Le projet de loi sur le
renseignement suscite une unanimité à gauche et à droite. Que la droite
donne son aval à un texte jugé dangereux par un collectif d’associations de défense
des droits de l’homme n’est pas surprenant. Que l’idée vienne d’un gouvernement
de gauche nous paraît un tantinet bizarre. Le juge d’instruction
antiterroriste Trévidic, invité du Grand journal de Canal Plus, hier soir, a
mis en garde les citoyens contre cette loi, par bien des aspects, liberticide.
Elle ressemble étrangement au Patriot act de Georges Busch, une loi américaine
approuvée par le Congrès 45 jours après les attentats contre les tours jumelles
de New York en septembre 2001. Ce Patriot act, prévu pour une durée de cinq années,
a été systématiquement renouvelé et Barack Obama s’en est très bien accommodé.
Il n’a pas tenu sa promesse de fermer le centre de Guantanamo qui héberge
toujours plusieurs dizaines de prisonniers soupçonnés, suspects…ou innocents.
Le problème de toute loi
vient du fait qu’elle peut être appliquée par n’importe quelle majorité et n’importe
quel gouvernement. Il faut donc que le législateur s’interroge sur l’avenir des
textes qu’il présente et approuve et réfléchisse sérieusement aux conséquences
des lois qu’il propose.
Une loi qui permet de poser
des balises sur les automobiles de n’importe quel citoyen, autorise la pose de
micros aux domiciles privés et le décryptage des téléphones portables de
quiconque sans aucun contrôle d’un juge mais sur simple volonté des policiers
ou des gendarmes est une loi qui ne laisse pas de m’intriguer. Manuel Valls, Premier
ministre et Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois de l’Assemblée
nationale jurent que les libertés individuelles ne seront pas menacées…mais comme
63 % des Français se disent d’accord avec une restriction de celles-ci s’il s’agit
de lutter contre le terrorisme, je n’ai aucune confiance dans un peuple peureux
prêt à sacrifier sa liberté au bénéfice d’une autorité administrative. C’est
aussi pour ces raisons que je m’oppose à la vidéosurveillance dont je ne nie
pas certains avantages moins grands cependant que les inconvénients pour des
principes supérieurs.
Terrorisme ? Qu’est ce
qu’un terroriste ? S’il est facile de qualifier les frères Kouachi et Amély
Coulibaly de terroristes à la fois pour l’entreprise individuelle et la volonté
collective, je crains que l’extension de la définition soit porteuse d’un
danger non mesuré. Imaginons Marine Le Pen au pouvoir. Les militants de gauche,
notamment, ne seront-ils pas tous les terroristes en puissance puisque le
propre des régimes autoritaires à la Poutine, c’est de nier l’existence de
toute opposition et de qualifier ses membres de gêneurs. On sait ce qu’il
advient des opposants politiques en Russie : journalistes, militants des
droits de l’homme, internautes critiques, tous sont soumis à la même traque du
FSB, aux mêmes brimades voire aux mêmes assassinats.
Trente députés ont écouté
Manuel Valls leur vanter son projet de loi. C’est dire combien la représentation
nationale a peu d’estime pour des questions aussi essentielles que les libertés
fondamentales inscrites dans la déclaration des droits de l’homme. Il est sain
que des organisations, des associations, des syndicats de journalistes, par
exemple, soulèvent des objections crédibles et invite le gouvernement à y regarder à deux
fois avant de commettre l’irréparable.
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