Le président de la République
veut lutter contre les fake news, notamment en période électorale. Il a encore
au travers de la gorge, durant la dernière campagne présidentielle, les
affirmations d’un site russe indiquant qu’il avait un compte caché aux Bahamas,
information que des opposants (le FN notamment) eurent tôt fait de relayer plus
ou moins officiellement. Pour ce faire l’usage des blogs d’extrême droite, les
tweets des partisans des chemises noires, le relais flou mais propagandiste de
certains sites officiels comme celui de RT (Russia today) ont obligé les équipes
réunies autour d’Emmanuel Macron à réagir…mais avec des moyens limités ou
tardifs.
légende : voir en bas de page. |
En évoquant ces fake news
devant les journalistes présents à l’Elysée, hier, le Président de la République
sait qu’il va susciter un débat au sein de la presse elle-même et aussi parmi les
partis politiques, ce qui n’empêche pas les citoyens que nous sommes d’avoir
une opinion. Qu’est-ce qu’une fake news : c’est une information de l’ordre
de la rumeur, inventée de toutes pièces, ne s’appuyant sur aucun fait objectif,
destinée à tromper l’opinion ou à tout le moins à la conduire à douter. Donald
Trump est évidemment l’exemple le plus criant d'utilisateurs de fausses
nouvelles. Malgré les évidences, la réalité des faits, la vérité (toujours
relative certes) il parvient chaque jour à distiller un poison qui agit
lentement, progressivement, mais qui, à terme, risque de faire s’effondrer l’édifice
démocratique auquel la presse concourt.
Emmanuel Macron n’a pas tort
quand il souhaite que des textes légaux puissent sanctionner rapidement et sévèrement
les auteurs de ces fausses nouvelles qu’Internet répand à foison. Et la liberté
d’expression ? Nous ne sommes pas aux États-Unis. La démocratie mature qu’est
la France dispose de textes réprimant la diffamation, l’injure, la propagation
de fausses nouvelles. François Fillon a même tenté d’utiliser ce biais pour
faire condamner le Canard enchaîné dans l’affaire des emplois familiaux. Il a
perdu mais des lois existent. Il n’en demeure pas moins qu’une difficulté réelle
surgit quand il s’agit de faire la différence entre fait et opinion. La loi
future doit garantir à nouveau ce bien précieux nécessaire au débat et à la
liberté de choix des électeurs. Trump a inventé le concept de vérité
alternative, une escroquerie sémantique ravageuse auprès des personnes les
moins informées et donc crédules.
Le canal que propose
Emmanuel Macron est plus spécifique, plus précis. Il vise à prévenir le délit
de propagation de fausses nouvelles en créant un arsenal juridique dissuasif
autant que répressif. Même s’il est nécessaire de légiférer pour tenir compte
du contexte technologique actuel (la fausse nouvelle se répand à la vitesse de
la lumière), je souhaite bien du courage et beaucoup de prudence à ceux et
celles qui rédigeront la future loi. En matière de liberté d’expression et de
liberté de la presse, on ne doit toucher aux textes que la main tremblante.
Légende de la photo © Jean-Charles Houel : en 1977 à Louviers lors d'une campagne électorale municipale, le SAC (Servide d'action civique) avait collé des affiches dans Louviers au nom de la liste d'Action de gauche. Il s'agissait évidemment (par la propagation d'une fausse nouvelle) de susciter un réflexe de peur neuf ans après les événements de mai 1968. Poursuivis, les responsables furent identifiés et pour certains condamnés devant le tribunal correctionnel d'Evreux.
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