Légende : Laurent Fabius, président de l'agglomération de Rouen est incontestablement l'un des leaders de la Gauche normande.
Quand on évoquait devant lui la construction de l'Europe, Charles De Gaulle répondait : « Alors, il faut prendre les choses comme elles sont, car on ne fait pas de politique autrement que sur les réalités. Bien entendu on peut sauter sur sa chaise comme un cabri en disant « l’Europe ! », « l’Europe ! », « l’Europe ! » mais cela n’aboutit à rien et cela ne signifie rien. Je répète: il faut prendre les choses comme elles sont. (…) ». Il en va de même avec la réunification de la Normandie Haute et Basse confondues. On ne fait pas de la politique autrement que sur les réalités. Quelles sont elles ?
Historiquement, la grande Normandie est un fait que personne ne peut contester. Avant la régionalisation qu'on connaît aujourd'hui et la création des deux régions Haute et Basse (à la demande des barons d'Ornano et Lecanuet) Caen, Rouen et le Havre assuraient le tryptique urbain et historique de cette région. Cette Normandie-là est fondée. Le comité régional du tourisme a tenu compte de ce fait puisqu'il est compétent sur les cinq départements normands.
Economiquement, même s'il existe des politiques communes entre la Haute et la Basse-Normandie, toutes les statistiques, tous les flux, les échanges démontrent que la Haute-Normandie est bien plus liée à la Picardie et à l'Île-de-France qu'à la Basse-Normandie. Economiquement, la réunification ne se justifie pas.
Politiquement, les deux régions sont aujourd'hui gérées par la Gauche. Mais la Haute-Normandie avec la Seine-Maritime, surtout, est bien plus à Gauche que la Basse-Normandie essentiellement rurale. En cas de réunification, et avec l'application de la nouvelle loi sur les territoires (élection de conseillers territoriaux sur la base de cantons redessinés et au scrutin uninominal) il ne fait aucun doute que cette région serait dominée par la Droite. Il est légitime que des responsables politiques s'interrogent avec lucidité sur les conséquences de leur choix qui engageront plusieurs générations. Politiquement, aujourd'hui, la Gauche (les politiques qu'elle incarne et la justice sociale qu'elle défend) n'a pas intérêt à la réunification.
Alors ? je sais bien que les centristes (de gauche comme de droite) plaident pour une Normandie unie que leurs pairs ont désunie. Ils y mettent d'ailleurs une ardeur suspecte. Guillaume Le conquérant et le 6 juin 1944 ne suffisent pas à étayer le retour à une région normande unique. La Droite est officiellement « réunificatrice » mais avec une prudence de sioux. Il n'est pas certain que les Bas-Normands soient près à donner les clés de leur royaume au seigneur Bruno Le Maire pas encore adoubé par le suffrage universel. D'ailleurs le gouvernement actuel dispose des moyens juridiques pour unir les deux régions normandes, pourquoi ne le fait-il pas ?
A Gauche, Alain Le Vern et Laurent Beauvais, les présidents socialistes des deux régions (Haute et Basse) font ce que demandait le général De Gaulle. Ils tiennent compte des réalités et du fait que le sujet de la réunification n'est pas du tout une priorité. Si elle le devenait, elle se transformerait surtout en un sujet de mécontentement. Je veux bien que de futurs candidats axent leur campagne sur la réunification de la Normandie. Ce ne sera qu'un cache-misère.
8 commentaires:
@Jean-Charles
la question se pose et je suis toujours surpris qu'un homme de gauche en appel au Général pour étayer ses propos surtout en sachant
que j'ai affaire à un homme érudit
qui sait que la Normandie était une
max de beuzeville
Cher Max, tu sais bien qu'on ne prête qu'aux riches. Le général avait le sens de la formule et maîtrisait le discours. Sarkozy fait des emprunts de circonstance à Jaurès, pourquoi ne pas invoquer le général du 18 juin quand il fait mouche ?
Jean-Charles
Tu te trompe lourdement. Le découpage des deux Régions normandes n'a jamais été fait à la demande des "barons" Michel d'Ornano et Jean Lecanuet. La Haute et la Basse Normandie sont nées de l'aménagement administratif du territoire français, décidé dans les années 50 par l'un des gouvernements de l'époque. La tâche fut confiée, en 1956, à un un jeune énarque de 27 ans, Serge Antoine. Nous lui devons la France administrative d'aujourd'hui, avec quelques aménagements finalisés en 1962.
Lors des élections régionales de 2004, Serge Antoine fut interviewé par l'hebdomadaire Le Point. A la question" avez-vous des regrets sur ce découpage?" Il répondit "Je n'en ai qu'un seul. Avoir coupé la Normandie en deux. J'ai pensé, quelques années plus tard, que qu'une décision politique réunirait de nouveau cette Région".
Voilà la réalité.
Bonne année quand même.
Depuis quand ce sont les énarques qui votent les lois ? Un haut fonctionnaire peut toujours proposer, mais la décision et la responsabilité de cette décision revient toujours au final aux politiques. Cela s'appelle la démocratie. Et qu'on me contredise si j'ai tort, je n'ai pas le souvenir d'avoir entendu d'Ornano et Lecanuet s'opposer publiquement à la partition de la Normandie.
Reynald Harlaut
Cher Reynald Harlaut,
D'abord, je te prie de savoir lire ce que j'écris. Tu te perds en conjectures. Je n'ai jamais dit que les énarques décidaient. En revanche, les énarques se voient confier des missions. Ces dernières sont ensuite entérinées, ou non, par le politique. En l'occurrence, pour la partition de la Normandie, c'est bien monsieur Antoine qui découpa le territoire français en Régions administratives. Quant à messieurs Lecanuet et Ornano, ils étaient encore loin de la politique en 1956. Le premier était professeur dans le Nord de la France et le second à ses études. Etonnant qu'un penseur de ta qualité ne connaissance pas l'histoire administrative et politique de sa Région.
Cher José Alcala,
J'en prends acte, n'ayant pas la science infuse, et acceptant la contradiction car elle enrichit le débat. Mais alors, qui donc, à cette époque avait un intérêt politique à voir la Normandie divisée en deux régions, avant Lecanuet et d'Ornano ?
Merci de ta réponse et bonne année 2010.
Reynald Harlaut
@ Reynal Harlaut
Le gouvernement, de l'époque, pouvait être celui de Guy Mollet ou Pierre Mendès-France. Je ne sais pas quel intérêt il pouvait avoir à une partition de la Normandie. Je pense qu'il faisait confiance à un haut fonctionnaire, sans plus....
Toutefois, je t'accorde le fait que plus tard, vers le milieu des années 60, Lecanuet et Ornano, entrés en politique à ce moment-là, dans ce qui devint leur fief respectif (Lecanuet avait pantouflé dans quelques Cabinets ministériels au préalable)firent tout pour conserver les deux Normandie en l'état. Il n'était pas question pour eux de se laisser dépouiller de leur fauteuil. C'est aussi une réalité.
Sur le site ci-dessous on voit la réunification d'une autre façon, pas du tout économique ou politique, mais culturelle et humaine avant tout et comme une annulation d'une division administrative.
Sylvia Mackert
http://www.normandie-culture.org/index.php?nomPage=accueil&Tag=Normandie
"Être pour la réunification de la Normandie implique de militer pour une décision politique. Être pour l'annulation de la séparation, c'est la volonté d'annuler une simple décision administrative ubuesque. Ensuite pour des raisons d'honneteté intellectuelle. Il serait bien difficile de promouvoir la culture Normande, et ce au travers d'un personnage comme Guillaume le Conquérant, tout en jouant les frileux sur la question de la division de la Normandie. Si je ne m'abuse, on n'apprend pas aux enfants que Guillaume était un Duc de "basse-"Normandie. Enfin, pour des raisons purement culturelles.
La Normandie n'est pas uniquement divisée dans les administrations, mais aussi dans les âmes des Normands. Combien de Normands considèrent les habitants de l'autre bout de Normandie comme de "faux-"Normands ? Combien ne comprennent pas qu'il soit question de réunification ? Combien ne savent même pas que la question existe ? Nous pensons qu'il est important de réunifier les Normands, pour que vienne la fin de la division administrative. Nous laissons les questions politiques aux professionnels, mais il ne faut pas s'étonner que ces professionnels ne fassent rien pour la Normandie si les Normands restent aussi passifs quand il est question de leur identité régionale."
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