Quand on lit les résultats
du référendum turc organisé hier par le président Erdogan, on ne peut que déplorer
la disparition de la démocratie au bénéfice d’une autocratie dangereuse. En
concentrant les pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire, Erdogan sort des
schémas institutionnels propres aux canons de nos républiques. Il devient l’homme
fort de la Turquie avec 51 % des voix et musèle toutes ses oppositions déjà
bien mal en point après les décisions présidentielles succédant au coup d’état
de juillet dernier. Il ne manque plus que l’organisation d’un référendum rétablissant
la peine de mort pour tuer définitivement le projet d’adhésion de la Turquie à
l’Union européenne aujourd’hui bien mal en point.
Malgré la suspicion de
manipulations et de fraudes, Erdogan a gagné son pari. Certes, il ne s’agit pas
d’un plébiscite puisque la Turquie est nettement divisée en deux et que les grandes
villes dont Ankara, Izmir et Istanbul ont voté contre le oui. Le principe du référendum
— je l’ai souvent écrit sur ce blog — ne permet pas les nuances : c’est
oui ou c’est non ! C’est souvent ainsi que les défenseurs du référendum
conçoivent le dialogue démocratique : passer au-dessus des partis, des
corps intermédiaires et éviter toute explication rationnelle ou tout débat
contradictoire structuré. C’est si vrai que les 18 articles approuvés hier par
les Turcs n’ont même pas été adressés aux citoyens qui n’ont reçu que deux
bulletins de couleur. La campagne a été marquée par l’omni présence d’Erdogan
sur les affiches, les écrans de télévision, l’opposition devant se contenter de
la portion congrue. Et quand on pense à tous ces journalistes, démocrates,
universitaires, fonctionnaires, emprisonnés et réduits au silence, il est déjà
miraculeux que près de 49 % des Turcs aient répondu Non.
Voilà pourquoi je combats le
référendum. Il a toutes les apparences de la démocratie mais en réalité il n’est
qu’un outil de puissance. Dans des mains dangereuses, il devient un instrument
d’oppression au service d’un parti, d’un clan, d’un homme. En France, les défenseurs
acharnés du référendum que sont Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon savent
combien l’émotion et le « simplisme » comme dirait François Hollande ont de
prise sur l’opinion. Les gaullistes aussi aimaient bien le référendum. De
Gaulle l’a d’ailleurs payé au prix fort en 1969 car il arrive, parfois, que
ceux qui posent les questions reçoivent de mauvaises réponses. Ou en tout cas, pas celles qu'ils escomptent.
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