(photo compagnie Dominique Brun) |
Un choix cornélien. Rester à
Louviers pour visionner « Merci patron » au cinéma Forum avec la présence espérée
de François Ruffin (1) ou aller à l’Arsenal de Val-de-Reuil y apprécier « Le
sacre du printemps » chorégraphié par Dominique Brun. J’ai fait le choix du cœur
et non celui de la raison. Autant un film documentaire peut être vu à la
demande, autant un spectacle vivant ne dure qu’un instant et nécessite une présence
physique, attentive, passionnée…
Il est étrange qu’au moment
même où Marc-Antoine Jamet se faisait conchier par des adversaires (et aussi des
ennemis politiques) pour son rôle équivoque dans un arrangement au service de
LVMH filmé à son insu, un autre spectacle était donné dans un théâtre voulu,
justement, par le même MAJ, maire de la ville et ambitieux au service d’une
collectivité en progrès.
Ce que je sais de l’auditoire
de Louviers est qu’il y avait foule. Une foule composée de membres de la gauche
de la gauche, de socialistes anti-Jamet, d’élus de l’opposition rolivaloise et
aussi d’authentiques militants mélenchonistes supporteurs de François Ruffin et
du mouvement « la nuit debout ». On ne saurait reprocher à tous ces activistes
et militants un engagement nécessaire quand le gouvernement nous
offre un spectacle aussi navrant. François Ruffin pourra bientôt piéger
ces députés socialistes, pourfendeurs de Jamet, mais suivistes de Valls et El
Khomri et sa loi Travail si favorable au patronat. Merci qui ?
Revenons à la danse et à l’Arsenal
puisque c’est en ce lieu culturel de haut niveau que s’est donné le ballet de
Nijinski, Stravinsky revu et corrigé par Dominique Brun et devant un très nombreux public comprenant nombre de jeunes. Un public désemparé,
sans voix, ayant eu du mal à « adhérer » comme on dit. Surtout dans la première
partie où les corps sont devenus ceux de primates gauches, aux membres désaxés
et aux torses pliés courant après on ne sait quel monde imaginaire. Nijinski
voulait cela et la chorégraphe contemporaine s’est donc inspirée des dessins de
Valentine Gross Hugo, seuls témoignages du travail du grand artiste russe.
La seconde partie,
sacrificielle, plus abordable, moins essoufflée, moins inquiétante alors que l’héroïne
pourtant perd la vie, a suscité des applaudissements de soulagement. Ceux
adressés à François Ruffin étaient sans doute plus spontanés et moins réfléchis.
Toute la différence, en somme, entre l’art et la militance. Cette dernière
n’empêchant ni l’humour, ni le questionnement sur le fonctionnement de notre
société.
(1) François Ruffin, prétextant
un agenda fourni, a fait faux bond aux Lovériens. Son absence n’a donc pas
permis la tenue d’un débat pourtant promis au public.
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