En 2007, j’ai évidemment voté
pour Ségolène Royal au premier et au second tour de l’élection présidentielle.
Face à Nicolas Sarkozy, la candidate de « désir d’avenir » semblait la mieux à
même d’empêcher l’accession de ce dernier à la présidence de la République.
Pendant longtemps, elle a été la favorite des sondages mais c’était sans
compter sur la campagne de démolition interne laquelle allait conduire à la défaite
de la candidate de la gauche au second tour par 53 % contre 47 %.
Dans le livre qu’elle vient
d’écrire (1) et qu’on peut se procurer dans toutes les bonnes librairies, l’ancienne
députée des Deux-Sèvres, l’ancienne présidente de la Région Poitou-Charentes, l’ancienne
ministre et conseillère de François Mitterrand, raconte comment elle a vécu les agressions sexistes,
les attaques machistes de la part de ceux qui devaient pourtant être ses
camarades. Ségolène Royal, invitée de l’émission C dans l’air, n’y est pas allée
de main morte hier soir. Elle s’est même payée le luxe de dézinguer son ancien
compagnon, François Hollande, « le seul défaut de la candidate » selon Arnaud
Montebourg, en insistant sur le fait que le mélange détonant de vie
publique-vie privée n’a arrangé ni sa campagne ni ses affaires.
Ce qu’elle déplore le plus,
c’est qu’on ait pu mettre en cause son intelligence et que ses rivaux de la
primaire socialiste l’aient fait passer pour « une gourde ». « J’avais pourtant, assure-t-elle, autant de diplômes qu’eux et autant, sinon
plus d’expérience et de compétence. » Sans le mouvement « me too», elle n’aurait
sans doute pas écrit ce livre, en tout cas pas avec ce ton-là. La parole libérée
des femmes, partout dans le monde, justifie qu’elle se livre à quelques
confidences intimes et l’autorise à décrire l’enfer que fut sa campagne durant
laquelle elle fut humiliée même si, heureusement, bien des hommes l’ont entourée
et défendue. Ségolène Royal demeure pourtant pleine d’énergie et de dynamisme
pour défendre deux causes essentielles à ses yeux et aux nôtres : le féminisme
et l’écologie. Elle demeure persuadée que le combat pour l’égalité entre les
hommes et les femmes et pour la défense d’une planète durable (avec changement
de modèle à la clé) sont des atouts forts pour un avenir plus enviable. Certes,
« les mâles blancs et hétéros » ne sont pas une espèce en voie de disparition
(comme 60 % des vertébrés de notre monde périssable) mais les temps « they are a
changing » comme dirait Bob Dylan. A la veille des élections européennes, Ségolène
Royal ménage le suspens : candidate, oui ou non ? Elle dira en
janvier si elle accepte de prendre la tête d’une liste de gauche qui ne soit ni
mélenchoniste ni macroniste, ni purement socialiste si ce mot a encore un sens
en 2018.
Ne soyons pas dupes. La
sortie du livre de Ségolène Royal, pour sincères et vraies que soient ses
confessions, répond à un timing étudié. Qu’elle y règle quelques comptes,
pourquoi pas ? Mais maintenant, elle doit passer à autre chose : Quelle
construction Européenne veut-elle ? Quelles alliances est-elle prête à conclure ? Quelle sera sa place sur l’échiquier politique alors qu’elle ne s’attend
à aucune mansuétude de ses anciens amis toujours prompts à la tourner en dérision.
Il ne manquerait plus qu’un nouveau Laurent Joffrin la traitât de Bécassine…Nul
n’est parfait. A Libération ou ailleurs.
(1) « Ce que je peux enfin vous dire » éditeur Fayard.
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