Depuis ce matin, les médias, tous en chœur, entonnent à nouveau la complainte des retraites. Ils nous disent à l’unisson que le choix qui s’offre aux Français est entre l’allongement de la durée du temps de travail et la diminution du montant des pensions. Mais, quelle que soit la solution adoptée, les salariés pressentent d’ores et déjà qu’ils seront à tout coup les perdants. Et si la négociation se déroule comme prévu – tout semble jusqu’à présent parfaitement orchestré –, les syndicats et le pouvoir en sortiront la tête haute avec le sentiment du devoir accompli. Les premiers auront arraché, à la marge, quelques concessions sur la pénibilité ou les inégalités homme - femme, le second aura, pour la forme, demandé une obole aux plus riches.
Voilà, grosso-modo, le discours tenu par tous sur le sujet. De ce point de vue, Jean-Luc Mélenchon n’a pas tort quand il s’insurge contre le prêt-à-penser qui est de plus en plus le lot commun d’un grand nombre de journalistes. Le pouvoir sur l’opinion que leur offre la position qu’ils occupent au sein de la société devrait avoir comme contrepartie une indépendance intransigeante, une plus large ouverture d’esprit et pour beaucoup d’entre eux davantage de modestie.
Car enfin, cette situation, où le pays, confronté à un problème, n’aurait à sa disposition aucune alternative et où il n’existerait pas d’autre solution que celle qui nous est proposée nous rappelle par trop le discours qu’asséna en son temps Margaret Thatcher à la classe ouvrière anglaise, du moins à ce qu’il en restait encore. Et là serait le rôle de journalistes qui, faisant sérieusement leur travail, prendraient l’écoute et seraient le relais des trop rares politiques et économistes à ne pas tourner en rond.
Aujourd’hui, il manquerait environ neuf milliards d’euros par an pour assurer l’équilibre du régime des retraites. Or, la part des salaires dans le produit intérieur brut (PIB) a régressé en vingt cinq ans de plus de 11 % au regard de ce qu’elle représentait dans les richesses créées. Rien qu’en France ce sont 200 milliards d’euros par an qui passent annuellement de la poche des salariés à celle des actionnaires, si l’on se réfère à l’équilibre du marché du travail tel qu’il était en 1982.
Le choix est donc avant tout politique. Soit l’on continue de favoriser le versement des dividendes aux actionnaires et continueront de croître de façon exponentielle les inégalités, soit on met sur la table la question du partage des richesses produites. Et là, que représentent les neuf milliards de déficit que le pouvoir entend faire payer au salariés au regard de ces deux cents milliards distribués aux plus riches. Sur cette question, Martine Aubry s’est faite jusqu’à présent, on ne peut plus discrète.
Reynald Harlaut
2 commentaires:
D'accord avec toi Reynald et de plus, c’est désespérant de voir que nos syndicats se prêtent allègrement à la comédie qui consiste à attendre anxieusement les résolutions du Conseil d'Orientation des Retraites.
Aucun des dirigeants syndicaux ne semble décidé à enclencher la vitesse supérieure.
Bien au contraire, ils semblent suivre béatement le calendrier et la comédie sociale mise en scène par Sarkozy.
Ce dernier vient d’annoncer que le texte définitif sera rendu public en...juillet ! ? !
Contrairement à toutes les déclarations précédentes où Sarkozy s’était engagé à prendre le temps qu’il faudrait, à ne pas passer en force, à refuser tout sujet tabou, etc
Ce simple fait aurait mérité une réaction de dignité de la part des dirigeants syndicaux. Comme quitter la "consultation" en cours et exiger de ne plus subir le calendrier , mais d’en être les concepteurs.
Comment se fait-il qu’il n’y ait pas un point-presse quotidien pour nous tenir informés de ce qui se passe ?
Tout est fait pour nous endormir et surtout qu’on ne s’intéresse pas au dossier des retraites.
On pourra ainsi se réveiller à la rentrée avec des directions syndicales qui se satisferont d’avoir eu gain de cause sur quelques points marginaux, et qu’elles aient pu évoquer "la pénibilité du travail" et le dossier "des séniors".
Sans doute reprocheront-elles aux salariés leur manque de mobilisation, en particulier, ce 1er mai qu’elles ont annoncé "revendicatif" ???
Voilà,... la régression sociale sur les retraites sera une fois de plus validée,... sans trop de mouvements sociaux,... et la France d’en haut pourra encore se frotter les mains d’avoir réussi à faire payer toujours les mêmes.
Le pire, c’est que pour le 1er mai, sur un sujet aussi énorme que celui des retraites, aucune intersyndicale ne va se réunir pour se mettre d’accord sur le CONTENU "revendicatif".
Tout se passe comme si tout était joué, il n’y a plus rien à faire, soyons résignés et... silencieux ?
Dire que nous sommes dans une crise, une situation qui n’a jamais été aussi favorable, tant le capitalisme échoue en profondeur et tant le peuple français en a assez !...Et nous restons l’arme au pied...
Hallucinant !...
C'est Edouard Herriot qui disait en 1961 dans ses "Notes et Maximes": "Quand, dans un État, vous ne percevez le bruit d'aucun conflit, vous pouvez être sûr que la liberté n'y est plus."
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