Vincent Duclert (à g) et Claude Cornu de la SED. |
Ecrit en 1942, édité en 1943
à New York, « Liberté, liberté chérie » de Pierre Mendès France raconte le
combat d’un homme pour défendre son honneur bafoué, son attachement viscéral
aux valeurs républicaines mais également l’engagement d’un combattant toujours
prêt à se placer au service d’un patriotisme actif dans la lutte contre l’occupant
nazi. Il aura fallu l’intervention énergique du général de Gaulle pour que
Pierre Mendès France cesse ses opérations aériennes à risque.
Homme d’honneur et de
principes, Pierre Mendès France le demeurera toute sa vie. C’est sans doute
pourquoi la 4e République s’accommoda mal d’un tel dirigeant plus
enclin à défendre des idées, des projets et « agir » qu’à se livrer à des jeux
stériles conséquence d’un régime des partis qui mena la France au bord du
gouffre en 1958. Sa haute idée de la politique le condamna malheureusement à être
considéré comme rigide voire austère quand son attitude n’était rien d’autre
que de la rectitude et le respect d’une conscience éclairée.
Devant
les auditeurs de la Société d’études diverses de Louviers et sa région, Vincent
Duclert, historien, chercheur au Centre d'études sociologiques et politiques Raymond Aron (EHESS) a narré avec conviction l’histoire d’un livre
écrit par un homme blessé ayant soif de justice et de vérité mais accessible à
l’affect si l’on en juge par les pages consacrées à Louviers, sa ville, sa
maison des Monts, ses amis fidèles, qu’il survole lors d’une opération de
bombardement de son escadrille des FFL (à lire dans les carnets de guerre).
C’est une bonne idée d’avoir réédité le livre de PMF en 2015 (1) et d’y
avoir adjoint des annexes permettant de mieux comprendre la démarche de celui
qui allait devenir président du conseil et résoudre la coûteuse guerre d’Indochine,
réussir la transition en Tunisie sans oublier de laisser en mémoire une méthode
fondée sur la nécessité d’informer le citoyen pour qu’il comprenne les actes de
ses dirigeants et puisse, le cas échéant, lui demander des comptes. Eric
Roussel, ancien président de l’Institut Mendès France, brossa les traits
saillants de ces 7 mois et 17 jours qui appartiennent, comme on dit aujourd’hui,
au roman national.
Ce livre de guerre avait une autre vocation. Edité aux Etats-Unis
(il ne parut en France qu’en 1977 à l’initiative l’éditeur Fayard) Pierre Mendès
France voulait également convaincre les Américains que Vichy n’était pas toute
la France et que bien des citoyens de notre pays contestaient l’occupation et
approuvaient la lutte des Anglais contre l’armée allemande et le régime nazi. A
cette époque, bien des Français — et qui n’avaient tous, loin s’en faut — les
Gaulois pour ancêtres, s’engageaient dans une résistance active (pour une
minorité d’entre eux) ou une passivité, certes moins dangereuse, mais utile
pour affaiblir Vichy.
Jean-Denis Bredin et Christiane Rimbaud ont, chacun avec leur
talent, raconté le procès Mendès France de Clermont-Ferrand et cette accusation
inique de désertion alors que PMF voulait rejoindre l’Afrique du Nord pour y
continuer le combat. Son évasion lui permit non seulement de recouvrer sa
liberté mais aussi et surtout de faire pièce aux accusations de Vichy et sa
justice aux ordres. « Liberté, liberté chérie » demeure donc un livre essentiel
dans la compréhension du ressentiment de Pierre Mendés à l’égard d’un pouvoir
qui voulait à tout prix accuser et diffamer les hommes du Front populaire.
(1) Gràce à Michel Mendès France (l'un des fils de PMF) et Joan son épouse qui ont compulsé nombre d'archives personnelles ou publiques.
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