnalité élue au sein de l'assemblée désignée par le suffrage universel direct.

Revenons à la complexité. Les réunions des délégués de la CASE avec des ordres du jour surchargés, des questions techniques fastidieuses, se tiennent en l'absence des citoyens (excepté quelques militants ou élus d'opposition). Les citoyens sont très mal informés des politiques conduites par la CASE et de leurs applications concrètes. Comment voudrait-on associer les citoyens alors qu'ils ne possèdent ni les clés ni les argumentaires ? Lors des réunions de quartiers à Louviers, les problèmes soulevés sont toujours des préoccupations individuelles, jamais générales. Ce n'est pas un hasard. La complexité est un obstacle majeur à la participation éclairée des citoyens. La victoire du Non eu projet de traité constitutionnel européen a, par exemple, été un refus de cautionner un texte long, confus, souvent incompréhensible.

Michel Champredon, relayant une demande du PS, souhaite que ces projets de réformes soient soumis à un référendum. Je n'aime pas le référendum. Je n'aime pas tout ce qui ressemble à une volonté d'éliminer les corps intermédiaires, les médiateurs, voire les élus. Comme le dit bien Alain Le Vern quand il évoque le référendum sur l'éventuelle réunification des Normandies « il ne s'agit pas seulement de demander aux Normands s'ils sont pour ou contre la réunification, il faut aussi leur expliquer les enjeux : historique, économique, politique, administratif. Ensuite, quand ils seront éclairés, on pourra voter. »

Ces projets de réformes même s'ils sont adoptés par le Parlement, seront soumis à l'éventuelle censure du conseil constitutionnel et surtout, seront conditionnés aux résultats des élections présidentielle et législative de 2012. La Gauche a annoncé très clairement qu'elle ferait abroger ces lois si elle devenait majoritaire en France. On ferait bien de l'encourager lors des élections régionales.

(1) Jean Louis Destans, président de la communauté de Pont-Audemer était annoncé mais son retour de Copenhague a été, semble-t-il chaotique.
(2) Maîtriser la complexité c'est posséder le pouvoir et ne pas le partager.
(3) A La CASE, Marc Antoine Jamet, maire de Val-de-Reuil, est vice-président sans délégation et sans indemnité.
(4) Dans le projet gouvernemental, les élus des intercommunalités seraient désignés nommément sur les listes municipales (avec la parité donc) dans les communes de plus de 500 habitants.

3 commentaires:

Anonyme a dit…

J'ai quand-même compris que l'eau n'est pas une marchandise, mais que nous payons le traitement de l'eau et de l'eau usée et pas l'eau en elle-même, donc l'eau est un bien commun, qu'il s'agisse de la délégation à véolia ou d'une régie. C'est le conseil municipal qui vote le prix de l'eau. Donc, ce n'est pas une marchandise.
Je suis pour la solution la moins chère, donc pour l'instant, de rester avec le contrat véolia, en attendant la fin du contrat.

Sylvia Mackert

Anonyme a dit…

Le peu de participants est le reflet du fonctionnement de ces structures où les gens ne sont pas vraiment représentés puisque les élus sont cooptés dans les conseils municipaux, donc pas élus directement par la population. En plus, ce sont de grosses machines où les techniciens, réfléchissent, proposent et en fait décident avec les élus "décideurs". Tous ces dossiers compliqués qui défilent, de plus en plus nombreux et complexes, toutes ces décisions à prendre, ça peut être confortable de se laisser couler dans le moule. Ca ne doit pas toujours être facile de dire tout haut qu'on ne comprend pas. Surtout quand toute opposition est mal vue, surtout quand le débat politique est impossible vu que le président impose un concessus de façade. Il y a bien une opposition autour de MA Jamet, mais elle est vécue comme une une rivalité de personnes.
Je suis pour l'intercommunalité, mais pas comme ça.
Sophie Ozanne

Anonyme a dit…

achieChère Madame Sylvia Mackert,
Je ne vous connais pas autrement que par vos commentaires. Mais, à celui de ce jour sur la question du prix de l'eau sur le territoire de la CASE, je voudrais réagir. Vous tenez pour acquise et pour argent comptant l'information que donne Franck Martin, le président de l'agglomération à qui veut l'entendre comme quoi la solution de la délégation à Véolia serait la solution la moins chère, donc celle à laquelle vous adhérez. Êtes-vous bien sûre de disposer à ce sujet de toutes les informations vous permettant d'établir votre jugement ? Je pense que vous auriez intérêt à participer à la réunion d'information du mercredi 9 décembre à 20H00 à Val-de-Reuil, à l'auditorium de l'École de musique (ancien collège Alphonse Allais). Pour l'occasion, l'Association pour la défense du Cadre de vie et de l'Environnement, organisatrice de cette réunion fait venir M. Jean-Luc Touly, l'un des meilleurs spécialistes de la question de l'eau en France. Après cela, et ainsi éclairée, vous pourrez, en toute connaissance de cause, déterminer votre position.
Cordialement.
Reynald Harlaut