A l’heure où j’écris ces
lignes, je ne connais pas les conclusions de l’enquête administrative diligentée
par le Premier ministre sur l’interpellation et l’expulsion de Léonarda, cette
jeune Kosovare, fille de parents sans papiers, eux-mêmes expulsés dans leur
pays d’origine il y a quelques jours. Que cette enquête exonère le préfet ou
Valls ou qui que ce soit d’autre d’une responsabilité directe ne changera rien
au fait que les faits condamnent ceux qui les ont accomplis. Le Réseau éducation
sans frontières, sollicité par les enseignants du collège de Léonarda, a rendu
publiques les conditions de l’intervention de la police lors du voyage scolaire
auquel participait la jeune fille. Il ne fait aucun doute que l’application
stricte d’un arrêté de reconduite à la frontière ne peut se justifier s’agissant de quelqu'un vivant en France depuis près de cinq années, ne parlant que
le Français, ne connaissant que la France, n’ayant aucun lien avec son pays d’origine.
Certains, nombreux à gauche, jugent totalement scandaleuse cette
interpellation-expulsion et ils ont raison. Ce n’était pas la peine de virer
Sarkozy et ses méthodes si c’est pour avoir un succédané (damné ?) de
gauche accomplissant les mêmes actions particulièrement en contradiction avec
les valeurs et les principes auxquels on se réfère quand on est de gauche.
Qu’on ne me parle pas d’angélisme
ou de culture de l’excuse ! Qu’on ne me parle pas de laxisme ou de
laisser-faire ! Ce vocabulaire est bon pour Estrosi et Hortefeux. Quand on est de gauche, on l’est par choix, par un
jugement libre, on l’est pour appliquer des politiques forcément différentes de
celles de la droite extrême. La droitisation des esprits aurait-elle corrompu
notre logiciel pourtant programmé en fonction de la déclaration des droits de l’homme et
d’une certaine idée de la vie en société. Qu’un Coppé, qu’un Ciotti, qu’un
Sarkozy, qu’un Le Pen expulsent une jeune fille de 15 ans au-delà de nos frontières,
ce serait ignoble mais conforme à leur vision du monde. Qu’un gouvernement de
gauche soit complice (jusqu’à preuve du contraire) de cette ignominie a de quoi
nous inquiéter et nous blesser.
J’entends déjà le chœur des
bonnes âmes : Et vous qu’avez-vous à proposer en matière de politique migratoire ?
Michel Rocard avait trouvé la réponse adaptée : « La France ne peut accueillir
toute la misère du monde mais elle doit prendre sa part. » Quand on sait que
sous Hollande, 30 000 personnes sont expulsées de France, chaque année, il
serait bien qu’on nous dise quelle part la France est prête à prendre pour éviter
qu’une famille ayant passé près de cinq années dans notre pays soit jetée sous
les ponts de Pristina.
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