MAJ avait accueilli Valérie Fourneyron, alors ministre. |
Marc-Antoine Jamet, maire de Val-de-Reuil, ne mâche pas ses mots. Il est sévère avec les candidats de « La République en Marche » — du moins avec certains — et déplore la perte d'influence du parti socialiste. Il écrit :
« Le second tour des élections législatives ne pouvait que confirmer la
tendance observée dimanche dernier. Il a donc assuré au nouveau
Président de la République une majorité dont le caractère inédit relève
autant de sa composition, à la fois hétéroclite et monocolore, que de son
profil, renouvelé, mais déroutant, que de son ampleur dont on ne sait si
elle sera gage d’efficacité ou de lourdeur pour le Gouvernement.
Plus de 350 députés forment désormais, pour les cinq années qui viennent,
la majorité parlementaire dont disposera le Président de la
République. Elle lui permettra de mettre en œuvre le programme de réformes
qu’il a annoncé, mais dont il n’est absolument pas certain qu’il a été intégré
et accepté par les Français qui l’ont élu le 7 mai dernier. Cette
situation ambiguë est la conclusion logique et mécanique d’un cycle
présidentiel et législatif où la confusion et le flou auront été
prédominants.
Seul élément certain : l’abstention, associée à l’importante
somme des bulletins nuls et des votes blancs, est devenue la seule et réelle
majorité de notre pays. C’est cette majorité qui a permis au chef de
l’Etat de l’emporter, comme autrefois au Front National de peser, puisque ce
sont principalement ses électeurs qui se sont déplacés. Mais c’est
une majorité inerte et lointaine, une majorité inutile et invisible, une
majorité silencieuse et bougonne, dont il faut s’inquiéter qu’elle aille
chercher ailleurs qu’à travers les débats d’un parlement godillot, les
garanties sociales qu’elle attend. 60% des Français et des Eurois ont
choisi de ne pas suivre, de ne pas s’exprimer, de ne pas approuver. Cette
réalité jamais observée auparavant souligne non seulement le faible intérêt des
électeurs pour un second tour dont l’issue avait été largement dessinée dimanche dernier, mais
aussi la sourde réprobation d’une partie du corps citoyen devant le
bonapartisme digital du nouveau Chef de l’Etat. Ajoutons que la succession des
primaires de la droite et de la Gauche, puis des élections présidentielle et
législatives, succession censée donner du souffle à notre démocratie, l’a en
fait épuisée.
L’Eure, comme un très grand nombre de départements métropolitains, se verra
désormais exclusivement représenter par des députés d’En Marche. C’est
paradoxalement une promesse d’immobilisme. C’est un appauvrissement
intellectuel. On s’inquiètera, hormis pour un ancien ministre de Nicolas
Sarkozy réélu au prix d’un changement d’étiquette à vue dans la 1ère
circonscription, de l’aura limitée, du faible charisme, des capacités
vacillantes de ces élus de circonstance. On remarquera leurs incohérences
idéologiques et leurs invraisemblances politiques. Comme partout, on
notera qu’ils ne représentent que la France qui va bien, des bien-pensants et
des bien-portants, à laquelle, élus professionnels, amuseurs radiophoniques,
médecins, fonctionnaires, ils appartiennent. Ce sont les « heureux du siècle ». Attaché aux
valeurs qui fondent la solidité de nos institutions et de notre
République, je salue cependant leur victoire et adresse à ceux qui l’ont
méritée, Bruno Le Maire, Fabien Gouttefarde et Marie Tamarelle, des
félicitations sincères. Ils ont œuvré, sans provocation ni arrogance, au
rassemblement de tous les républicains, démocrates et progressistes lors de
cette campagne d’entre-deux tours.
Tous les candidats du Front National échouent dans toutes les
circonscriptions de notre département. Leur impossibilité à travailler et
à proposer un projet à la fois crédible et sérieux, juste et respectueux, a été
durement sanctionnée par les électeurs eurois. Dans l’ensemble des territoires
de notre département, dans nos villes comme dans nos campagnes, leurs
résultats sont en très net recul par rapport au second tour de l’élection
présidentielle. Je m’en réjouis, mais ne m’en satisfais pas. La présence
systématique du Front National au second tour de chaque élection depuis les
dernières élections municipales ne peut devenir automatique.
Dans un paysage politique devenu monocolore, la Gauche, éliminée au 1er tour
dans notre département, réduite à la portion congrue dans la future
Assemblée, est à reconstruire totalement. Un espace existe pour une
formation qui ne soit ni hostile ni docile, pour une force progressiste qui ne
tombe ni dans le radicalisme mélenchonien ni le contentement macronien. Sur la
solidarité et le refus des propositions qui tendraient vers l’exclusion, sur la
protection des salariés et l’opposition à des mesures qui aboutiraient à leur
réduction, sur la fiscalité et le rejet de toute loi qui renforcerait les
inégalités et appauvrirait les retraités et les moins aisés, des réponses de
justice sociale et d’égalité devront être apportées. Il faudra dire à la fois
notre désapprobation sur la réforme du Code du Travail, sur la hausse de la
CSG, sur la baisse de la fiscalité au seul bénéfice des plus fortunés, sur les
menaces qui pèsent sur l’assurance chômage, et, en même temps, être en capacité
de proposer de nouvelles solutions, d’amener de vraies propositions.
Le pluralisme des opinions et la nécessité d’une confrontation libre et
démocratique, qui ne trouveront plus aucune expression au Palais Bourbon,
doivent perdurer. Pour cela, il faudra s’appuyer sur le travail de
proximité de nos élus locaux, dans les majorités municipales de Val-de-Reuil,
Pont de l’Arche, Verneuil sur Avre, Serquigny et Pont-Audemer comme dans les
oppositions, avec Martine Séguéla aux Andelys et Timour Veyri à Evreux,
retisser des liens plus solides et plus profonds avec le milieu syndical et
associatif, et, plus généralement, amener le débat sur des positions que la
future Assemblée Nationale ne défendra pas. La Gauche devra, demain, avec ses
partenaires et ses alliés, travailler, amender, débattre et proposer. Si son
appareil est à repenser, ses idées, elles, plus que jamais, ont un sens et un
intérêt. La situation politique impose de nous réinventer. Nous en
avons le devoir et la responsabilité. »
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