21 avril 2017

Pour François Fillon, les journalistes ne devraient être que des greffiers


François Fillon, comme d’autres candidats, a décidé de mettre un terme à sa campagne publique suite à l’attentat d’hier soir à Paris. Il va pouvoir souffler un peu et surtout prendre de la distance par rapport à ses propositions, ses affaires, ses réponses aux journalistes. Du moins, pour ces dernières, quand il accepte les entretiens avec la presse. Car François Fillon est un original. Il est, avec Marine Le Pen, celui qui choisit les journaux ou les émissions, et surtout celui qui, par avance, fixe le programme du contenu des discussions avec les journalistes.

Ces derniers ne sont pas bien vus durant cette campagne électorale. Plusieurs d’entre eux, photographes, cadreurs, rédacteurs, ont été plusieurs fois pris à partie par les supporteurs de François Fillon (1) voire frappés par le service d’ordre du candidat de la droite et du centre ( !). C’est dire le niveau de haine et de ressentiment exprimés par cette violence tripale à l’égard d’une corporation qui, jusqu’à preuve du contraire, n’a fait que son travail d’information et de mise au jour des turpitudes de l’ancien Premier ministre. Dans une société démocratique, les citoyens et à plus forte raison les élus, doivent accepter qu’une presse libre diffuse des informations sérieuses, recoupées, sourcées quand c’est possible. Car il est facile de comprendre qu’un informateur digne de ce nom doit voir son identité protégée et tue eu égard aux conséquences professionnelles ou personnelles qu’il encourrait en cas de divulgation. La loi a d’ailleurs prévu de protéger le secret des sources à cette fin.

Revenons à Fillon. Sur proposition du journal Le Monde, il avait accepté, il y a plusieurs semaines, le principe d’un « questions-réponses » à publier avant le premier tour. Sa situation politico-judiciaire ayant évolué avec sa mise en examen, François Fillon a posé des conditions à la concrétisation de l’entretien : Il n’y aura pas de questions sur les affaires ! Évidemment, le rédacteur en chef du Monde a fait savoir que cette exigence était inacceptable dans un contexte aussi sensible à l’égard de la corruption en général  et des « facilités » de certains élus en particulier. Pour se justifier, François Fillon a répondu qu’il était le seul diriger sa campagne, quant aux questions « c’est lui qui les posait. » Autrement dit, les journalistes deviennent des greffiers et leur rôle totalement artificiel.

Il n’y a que dans les démocratures, les dictatures et les régimes totalitaires (comme en Russie ou en Turquie) que la presse est muselée et les journalistes aux ordres. La conception de François Fillon est erronée, scandaleuse et critiquable. Quand on espère devenir le Président de la République, on doit, au contraire, défendre la liberté philosophique et toutes les libertés formelles d’une démocratie française adulte. Dès sa mise en examen François Fillon aurait dû mettre les pouces. Ça lui aurait évité la pathétique photo de la poignée de main avec un Alain Juppé aux allures d’extraterrestre. Personne n'est dupe.

(1) Il n’y avait guère que dans les meetings du Front national que la presse était conspuée.

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