La manifestation est un droit constitutionnel qui permet au peuple de faire connaître son avis. (photo JCH) |
Christian Estrosi et Marine
Le Pen, de conserve, demandent un référendum en France sur leur sujet
favori : l’immigration. Dopés par les résultats de la votation suisse et
le vote ancien sur les minarets, les deux représentants de la droite extrême (UMP) et
de l’extrême droite (Front national) — en campagne électorale ne l’oublions pas — veulent surfer
sur la vague populiste. Avouons-le : sur le plan purement électoraliste,
ce n’est pas mal joué. Mais sur le plan de la cohésion sociale et de la
responsabilité politique, c’est archinul.
Quel est le problème ?
La votation populaire est constitutionnelle au sein de la confédération
helvétique. Pour un oui ou pour un non, c’est le cas de le dire, des
associations, des partis, des individus peuvent demander (sous certaines
conditions) que les électeurs(trices) se rendent aux urnes afin de donner leur
avis. Les sujets peuvent être très divers. Très locaux, strictement cantonaux
ou de niveau suprême car ne l’oublions pas, la Suisse est un état fédéral où
certaines compétences relèvent des cantons (terme qui n’a rien à voir avec nos
cantons français). C’était le cas, dimanche dernier, pour la votation sur les
quotas d’immigrés et sur la libre circulation avec l’Union européenne.
Le référendum, en France,
peut être d’initiative présidentielle ou parlementaire. Il est strictement
réglementé. Il serait idiot de nier qu’il s’agit de démocratie directe et que,
sur des sujets constitutionnels par exemple, on peut comprendre que les
gouvernants choisissent la voie de la consultation directe des électeurs(trices).
En 2005, contre toute attente, les Français(e)s ont d'ailleurs dit non au projet de traité
constitutionnel européen…mais Sarkozy, élu président, s’est empressé de faire adopter par le
parlement (Assemblée plus Sénat) le traité de Lisbonne qui reprenait la
majorité des dispositions prévues dans le projet de traité constitutionnel.
Autrement dit, les Français se sont fait couillonner.
A l’extrême droite, on aime
ces consultations directes qui font parler les émotions, les sentiments, qui
permettent au peuple de faire entendre la voix des chefs, des guides. Vive le
retour de la peine de mort ! Vive les immigrés à la mer ! Vive la
préférence nationale ! Vive la suppression de l’Euro ! Voilà le genre
de questions-affirmations que nous proposerait Marine Le Pen si, par malheur,
elle dirigeait le pays.
Il faudrait faire vite, il
faudrait une campagne-éclair genre Blitzkrieg, sans trop d’explications, sans
trop de débats. Pourquoi embrouiller les esprits avec des évidences, pourquoi
consulter le Parlement avec tous ces privilégiés, ces professionnels de la
politique…que de temps perdu.
Le référendum à la sauce Le
Pen, c’est la voix de son maître, les mandats impératifs, les ordres non
transgressifs, l’obéissance absolue ! C’est surtout le règne de la
démagogie, du populisme effréné, le recul de la république et de la politique
noble même si elle est pétrie de contradictions et aussi, malheureusement parfois, de
charlatans. L’information, la participation des habitants est pourtant indispensable.
Mais rien ne remplacera une assemblée d’élu(e) prenant les décisions et
contraints de rendre des comptes à ceux et celles qui les ont mandaté(e)s. Le
contrôle de la population doit se faire en amont et en aval des élections.
L’électeur ne doit pas demeurer passif. Il doit agir, lui aussi, sous des
formes policées mais effectives. Les sources de la démocratie, non ?
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