9 décembre 2020

Tristane Banon disait la vérité sur DSK

Tristane Banon hier soir dans C à vous. (capture d'écran)

 

Ceux et celles qui suivent avec attention l’actualité ont entendu, en 2003, une jeune femme journaliste narrer la tentative de viol commise sur elle par un certain Dominique Strauss-Kahn. Elle a pour nom Tristane Banon. Il se trouve qu’il a fallu attendre 2011 et la campagne interne au PS pour désigner le candidat appelé à affronter Nicolas Sarkozy en 2012 pour que Tristane Banon dépose plainte contre DSK qui l’avait violentée dans une chambre louée pour l’occasion huit ans avant alors qu’elle souhaitait l’interviewer. Elle a raconté ce qui s’était passé dans cette chambre louée ou prêtée par un ami de DSK. Mais elle explique aujourd’hui qu’à cette époque, (en 2003 donc) la parole des femmes ne pesait pas bien lourd face à l’autorité politique de certains hommes…dont DSK.

 

La prescription des faits jouant contre elle, et la tentative de viol n’ayant pu être prouvée, seule une agression sexuelle fut retenue par le parquet. Inutile de dire que dans les diners en ville, surtout à Paris, on glosa avec un humour franchouillard, sur la « mésaventure de Tristane Banon ». Une théorie du complot vit le jour, certains journalistes et confrères s’étant interrogés publiquement sur la publicité qu’elle aurait recherchée, le tout avec une mauvaise foi insigne.

 

Il se trouve que dès sa prise de parole publique, j’ai cru Tristane Banon. Je l’ai crue quand bien même de nombreux amis socialistes tendaient à la ridiculiser ou à la blâmer au point que certains m’ont adressé des courriers indiquant que j’étais « le président du comité de soutien à Tristane Banon », comité qui n’existait évidemment pas mais qui servait de support à un soi-disant bon mot.

 

Tristane Banon est aujourd’hui mariée. Elle est journaliste et écrivaine. Ce mardi soir, elle était l’invitée de l’émission « C à vous » animée par Anne-Elisabeth Lemoine, Patrick Cohen, Marion Ruggieri et Pierre Lescure. A l’occasion de la réeédition de son livre en poche (1) Tristane Banon est venue expliquer, avec sensibilité et  émotion, combien elle avait marquée par l’agression de DSK, et aussi par les réactions des hommes de pouvoir très attachés à agir en meute pour protéger le « meilleur » d’entre eux. Mais comme l’a dit Tristane Banon, le mouvement Mee too, malgré ses excès et ses dérives, a libéré la parole des femmes. Aujourd’hui, on a peine à imaginer que Thierry Ardisson, pour ne pas le nommer, serait capable de rediffuser ce fameux repas au cours duquel seul Jean-Michel Aphatie exprima sa colère et sa réprobation à l’égard du comportement de bien des convives, des hommes en majorité.

 

Croire en la parole des femmes. Ou d’une femme. C’est ce qu’ont fait les policiers de New-York appelés pour une agression sexuelle et un viol dans la chambre 2806 de l’Hôtel Sofitel en mai 2011. Dans le documentaire de Jalil Lespert diffusé sur Netflix, Naffissatou Dialo, devenue célèbre bien malgré elle, raconte comment elle s’est retrouvée face à DSK, nu, et comment il l’a brutalement contrainte à une fellation. Sa vie a depuis été totalement bouleversée. Ses larmes en disent long sur le traumatisme qu’elle a subi et ce ne sont pas les centaines de milliers de dollars qu’elle a reçus qui l’effaceront.

 

Le documentaire nous permet aussi de réentendre les arguments que proféraient les amis de DSK. Qu’il s’agisse de Jack Lang ou d’Elisabeth Guigou les propos sont les mêmes : DSK ? Homme à femmes, séducteur, Don Juan, intelligent, brillant…comment pourrait-on lui reprocher une quelconque violence ? Je crois me souvenir que Jack Lang avait déclaré : « il n’y a pas mort d’homme tout de même ». Et l’ancien ministre de la Culture de fustiger (avec raison cette fois) la marche de la honte infligée à DSK devant 200 journalistes et photographes. Ces images sont d’une violence inouïe. L’humiliation vécue par DSK est-elle cependant à la hauteur de celle ressentie par sa victime du Sofitel ? Depuis, l’ancien directeur général du FMI a poursuivi son chemin, un chemin semé d’embuches que Nicolas Sarkozy scrutait un pas après l’autre : Bois de Boulogne, club échangiste, Carlton…le Président de la République avait un dossier sur chaque étape du parcours de son éventuel futur rival aujourd’hui résident à Marrakech.

(1) 2011 Le bal des hypocrites.

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