Interrogé par des journalistes sur les circonstances de l'embuscade montée par les talibans en Afghanistan qui a causé la mort de dix soldats français et infligé des blessures à une vingtaine d'autres, Nicolas Sarkozy les a apostrophés en leur lançant : « vous n'avez pas honte ? »
Il faut dire qu'un journaliste venait de l'interpeller sur les causes de la mort des soldats et notamment sur les éventuels tirs fratricides courants lorsque les lignes des attaquants et des attaqués sont situées très près les unes des autres.
Des soldats pris dans l'embuscade ont déclaré à un journaliste du Monde que de tels tirs avaient eu lieu. Le président de la République, en s'adressant aux familles des victimes, ce jeudi, a assuré que toute la vérité serait faite et connue sur les circonstances de la mort de leurs proches. Nous savons que nous ne pouvons pas le croire sur parole. Nous devrons être attentifs et vigilants pour la lui rappeler.
En tout cas cette apostrophe présidentielle augure mal de la suite. En insultant les journalistes ou au moins en tentant de les humilier, le président de la République n'est pas dans son rôle. Il devrait savoir qu'il appartient aux représentants de la presse (du moins ceux qui ne sont pas aux ordres) de poser toutes les questions pertinentes à ceux qui sont en responsabilité. Quand dix soldats français perdent la vie, il est normal, dans une démocratie digne de ce nom, de savoir comment et pourquoi ces soldats sont morts pourquoi et comment d'autres ont été blessés. Les journalistes ne doivent pas se décourager ou accepter ces incartades présidentielles. Ils doivent résister, toujours et encore. Il faut enquêter, continuer de poser les bonnes questions, user du droit de suite. Le président de la République a du pouvoir, il n'a pas celui de museler la presse ou de lui donner des leçons de morale.
Ce jeudi, jour de recueillement, impose le respect de la mémoire des victimes. Il n'impose pas le silence dans les rangs de ceux qui ont pour tâche de nous raconter comment fonctionne notre démocratie et quels désordres ils constatent. Ce « Vous n'avez pas honte ? » doit être renvoyé à l'émetteur.
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