Cyril Buffet et Claude Cornu.©Jean-Charles Houel |
Pour le trentième
anniversaire de la chute du mur de Berlin, la SED (la société d’études diverses
de Louviers) avait programmé une conférence de rentrée avec comme invité Cyril
Buffet, ancien haut fonctionnaire en Allemagne (à Berlin) et ancien collaborateur
de Jack Lang et François Loncle, présidents de la commission des affaires étrangères
de l’Assemblée nationale. La salle Pierre Mendès France était comble, pleine d’un
public empli d’une mémoire encore vive des événements historiques si importants
dans la marche du monde.
Cyril Buffet connaît son
sujet sur le bout des ongles. Avec des supports statistiques et photographiques
bien choisis, le défilé des années 1948-1961, ponctuées par le blocus de 1948,
la révolte de 1953, l’influence grandissante de la STASI (police secrète) au
sein de la société, montre bien comment les dirigeants de l’Allemagne de l’est
et de l’Union soviétique ont cru pouvoir agir sans crainte d’une réaction
occidentale qui, il est vrai, aurait pu mener à une guerre mondiale.
Alors que la RDA était
claquemurée, Berlin demeurait le seul ilot de liberté permettant aux Allemands
de l’Est de fuir en occident et notamment en république fédérale. Des centaines
de milliers d’Allemands de l’est ont fui. Jeunes, cadres, ingénieurs, tous formés,
ont quitté une Allemagne dominée par le communisme collectiviste sous l’influence
de Staline d’abord, de Kroutchev ensuite, initiateurs du mur de Berlin destiné à
empêcher, coûte que coûte, la fuite des hommes et des femmes vers la société de
consommation, une certaine opulence et surtout, une liberté individuelle si chère
à des démocrates.
Des morts pour la liberté,
il y en a eu de 1961 à 1989. Même si les dirigeants de la RDA assuraient que le
mur tiendrait plus d’un siècle, c’était sans compter sur les soubresauts de l’histoire
et la suprématie des droits de l’homme.
A la suite de l’arrivée de
Gorbatchev au pouvoir à Moscou, la perestroïka a permis au bloc de l’est d’éclater
et aux Berlinois de l’est de conquérir leur liberté à la suite de quiproquos et
d’improvisations au sein d’un système à bout de forces. Et pourtant, en 1988,
François Mitterrand recevait en grandes pompes Ulrich Honecker, le principal
dirigeant de RDA (1) ! Cyril Buffet a magnifiquement narré ces heures de
novembre 1989. Elles devaient aboutir à un bouleversement mondial puisque
quelques mois plus tard, non seulement la réunification de l’Allemagne était
acquise mais en plus l’URSS éclatait. On croyait à la fin de l’Histoire. Ce n’était
qu’une illusion puisque si des pays de l’est se sont libérés de l’influence
soviétique, leurs peuples souffrant encore de dirigeants « illibéraux »,
autoritaires ou fascisants comme en Hongrie et dans une certaine mesure en
Pologne.
Cette première conférence de
l’année a donc été une réussite majeure. Cyril Buffet continue ses recherches
historiques, motivé qu’il est par l’intérêt de bien connaître une Europe insuffisamment
unie où des mouvements racistes et xénophobes aimeraient donner le jour à
nouveau à des régimes autoritaires. François Loncle s’inquiète de l’influence
de l’extrême droite à l’est là où le niveau de vie symbolise encore l’existence
de deux Allemagnes.
(1) J’ai interrogé Cyril
Buffet sur les réticences du président français à l’égard de la réunification
allemande. Elmut Khol l’aurait rassuré rapidement : l’Allemagne resterait
dans l’OTAN et poursuivrait avec la France, la construction de l’Europe.
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